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Une incroyable exploitation par la violence de la tristesse humaine… Spécial

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Les adeptes de la Church of Ra –en l’occurrence, les formations qui gravitent autour du groupe AmenRa– n’avaient sûrement pas manqué de bloquer ce jeudi 25 mai dans leur agenda paroissial. Et pour cause, Wiegedood (mot néerlandais qui signifie mort du nourrisson), emmené par Levy Seynnaeve (bassiste d’Amenra), fêtait ce soir à Courtrai la sortie du troisième tome de son opus, « De Doden Hebben het Goed ». Afin de marquer l’évènement d’une pierre blanche, la formation gantoise avait donc décidé de jouer l’intégralité de ses trois albums. Dans la foulée, sans pause. Tout ce que Wiegedood a pu produire en trois années, il va le jeter en pâture en deux heures intenses de show (sold out). Enfilez vos bottes, on va se promener dans les bois.

C’est à 20h30 pétantes que le trio de Black Metal a fixé rendez-vous à son public afin de voyager dans le temps, au fil de ses trois long playings. Il est un peu moins de vingt minutes avant le début des hostilités et la petite salle De Kreun, d’une capacité estimée à cinq cent âmes, commence petit à petit à accueillir la faune du jour. Un public certes typé du sceau de la communauté Metal, mais néanmoins très hétérogène : le jean côtoie le cuir, le t-shirt n’est pas loin de la chemise, les longs cheveux sont voisins de la calvitie. Un constat à l’image de la musicalité de la Church of Ra, où les codes des communautés musicales sont fréquemment brisés. Côté scène, une machine à fumée emplit doucement et de manière continue l’espace d’un brouillard blanc. Deux longs drapeaux noirs frappés du logo du groupe –un enchevêtrement mystico-païen de branches au sein duquel on peut y déchiffrer chacune des lettres de ‘Wiegedood’– sont disposés de part et d’autre du podium, accrochés aux amplis. Chaque retour est peuplé d’une demi-douzaine de bières et autres petites bouteilles d’eau. La prestation atypique de ce soir n’est pas loin de relever du marathon.

Deux caméras sont braquées vers les backstages, guettant l’arrivée des artistes. L’air sombre et concentré, ils finissent par débouler et prendre position. Pendant que Wim Coopers (qui milite également chez Oathbreaker) fixe les toms, baguettes à la main, de sa batterie, Gilles et Levy (…autre homme fort d’Oathbreaker) achèvent d’accorder leur guitare, tapis dans l’obscurité. Derrière eux, l’intrigant logo du groupe est projeté sur fond noir. Plus les secondes passent, plus la tension est palpable. Soudain Wim entrechoque ses baguettes et donne le coup de départ de cette épopée musicale. « Svanesang » démarre à du deux cent à l’heure. Un véritable coup de poing dans l’estomac. Une impression de vertige vous envahit pendant quelques secondes, le temps de se remettre de ce déferlement de décibels, tel un passage abrupt sous un rouleau compresseur. C’est à présent l’artwork du premier LP qui est projeté sur cette énorme toile blanche tapissant tout l’arrière de la scène. Ses longs cheveux blonds lui barrant le visage, Gilles joue du poignet d’un geste aussi rapide que chirurgical. Aucune émotion ne se lit sur son visage, tellement il est focalisé sur ses cordes. A quelques mètres de lui, vêtu d’un sobre t-shirt noir sans manches, Levy –dont l’épaisse tignasse ondule en pagaille– martyrise tout autant son manche. Il finit par se diriger vers son pied de micro, lève la tête et expulse de sa cage thoracique ce hurlement lancinant et empli de spleen qui mettra l’âme en péril de chacun et chacune pendant ces deux heures de set. Derrière eux, en véritable chef d’orchestre, Wim cogne dur et sec sur son kit de batterie tout en arrosant copieusement la salle de ses blasts dévastateurs. Une moissonneuse batteuse lancée à plein régime.

Wiegedood, c’est l’incarnation autant visuelle que musicale de déclinaisons autour d’un même thème : la perte et la tristesse qui en émane. Si ce combo a d’ailleurs vu le jour, c’est  suite à la disparition d’un très bon ami du drummer. Ce dernier et les deux autres membres ont voulu lui rendre hommage et exorciser leurs griefs par la note. Chaque elpee lui est depuis lors dédié. La continuité, c’est aussi une notion intentionnelle à tous points de vue. Il suffit de voir les trois artworks de leurs albums pour s’en rendre compte : une plaine désolée, grise et froide, sur laquelle est planté un emblème fait de branches entrelacées, tel un totem ou un emblème vaudou. Un exorcisme qui se répète encore et toujours. Il en va de même musicalement : chacun des trois opus recèle quatre titres, dont les structures sont généralement les mêmes, à savoir un déferlement brutal et chaotique de sonorités, brisé net par un souffle d’un calme létal, avant d’être à nouveau emporté par un tourbillon de riffs et de blasts. Le tout sans cesse nourri par des nappes vocales lugubres et hypnotiques en arrière-plan. Un mandala dont les couleurs sont toujours identiques, mais dont les agencements, les formes et les contours offrent sans cesse une perspective nouvelle, une énième déclinaison du manque et du déchirement ressentis suite à la disparition d’un être cher. Il va de soi que la traduction en ‘live’ répond donc à la même logique. Chaque musicien est enfermé dans sa bulle, dès le premier pied posé sur les planches jusqu’au moment de la quitter. Pas de contact avec le public, une pure interprétation des morceaux, sans avoir de réel jeu de scène. Les émotions jaillissent malgré eux, la magie opère avec le public sans qu’il soit pourtant invité. Tout est implicite, l’intellect est mis de côté et les sensations prennent entièrement le contrôle.

Les morceaux s’enchaînent. Seuls des applaudissements viennent ponctuer les différentes compositions. Quand les lumières blanches et rouges ne viennent pas balayer l’estrade au rythme effréné de la batterie, c’est un large faisceau blanc qui met en exergue l’un des deux guitaristes, et plus précisément lors des moments de respirations plus intimes. A la fin de l’exécution d’un LP, l’arrière de la scène redevient noir, le logo du band réapparaît et les applaudissements deviennent franchement nourris. Le groupe, quant à lui, reste impassible. N’y voyez pas une quelconque forme de condescendance, mais bien un haut degré de concentration afin de pouvoir déballer tout ce que les musicos ont dans les tripes.

Ce show, unique en son genre dans l’histoire du combo, a permis le temps d’un concert de pouvoir ressentir l’évolution de sa musique en trois années de temps, une complexification progressive dans l’écriture des morceaux, une audace de plus en plus marquée, tout en enrobant un même noyau dur de différentes couches aux couleurs et saveurs différentes. Le tout, délivré de manière chirurgicale ; des pans de murs musicaux s’abattant sur une fosse pour le moins envoûtée. L’occasion pour les Gantois de démontrer qu’ils étaient capables de capter l’essence du Black Metal sans pour autant s’y laisser emprisonner. Bien qu’il devienne de plus en plus connu et reconnu, Wiedgedood a déjà laissé sous-entendre qu’il pourrait s’agir là de son dernier opus. Si tel est le cas, nul doute que la saga « De Dodden Hebben het Goed I, II et III » restera comme un projet riche, polysémique ainsi qu’une incroyable exploitation par la violence de la tristesse humaine. Autant en studio que sur les planches…

Plus qu’un concert, une expérience dont on ressort l’âme à vif.

Organisation : Wilde Westen

Informations supplémentaires

  • Band Name: Wiegedood
  • Date: 2018-05-25
  • Concert Place: De Kreun
  • Concert City: Courtrai
  • Rating: 0
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