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Et Tori Amos, dis, tu connais? Spécial

Écrit par - Didier Stiers -

Ils sont quatre, jeunes et ‘hypeeer’ sympa comme tout. Ils ont du talent à revendre et par conséquent, soulèvent l’enthousiasme des foules, de plus en plus nombreuses... Cette intro façon magazine pour jeunes (au fait, vous ai-je dit qu'ils étaient beaux?), est destinée à saluer la sortie imminente du second album de Soul Coughing…

En publiant « Irresistible Bliss », leur 2ème opus, les New-yorkais de Soul Coughing ont réussi un nouveau coup de maître. Musique urbaine oscillant sans cesse entre jazz, hip hop, rock et ambient, truffée de samples décalés, écriture accrocheuse, titres qui tiennent l'auditeur en haleine jusqu'à la dernière seconde, c'est, le moins que l'on puisse dire, de l'excellent matériel qui, joué live, assurera sur scène et dans la salle un maximum de surprises et de plaisir. Ce dont témoignent les propos tenus par Mark, compagnon-sampleur, et Sebastian, bassiste accro aux séries B.

Toujours plus de ouaf!

Ceux qui avaient craqué sur « Ruby Vroom » ne risquent-ils pas d'être un rien désarçonnés par le côté très rentre-dedans de « Super Bon Bon », le titre d’ouverture de votre second elpee ?

Sebastian : Je crois que cet aspect plus dur existait déjà sur certains titres de « Ruby Vroom ». Ecoute « Uh Zoom Zip » ou « Bus to Belzeebub », tu verras! C'est vrai que le premier album laissait peut-être parfois une impression de légèreté, mais ici l'attitude est restée très similaire. « Super Bon Bon » n'est que l'extension naturelle d'idées plus anciennes.

Vous avez encore utilisé des samples bizarres?

Mark : Euh, il y a toujours plus d'animaux! Plus sérieusement, nous avons encore mieux cerné l'approche des samples. Nous nous sommes lancés sur la voie du développement ultime du clavier. Hormis cette nouvelle orientation, tout comme pour le premier album, une très grande star de la musique est à nouveau samplée. En fin de compte, jouer à l’aide d’un sampleur, ce n’est pas juste pour faire bizarre ; c'est pour nous une façon d'ajouter autant que possible de la couleur et de l'intérêt.

Au fait, quel est le truc le plus bizarre que tu aies jamais samplé ?

M : Ecoute... Tout ce que je peux te dire, c'est que c’était tôt le matin, et que je l'ai capté directement dans le micro.

Yngwie qui ?

Il y a toujours beaucoup de percussions dans votre musique ; est-ce parce que le rythme y est prépondérant ?

S : Il ne nous semble pas plus important qu'auparavant même si nous avons soigné le rythme de ce disque. Pour nous il a autant d'importance que les mélodies et les harmonies. Nous sommes tous des musiciens rythmiques, et la batterie est aussi mélodique que les autres instruments.

Pourtant, votre musique est composée au piano ou à la guitare, dans une chambre d'hôtel...

M : Mais si, nous l'avons déjà fait!
S :
Concrètement, chacun a le droit d’apporter une idée. Parfois, elle intéresse tout le monde, parfois pas. Si c'est le cas, même si elle est minime, elle grandit au fil des répétitions et elle devient celle du groupe. Personne n'arrive jamais en déclarant : ‘Voilà, ça c'est notre nouvelle chanson, et c'est ainsi qu'elle devra sonner’. Ça ne marcherait pas.
M :
Ce processus est également très ‘low-tech’ ; nous n’avons pas besoin de tout notre matériel pour créer...

Vous recherchez la présence de musiciens invités ?

S : Sur cet album, nous avons reçu le concours d’un certain Walter E Sears. Il possède son studio à New York. C’est un pionnier de musique électronique. Il a notamment bossé en compagnie de Bob Moog sur les premiers synthétiseurs. C'est un type très agréable à côtoyer, toujours disponible et qui raconte de bonnes blagues. C'est le genre de guest dont nous avions vraiment besoin. Nous n'avons pas envie de solliciter de grands noms, un guitariste renommé ou quelqu’un du style.

New York, USA

Au début, vous apparteniez à la scène new-yorkaise...

S : Et puis on s'est fait virer (rires). Mais je t'interromps, pose ta question!

Non vas-y, continue...

S : Eh bien nous sommes tous issus de la Knitting Factory, parce que le dub était le point de rassemblement de tous les musiciens blancs issu de l'underground new-yorkais. Mais Soul Coughing n'est pas nécessairement une partie intégrante de cette scène. Principalement parce qu'on n'y rencontre pas beaucoup de groupes ; ce sont surtout des musiciens qui se réunissent pour travailler sur différents projets.

Vous vivez toujours à New York ?

M : Les autres oui, mais moi je viens juste de déménager à San Francisco. Il y a autant de buildings et de monde, mais c'est plus coloré. Il y a du soleil, de l'air... J’ai vécu à New York pendant 11 ans et après avoir été aussi longtemps sur les routes avec le groupe, j'ai fini par cesser d'apprécier la ville. Une fois de retour, j'avais tout bonnement envie d'être ailleurs.

Vous croyez que Soul Coughing aurait réalisé une autre musique si vous n'étiez pas originaires de New York ?

M : New York a influencé nos débuts. C'est une ville où l'information est tellement présente, où il y a tellement de sons, où tu vois tout le temps tellement de choses, que cet environnement te pousse à tout intégrer et à transformer le tout en quelque chose de plaisant sous peine de devenir complètement fou! Sans quoi, je crois que la ville est moins présente sur le second album.

Groove en boîte

Que se passe-t-il quand vous êtes sur scène ?

M : Ce qui domine, je pense, est une espèce de sentiment de danger. Le public a cette impression que la suite n’est pas prévue, ne sera pas évidente.
S :
Plus particulièrement de nos jours, quand les gens entendent de la groove music, ils assument le concept qu'elle a été fabriquée en studio, à l’aide de drum-machines, de séquenceurs, etc. Quand nous sommes partis en tournée, pour défendre notre album précédent, de nombreux sceptiques ont voulu que nous leur ‘prouvions’ notre musique.

Au fait, à quoi ressemble un fan de Soul Coughing?

S : Oh, en général, il mesure 1 m87... (rires). Au début c'était surtout un public à la recherche de musique alternative qui savait que nous venions de New York. Actuellement il s'élargit, mais touche toujours essentiellement un public blanc, ce qui n'est pas forcément positif
M :
C'est en Europe que notre public est le moins spécifique.

Tiens, y a-t-il un groupe européen dont vous vous sentiriez proches, artistiquement parlant?

S : Portishead, je crois.

Et toute la vague de Bristol?

M : Non, juste eux, pour la façon dont ils détournent la musique de danse vers quelque chose de tout à fait autre. La jungle exerce aussi une grosse influence sur notre création. Au-delà, je ne pense pas que nous nous identifions à un groupe particulier. Même si en Europe, on nous a souvent comparés à Can, et aux USA, à Morphine.

Silence on joue

Quel genre de musique écoutez-vous actuellement ?

S : Pas mal de trance, Thelonious Monk, beaucoup de dub, du reggae, de la jungle, Igor Stravinski, Public Assaut... Le silence aussi, qui est très, très important à mon sens.
M :
Pour le moment j'ai la chance d'avoir accès aux collections du Smithsonian Institute, et là, ça va de la vieille musique américaine aux danses aborigènes en passant par l'Asie. En fait, les seuls trucs que je ne peux pas écouter, c'est toute cette frange de nouveau rock américain, et la Britpop.

Tantôt, vous parliez d'underground ; vous avez l'impression de toujours ‘en être’?

M : Je ne me vois pas comme un artiste. Je me suis lancé dans la musique exactement comme on entrait dans une Guilde au XIVème siècle. Je me considère plutôt comme un bâtisseur, qui aime mettre des sons ensemble, et manier ses instruments. Bien sûr, quand j'étais jeune, il y avait des gens que j'admirais, mais uniquement à cause de leur musique. C'est pour cette raison, par exemple, que je suis toujours choqué d'être interviewé par des journalistes anglais. En général, ils n'en ont vraiment rien à foutre de la musique.

Et pourtant, vous devez être de plus en plus impliqués dans tout cet aspect bizness, maintenant que le groupe commence à être connu. Vous allez faire quoi alors?

S : Fumer beaucoup d'herbe, bien sûr (rires). Non... Ce métier peut être drôle si tu ne le prends pas trop au sérieux. C'est vrai que c'est sympa de poser pour des photos, répondre à des journalistes, c'est marrant de parler de soi mais jusqu'à un certain point seulement. En ce qui nous concerne, surtout après avoir été aussi longtemps sur les routes ensemble, nous avons pris le parti de jouer avec notre image, et la façon dont nous sommes perçus. Tout en restant honnêtes à l'égard de nous-mêmes. C'est vrai que c'est parfois râlant de voir son temps se consumer pour des choses qui n'ont pas d'importance, mais en même temps, se présenter face aux gens sous divers aspects est un jeu assez cool.
M :
C'est bien d'être apprécié, surtout par d'autres musiciens. Mais il ne faut pas perdre de vue, que le public ne te connaît qu'au travers de la scène ou d'une interview. Donc, d'une image.

Tori Amos…

Mark, Soul Coughing est paraît-il ton premier groupe... Tu as eu du mal à t’intégrer ?

M : Lors de notre première rencontre, je trouvais cette situation tellement importante tout en ne sachant pas à quoi m'attendre, que je n'ai même pas apporté mon clavier. Puis, pendant notre premier concert, j'étais décidé à ne jouer que si je savais ce qu’il fallait jouer à tel moment précis. Tu sais, pour une petite différence de ton, tu peux soudain reproduire du Bruce Springsteen! Bref, pendant près de la moitié du concert, je me suis contenté d’attendre. Je devais être très prudent! Il m'a bien fallu 6 mois avant de m'intégrer.
S :
Ce qui est positif chez lui, c'est qu'il ne se sent pas ‘obligé’. Et d'autre part il est un des premiers à vraiment utiliser son sampleur selon la philosophie qui a poussé à la conception de ce genre d'engin. Cet instrument ne produit pas de son en lui-même. Il dépend totalement de son utilisateur et de ce qu’il y met. Et Mark, contrairement à d'autres –surtout des DJ avec un clavier– est attentif aux sons, aux contextes. Quand il ‘repique’ quelqu'un de très connu, ce n'est pas dans l'optique de lui décerner une note.

Vous ne direz vraiment rien de celui ou celle que vous avez samplé cette fois?

M : Lorsque nous sortirons notre prochain album! Sur le premier, nous avions choisi Tori Amos. Mais ne l'écris pas, hein! Elle figure sur deux chansons. Pour moi, c'est à la fois très abstrait et évident ; mais personne ne le sait. Je jubile. Cette énigme appartient à notre jeu. Mais là, on doit être de plus en plus prudents, puisque nous sommes de plus en plus connus.

(Article paru dans le n° 43 du magazine Mofo de mai 1996)

 

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