Une année après le drame qui a frappé la plaine de Kiewit, le Pukkelpop s’est a nouveau déroulé normalement. Il aurait pu disparaître ; ce qui aurait été un grand vide pour le monde de la musique indépendante. Il a fallu du temps aux organisateurs pour se remettre de ce coup du sort. Aussi, pour prendre le maximum de protection possible, tous les arbres sur le site ont été abattus. Dommage, mais la sécurité était à ce prix. Pour l’édition 2012, sont donc prévues huit scènes où se produiront 200 groupes ou artistes, au sein d’une affiche on ne peut plus éclectique. De quoi remettre le festival campinois sur les rails. Et les mélomanes ont à nouveau répondu en masse, puisqu’il a attiré une moyenne de 60 000 spectateurs, par jour.
Par esprit de contradiction, la météo à banni la pluie et le vent. Pas même un seul nuage. Mais un soleil de plomb, responsable d’une chaleur accablante. Qui va régner durant les 3 jours. Mais place d’abord au premier jour du festival…
Au Club se produit le trio étasunien Bowerbirds. Trempé dans le folk, leur dernier elpee a bien été reçu par la critique. Malheureusement la prestation n’est pas à la hauteur de nos attentes. Le son est un peu trop diffus ; et plusieurs morceaux sont nécessaires avant que les balances soient réglées correctement. Ce qui n’empêchera pas le combo d’aligner tous ses tubes. Episodiquement, on retrouve toute la magie de leur songwriting ; à l’instar de « Tuck the darkness in » ou encore « Stitch the Hem ». Bref, à l’issue de ce set, mon avis était mitigé. Probable que programmé dans le cadre intimiste du Castello, il aurait pu décoller. Faut dire que ce style musical est davantage adapté à ce type de configuration…
Sur la Main Stage, Snoop Dog vient de monter sur le podium. Il s’est converti en rasta et rebaptisé Snoop Lion. Au moins, le Californien a le mérite de nous faire rire. Il a conservé les artifices qui l’ont rendu célèbre ; et notamment son micro plaqué en or ainsi que les femmes-objets qui dansent autour de lui. Il nous réserve quelques morceaux choisis produits autrefois en compagnie de Dr Dre. Ce sont les seuls titres qui passent encore vraiment la rampe. Sans quoi, il faut bien avouer que Snoop Lion devient rapidement grotesque.
Cap sur le Castello pour y assister aux sets des Anglais de Alt-J et des Etasuniens de Chromatics. Malheureusement, impossible de pénétrer sous le chapiteau. Il est bourré comme un œuf. Il est vrai que la popularité du band de Leeds est montée en flèche, au cours des dernières semaines.
On se rabat donc vers le Marquee. Il y a aussi du peuple, mais on parvient quand même à se faufiler pour assister au concert des Islandais d’Of Monster and Men. Perso, leur folk pop est certainement allègre, mais il me semble un peu trop inspiré par Arcade Fire et Edward Sharpe. De leur répertoire, je retiendrai surtout leur hit, « Little Talks », repris en chœur par les spectateurs…
C’est au Shelter que nous allons enfin avoir notre première bonne surprise : The Bots. Un duo californien (NDR : issu de L.A., très exactement) réunissant les frères Mikaiah Lei et Anaiah Lei, respectivement âgés de 15 et 18 ans. Leur punk rock aux accents blues est à la fois rafraîchissant et énergique. Et évoque même parfois un autre tandem, qui se produira également dans le cadre du festival, dans deux jours, The Black Keys. Un bottleneck glissé à l’index, Mikaiah parcourt agilement son manche. Il fait aussi les cent pas sur l’estrade. La coupe afro, Anaiah Lei se déchaîne derrière ses fûts. Bref, que du bonheur ! Un groupe à suivre de très, très près.
Un détour par la Main Stage pour jeter un œil au show de Santigold s’impose. Elle est tout de vert vêtue. Et malgré un dernier elpee décevant, la Philadelphienne se débrouille plutôt bien. Elle nous réserve même un cocktail très fruité de hip pop, funk, soul et électro. Soutenue par des danseuses, elle semble s’amuser et se déhanche en interprétant une majorité de tubes issus de son premier opus, « Santogold », un disque publié en 2008.
C’est à 18h30 que Django Django débarque. Au Club. Pas question, donc, de les louper. Vêtus de t-shirts mauves tachetés, les Ecossais s’en donnent à cœur joie. Depuis leur passage au Botanique, ils maîtrisent manifestement beaucoup mieux leur sujet. « Default », « Firewater », les titres s’enchaînent. Ces compos nous rappellent que leur premier album éponyme est certainement l’un des meilleurs de l’année. Convulsifs et exotiques, les rythmes alimentent un rock particulièrement dansant. Bref, en ce début de soirée, Django Django a mis littéralement le feu au Club…
Au Marquee, ce sont les Londoniens de Hot Chip qui sont au programme. Et eux aussi sont en grande forme. Il ne faut guère longtemps pour voir le public entrer en transe. Le plancher tremble sous les pas des festivaliers. Et la voix de farfadet, d’Alexis Taylor fait le reste. Un grand moment du festival.
Björk est donc la tête d’affiche de ce jeudi 16 août. Bien que se produisant sur la Main Stage, elle ne se gêne pas pour dispenser un set expérimental. Et quand un concert est aussi peu abordable, une partie du public déserte progressivement les lieux. Dommage, mais c’est ainsi. M’enfin, les nombreux espaces libres sur la plaine nous permettent aussi de respirer. Ce qui n’est pas plus mal. Son look est toujours unique en son genre. Elle est déguisée en poulpe noir et coiffée d’une perruque bleue fluo. Et elle nous plonge dans un univers semi-aquatique, semi-surréaliste, tout en prônant le retour à la nature. Ne reste plus qu’à y pénétrer. Pas vraiment évident, lorsqu’on a passé toute la journée à déambuler d’une scène à l’autre. Elle interprète notamment « Hunter », « Natura » et « Joga » ; mais hormis « Hunteren », casé en début de concert, et « Possibly Maybe », lors du rappel, les titres de son répertoire ne sont pas forcément les plus pop. L’album « Biophilia » forge même la majorité de la setlist. Björk est soutenue par un drummer, un préposé au laptop et une chorale féminine. La voix de l’Islandaise est toujours aussi particulière, même si elle monte moins dans les aigus. Un concert particulièrement audacieux qui a certainement dû plaire aux inconditionnels. Pour les autres, ou ça passait ou ça cassait…
Pour terminer cette première journée en beauté cap sur le Shelter pour assister à la prestation du rockeur sudiste Mike Ness, flanqué de son band, Social Distorsion. L’âge ne semble pas avoir de prise sur le leader. Il a enfilé un marcel et porte toujours des bretelles. Ses bras sont couverts de tatouages. La guitare lui tombe presqu’aux genoux. Les autres musicos sont plus jeunes. Mike est d’ailleurs le seul rescapé du line up originel. Et on est parti pour un set punk/rock bien huilé, quoique sans grand éclat. Bref un moment sympa, mais pas inoubliable.
Mark Lanegan semble aussi avoir retrouvé une nouvelle jeunesse. Toujours aussi charismatique, l’ex-Screaming Trees/Queens of The Stone Age/Soulsavers est épaulé, pour la circonstance, par un backing group belge. Au menu, du rock’n blues ténébreux, sur lequel Lanegan vient poser son baryton. Puisant essentiellement son répertoire dans son dernier album, « Blues funeral », le set est tout bonnement époustouflant. Points d’orgue, « The Gravedigger’s Song », une compo qui va nous conduire au bord de l’envoûtement. Et puis “Methamphetamine blues”, au cours duquel Greg Dulli vient rejoindre Lanegan sur les planches, pour échanger un superbe duo vocal. Des moments inoubliables et un concert qui clôture la journée en beauté…
Les plus résistants et les nightclubbers auront cependant encore le loisir de se défouler au Boiler, sous la houlette des Djs, tandis que les autres retourneront au camping afin d’essayer de récupérer, avant d’attaquer la deuxième journée…