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On n’est pas un groupe heavy, ni pop… ni black… Spécial

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Début janvier. Temps frais, mais sympa, sur Amsterdam la terrible. Ambiance cotonneuse dans un hôtel de luxe de la cité de l'herbe. Les Faith No More sont là, cool, relax. Ils viennent présenter leur nouvel album, "King For A Day... Fool For A Lifetime" à une partie de la presse européenne. Conférence de presse pour tout le monde, d'abord. Discussion ‘privée’ ensuite avec Bill Gould, l'énergique bassiste, en ce qui nous concerne. Très carré, Bill Gould! On l'imaginait bien de cette trempe. Il fixe droit dans les yeux, appuie ses paroles d'une gestuelle nette et volontaire, s'exprime de façon condensée, focalisant un maximum d'impact dans chaque mot.

T'as écouté l'album?

Bien sûr que j'ai écouté l'album! Je me suis même jeté sur la cassette. Et je n'ai pas été déçu. D'autant que FNM a remis une grosse dose de guitare dans le jeu de quilles et que je les préfère comme ça. Varié, diversifié, amusant, perturbant, captivant, le nouveau Faith No More (NDR : comme les autres, d'ailleurs) et solide en plus. C'est une bombe, ce disque, c'est clair. Tiens, à propos de guitare, en quoi les problèmes de guitariste rencontrés par le groupe ont-ils influé sur l'identité de l'album?

Jim (Martin, le grand clown chevelu à lunettes, arrivé en 83 et débarqué onze années plus tard) a été crédité deux fois, pour avoir composé autant de chansons, en cinq albums ‘NDR : une réponse assénée un peu sèchement, par Bill). Pourquoi voudrais-tu que son départ soit tellement problématique à ce niveau? Nous, le groupe, avions envie d’en revenir à davantage à la guitare pour notre nouvel cd. C’était instinctif. Un point c'est tout. Peut-être, aussi, avions-nous encore ce son ‘live’ dans la tête, depuis notre longue tournée consécutive à la sortie d’"Angel Dust" ? Peut-être aussi, est-ce une réaction contre cet "Angel Dust", qui avait fait la part belle aux claviers ? Non, je crois qu'on voulait surtout retrouver le son de la scène. Quand on écoute "King For A Day", on retrouve vraiment celui du groupe en ‘live’. On avait envie, besoin de cette sonorité. C'est ce qui nous convient le mieux.

Guitaristes successifs

Jim Martin a été un certain temps remplacé par Trey Spruance, complice de Mike Patton au sein de Mister Bungle, avant que celui-ci ne disparaisse à son tour de la circulation et soit remplacé par un autre gratteur, Dean Menta. C'est quoi, cette histoire?

De la merde! Jim est un drôle de type avec qui il était devenu impossible de travailler. No way, plus moyen. On n'était plus sur la même longueur d'ondes. Jim était en marge. C'est moi, le bassiste du groupe, qui est responsable d'une grande partie des guitares sur "Angel Dust", parce que Jim n'en avait rien à cirer! Il fallait qu'il parte. C’était évident, même si on savait qu'on prenait un risque. Pas mal de gens appréciaient la présence de Jim parce qu'il incarnait une certaine identité heavy metal au sein du groupe. Il était le seul à avoir ce look, tu vois? On savait aussi que ce ne serait pas très simple de le remplacer. Dans le groupe, on s'est presque construit un langage à nous. On aurait dû apprendre à un autre type de parler notre langue ; pas simple! On a engagé Trey parce qu’on le connaissait déjà. Mike n'était pas très chaud pour qu'on le recrute ; mais on a fini par l'embaucher. Trey s’est montré tout de suite très gentil et son comportement nous a paru suspect... On sentait bien qu'il n'était pas très clair. Enfin, il bossait bien, c'était pas mal. On a enregistré l'album et on était satisfaits de son travail. Et puis un jour, il est arrivé et nous a dit qu'il n'avait plus envie de continuer. On n'a toujours pas compris ce qui s'est réellement passé. Mike avait raison de s'en méfier, en tout cas... On l'a remplacé par Dean Menta. On connaît Dean depuis un certain temps aussi. Il nous avait accompagnés lors de la tournée "Angel Dust" ; et il avait vachement envie de faire partie du groupe. On lui a demandé s'il voulait franchir le pas. Il nous a dit: ‘Je peux jouer tous les titres sans problème’. Dean est notre guitariste maintenant. Bien, on se méfie un peu, désormais (NDR : Bill affiche un sourire en coin un peu crispé), mais tout se passe bien. Dean a de bonnes idées, un comportement clair. Il se comporte naturellement et ça semble coller au groupe.

Trey a-t-il été impliqué dans l'écriture de l'album?

Peu, parce que 90% du travail avait été effectué avant qu'il ne débarque. Ce n'est pas un problème pour nous. On avait l'habitude de travailler sans l'aide d'un guitariste, ou presque.

Tu as dit tout à l'heure que vous aviez votre propre langage. Cela sous-entend clairement l'existence de certains automatismes entre vous, alors qu'une des principales particularités de Faith No More est de se remettre sans cesse en question. Comment gérez-vous ces paramètres ?

Nous avons besoin de motivation et nous sommes des gens très créatifs, il nous suffit de combiner les deux. Nous n'avons aucune envie de faire sans cesse la même chose et nous n'éprouvons pas beaucoup de mal à trouver des idées et à les exprimer.

Briser la ligne droite

Vous aimez prendre des risques. Pour le jeu, par insouciance ou par souci stratégique?

Parce que c'est notre manière d’avancer. On sait bien qu'on se complique la vie, mais on n'a pas envie de travailler autrement. On veut découvrir des choses, à commencer par des trucs sur nous-mêmes. Je connais bien mes limites, je sais qui je suis et le fait de tenter de dépasser ces limites est très grisant. On n'était pas obligé de tout changer après "The Real Thing", mais on l'a fait et "Angel Dust" a super-bien marché. Même si on s'est vachement posé des questions parce que cet album était vraiment très différent! A nouveau, on a brisé la ligne droite sur "King For A Day" ; mais les lignes droites, c'est pas notre truc, c'est pour le business...

Il vous laisse tranquilles, le business?

Non, on lui botte plutôt les fesses! Les radios heavy ne veulent pas trop passer nos trucs s’ils ne sonnent pas heavy. On doit forcer le passage, tu vois? Idem pour les radios pop. On n'est pas un groupe heavy, ni un groupe pop, ni un groupe black. On est partout à la fois et le business n'aime pas ça. Il faut bosser comme des fous pour arriver à faire ce qu'on fait. Mais quand ça marche, c'est drôlement gratifiant.

Votre relation avec le public?

On a une relation avec le public, ce que beaucoup d'autres groupes n'ont pas! Le principe de base, généralement, c'est ‘nous sommes le groupe, vous êtes le public, on vous donne ce que vous voulez et vous alimentez notre tiroir-caisse’. Ce n'est pas notre crédo. J'ai l'impression que nous communiquons avec notre public, justement parce qu’il n’y a pas de règles entre nous. Les gens ne savent jamais à quoi s’attendre, ça les pousse à être plus ouverts, à faire preuve de sens critique aussi. La communication fonctionne donc dans les deux sens, il y a une réaction intelligente. Ce n’est pas facile à construire comme processus ; mais quand ça donne de bons résultats, le bénéfice qu'on en retire est plus grand, pour tout le monde.

Tu te reconnais, personnellement, dans tout ce qu'a réalisé Faith No More jusqu'ici?

Excepté l'un ou l'autre petit détail, oui. Et je reconnais que c'est une grande chance. On discute de tout entre nous et c'est notre force. C’est ça le langage Faith No More dont je parlais. Je suis parfois surpris. J'ai écrit "Take This Bottle" il y a un an et je jouais de temps à autres cette chanson chez moi; pour moi uniquement, parce que je pensais qu'elle ne convenait pas au groupe. Un jour, je l'ai fait entendre aux autres qui m'ont dit ‘C’est super, elle doit être sur l'album’. FNM, c'est vraiment ça.     

Vous n'avez pas de problèmes d'ego?

Nous sommes des fortes personnalités, nous avons tous un caractère, des ambitions, des aspirations personnelles mais nous nous respectons et nous utilisons nos capacités et nos énergies à défendre un but commun. Nous ne sommes pas toujours d'accord entre nous –et je trouve cela plus que normal– mais nous nous respectons et nous dialoguons. A partir de là, tout est ouvert.

J'ai demandé tout à l'heure à Mike de parler de ses textes et il m'a dit ‘Je ne suis pas la meilleure personne pour en parler puisque je les ai écrits’... On connaît ce type de comportement de sa part, mais cela reste toujours un peu étonnant, non?

Mike est un type instinctif qui livre quelque chose et puis s'en va. Il ne passe pas son temps à analyser ce qu'il fait et il n'en a d'ailleurs absolument pas envie. Il considère que le plus important réside dans ce qu'il fait et non pas dans le discours sur ce qu'il fait. Je peux comprendre son raisonnement. Je suis un peu comme ça, moi aussi. Nous comprenons ses textes, nous les interprétons.

La merde en blanc

Comment interprètes-tu, dès lors, un titre comme "Cuckoo For Caca"?

Amusant, pas vrai? Plusieurs des textes de Mike sur l'album concernent Trey. A notre relation avec lui. A son comportement (NDR : relisez le début de cette interview et écoutez, par la suite, "The Gentle Art Of Making Enemies", par exemple). Pour te donner la signification de "Cuckoo For Caca", rien de tel que d’avoir recours à une image : si tu peins de la merde en blanc, la merde deviendra donc blanche en surface, mais cela restera de la merde à l'intérieur.

Il y a des cuivres sur l'album, notamment dans "Star AD". Ce sont des vrais ou bien vous vous êtes amusés à échantillonner des sons?

Non, ce sont des vrais. J'aime bien sampler, je le fais facilement ; je peux donc t'en parler en connaissance de cause et je peux te dire qu'un sampling ne remplacera jamais tout à fait des sons originaux. Nous avions envie de cuivres qui claquent, de cuivres forts, intenses. Il n'y avait donc guère de meilleure solution que d'en mettre de véritables sur l'album.

Y a-t-il, pour toi, un lien entre les différentes chansons de "King For A Day"?

Assurément. Chacune de nos chansons est une image et un album forme un tout cohérent. Nos chansons sont plus que des mélodies. Il y a un gros impact visuel chez nous. J'aimerais d'ailleurs que nous travaillions un jour sur une musique de film. Nous sommes des gens parfaits pour ça. Je trouve aussi que nous devrions encore améliorer l'impact visuel de FNM. Je pense qu'il nous manque quelqu'un qui puisse bien nous comprendre et sortir de bonnes images, de bonnes photos, de bonnes peintures pour nos T-shirts ou nos couvertures de Cd. Celle de "Angel Dust" était très bien. Notre démarche nous pousse à dépasser le stade de l'écriture musicale simple. Nous voulons nous accorder plus d'espace, donner plus de sens au groupe...

C'est donc un processus que vous pouvez contrôler, forcer si besoin en est?

Oui, c'est clair. Il est nécessaire de se faire violence quelquefois. Tu ne te réveilles pas tous les jours avec 25 nouvelles idées en tête! Ces jours-là, il faut faire fonctionner la mécanique en donnant des décharges. C'est normal.

Vous portez une part de responsabilité dans l'avènement de la scène rock dite alternative...

Je n'aime pas les clichés. Mais je dois bien reconnaître qu'il en existe au sein de la scène alternative aussi. Là, encore une fois, c'est le business qui joue et à ce niveau-là, nous ne contrôlons pas tous les paramètres. En tant que musicien, tout ce que tu contrôles à 100%, c'est ta propre créativité et ce qu'elle te permet de faire. Le reste, c'est aléatoire. Mais c'est ainsi. Le public aussi, quelquefois, se fait peut-être une opinion de nous qui ne correspond pas exactement à notre point de vue. Pas trop grave, l'important c’est qu'il ressente déjà cette envie de comprendre.

Article paru dans le n°35 d’avril 95 du magazine Mofo

 

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