Seule journée affichant complet, ce samedi était clairement celle qu’il ne fallait manquer à aucun prix, si vous ne disposiez pas de combiticket. C’est aussi celle qui, pour de nombreux festivaliers, voire artistes, rappelait un douloureux souvenir. Et pour cause, le 18 août 2011, soit exactement un an plus tôt une tornade s’abattait sur le site du Pukkelpop, faisant de nombreux blessés, mais surtout cinq victimes.
Aujourd’hui, tout comme la vieille, le soleil tape très fort. Il atteindra même les 35 degrés centigrades. La déshydratation guette ! Une bonne excuse pour se désaltérer auprès des nombreux bars installés aux quatre coins de la plaine.
La journée débute par le groupe californien Ceremony. Rien de tel que du noise-punk pour réveiller les esprits encore à moitié endormis des festivaliers. Certains ne semblent d’ailleurs pas gênés par l’heure précoce (il est 11h30-12h) et affichent une forme étincelante, en pogotant devant le Shelter.
Le concert à peine terminé, on est déjà face à un choix cornélien. Soit on opte pour le set de la formation belge Oscar and the Wolf ou le quintet londonien Dry the River. Finalement on décide d’assister à celui du trio gantois. Faut dire qu’il est actuellement un des groupes noir/jaune/rouge les plus intéressants du moment. D’ailleurs, il enchaîne les dates depuis plusieurs mois. Il dispose d’une demi-heure pour défendre son Ep, « Summer Skin ». Et il s’en sort parfaitement. Les formations nationales vont même plutôt s’en tirer plus qu’honorablement toute la journée…
A l’instar de Kiss the Anus of the Black Cat, mais également Flying Horseman, malgré une musique pas toujours facile d’accès. K.T.A.O.T.B.C. est drivé par le troubadour barbu Stef Heeren. Le groupe pratique une sorte d’acid folk qui baigne au sein d’une atmosphère moyenâgeuse. Intitulé « Weltuntergangsstimmung », son dernier elpee, est paru en 2012. Leur set est ténébreux, shamanique, dans l’esprit de 16 Horsepower….
Flying Horseman se produit dans le Wablief. A sa tête, le guitariste Bert Dockx. Ici le climat est aussi sombre, mais il est le fruit d’un mélange de post rock et de blues. « Twist », leur dernier opus est également paru cette année. Le groupe anversois reconnaît pour influences majeures Joy Division, Bill Callahan, Talk Talk et le Velvet Underground. Balisées par les cordes de guitares, les compos sont construites suivant un mode crescendo. Elles débutent dans la quiétude, puis s’élèvent progressivement, poussées par le tempo tribal, avant d’atteindre un climat de tempête, caractérisé par des explosions de fuzz, de distorsion et de drums…
A partir de 16h, place aux grosses pointures. Tout d’abord, Stephen Malkmus and the Jicks. Sous le Marquee. Flanqué de son nouveau backing group, Malkmus déçoit. Son aventure vécue chez Silver Jews n’était déjà pas exceptionnelle. Depuis qu’il a délaissé Pavement, il faut avouer qu’il est sur la pente descendante. Manifestement, son passé le poursuit. Même ses derniers albums ne parviennent pas à sauver la mise…
Quant aux Shins de James Mercer, alternant morceaux majestueux (« Saint Simon », « So Says I », « Kissing the Lipless ») et titres sans grande consistance, leur set est trop inégal pour convaincre…
Vers 18 heures, tant les festivaliers que les artistes vont observer une minute de silence, en hommage aux victimes du drame de l’an dernier.
Ce sont ensuite les Hives qui vont enflammer la Main Stage en faisant la part belle aux guitares. Dix ans que la formation suédoise nous sert la même recette. Mais elle est préparée avec tant de passion qu’on ne peut y résister. Les musicos sont vêtus de leurs rituels costards noir et blanc. Pelle Amsqvist saute, hurle, fait virevolter son micro. Le soleil tape dur, mais la formation venue du froid n’en a cure. D’ailleurs tous les musicos termineront le concert complètement trempés.
On jette un œil et une oreille à la prestation de The Antlers au Club. Après le spectacle que nous venons de vivre, difficile d’accrocher à leur noisy/pop qui baigne au sein d’une atmosphère chargée de spleen. Pourtant, le combo nous réserve l’un ou l’autre morceau bien senti. A l’instar d’« I Don’t Want Love », au cours duquel un frisson nous parcourt l’échine…
Place aux Black Keys. Depuis leur dernière tournée, le duo est soutenu par deux musicos supplémentaires. Ce qui nuit quelque peu au feeling sauvage de leur musique. Néanmoins, les compos dispensées sont impeccables. Le public massé devant la Main Stage est ravi et en redemande. La setlist privilégie les compos les plus récentes, et notamment celles du dernier opus, « El Camino ». Les puristes reprocheront sans doute un manque de spontanéité dans le chef de Dan Auerbach et Patrick Carney, mais manifestement The Black Keys est devenu un ‘grand groupe’…
Jeff Tweedy et sa bande se produisent sous le Marquee. Juste avant que les Foo Fighters ne montent sur la scène principale. Afin de disposer d’une place idéale, la majorité du public décide de se planter devant la Main Stage. Conclusion, lorsque Wilco monte sur l’estrade, le chapiteau est presque vide. Tant pis et tant mieux, puisque cette situation va nous permettre de savourer une excellente prestation, démontrant en outre, que la notoriété grandissante du band chicagolais n’est pas usurpée
Vu les circonstances, Foo Fighters n’avait donc pu accorder son set l’an dernier. Dave Grohl et son team avaient promis de revenir, cette année. Promesse tenue. Et pour un ‘gig’ particulièrement réussi. La puissance est de rigueur. La setlist épingle des titres devenus maintenant cultes, tels « My Hero », « Pretender » ou encore « Dear Rosemary », un superbe ‘best of’, au cours duquel l’ex-Hüsker Dü, Bob Mould (NDR : il avait joué plus tôt dans l’après-midi) vient les rejoindre sur l’estrade. Dave n’en oublie pas pour autant de dédier une chanson aux victimes.
Ce Pukkelpop s’achève pour nous au Shelter, afin de célébrer un autre grand retour, celui de Refused. Il ne date pourtant que depuis janvier 2012. Et autant en profiter, car le groupe a annoncé que leur reformation ne serait que temporaire. Le punk-hardcore de ce combo suédois est puissant, frénétique, sauvage et rapide. David Sandström frappe ses drums comme s’il avait un ennemi à tuer. Kristofer Steen et Jon Brännström arrachent littéralement les sonorités de leurs de leurs grattes. Et Magnus Flagge arrose le tout de ses interventions sulfureuses à la basse. L’attitude du leader, Dennis Lyxzén, évoque parfois un certain Scott Weiland (Stone Temple Pilots). Ses lyrics véhiculent d’inévitables pamphlets révolutionnaires quand ils ne traduisent par leur combat en faveur des droits des animaux. Il exhorte la foule au changement, en s’adressant tout particulièrement, à la nouvelle génération…
C’est sur ces notes brutales que cette 27ème édition du festival s’achève. Un excellent cru ! Que ce soit chez les découvertes ou les artistes consacrés, tous ont participé à la réussite de cette édition 2012. Il a fait beau, il a fait chaud, l’affiche était superbe et l’ambiance au rendez-vous. Bref, tout était parfait. Le Pukkelpop est relancé pour de nombreuses années…