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Les ruptures de Suuns...

Le 6ème elpee de SUUNS, "The Breaks", paraîtra ce 6 septembre 2024. Le trio canadien réunissant Ben Shemie, Joseph Yarmush et Liam O'Neill s'appuie plus que jamais sur ses instincts pop. Pourtant, pour la circonstance, la formation d’avant rock a exploité une…

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Pierre Vangilbergen

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dimanche, 26 mars 2017 13:28

Zero Hour, le retour de Diablo Blvd !

Diablo Blvd, l'une des figures de proue du Metal en Belgique, sortira, le 22 septembre prochain, leur nouvel album intitulé "Zero Hour".
 
Il s'agit du cinquième album studio des Anversois, "un monstre de onze morceaux sombres et groovy, composé de mélodies envoutantes, d'incroyables riffs à la guitare, une basse forte et une batterie martelante. En plongeant son inspiration dans des classiques du Metal tels que Type O Negative, Metallica et Black Sabbath, ainsi que dans la vague new-wave de groupes comme Killing Joke, Sisters of Mercy et Gang of Four, Diablo Blvd nous sort un son unique, parfaitement adpté à ces périodes sombres que nous vivons actuellement. La parfaite B.O. pour la fin des temps!"
 
Les artistes présenteront ce nouvel LP le lendemain de sa sortie (soit le 23/09) au Trix, à Anvers. Un évènement à ne pas manquer! 
 
 
Track-list :
 
1. Animal
2. Sing From The Gallows
3. Life Amounts To Nothing
4. God in the machine
5. You Are All You Love
6. The Song is Over
7. 00:00
8. Like Rats
9. Demonize
10. The Future Will Do What It's Told 
11. Summer Has Gone
 
 
 
lundi, 20 mars 2017 02:00

Un rêve éveillé

Nul doute que bon nombre de metalheads avaient entouré de rouge ce 20 mars dans leurs agendas. Et pour cause, propulsé par le succès unanimement et internationalement reconnu de son dernier opus, « Magma », paru l’an dernier, Gojira se produisait dans la capitale belge. L’Ancienne Belgique affichait sold out depuis quelques semaines ; autant dire que les artistes issus du Sud-Ouest de la France étaient attendus de pied ferme. Immersion. 

En arrivant un quart d’heure après l’ouverture des portes, un constat s’impose : la majorité des spectateurs qui ne sont pas occupés à griller une cigarette face à l’AB ou à se désaltérer au bar, sont déjà réunis dans la fosse afin de tendre une oreille curieuse à Car Bomb, qui ouvrira le bal. Un bref coup d’œil au merchandising permet de croiser les classiques t-shirts et autres goodies à l’effigie de Gojira. Délestés d’un modeste billet vert de cent euros, vous enlèverez un de ces drumheads customisés pour l’occasion par le batteur, Mario Duplantier. Mais tel le chant des sirènes, le vrombissement de la batterie vous aspire rapidement à l’intérieur.

Les musiciens de Car Bomb sont alignés à l’avant du podium. L’arrière est déjà envahi par le matos des deux autres combos qui leur succèderont. Les trois bands programmés sont passés au Metal 2.0, préférant la projection de leur logo à la place du mythique backflag imprimé sur tissu. Ainsi, les lettres géométriques et blanches de Car Bomb tapissent le fond de la scène. Cheveux crépus et ramassés sur le haut du crâne, Elliot Hoffman martèle ses fûts tel que l’exige le mathcore : dissonant, précis, chirurgical et mécanique. L’incarnation de la géométrie par l’image et par le son. Six projecteurs, disposés de part et d’autres de l’estrade et installés sur des structures métalliques, balaient leurs rayons blancs en direction de la fosse. Et ils sont aveuglants. Michael Dafferner, tapi dans l’obscurité et casquette vissée sur le crâne, s’époumone inlassablement, inondant l’espace de sa voix gutturale et puissante. Pour une première partie, la formation new-yorkaise bénéficie d’un set confortable de huit morceaux ; de quoi laisser l’auditoire découvrir son style totalement déstructuré et, sur la longueur, un tantinet répétitif. Les aficionados qui ont fait le déplacement semblent néanmoins apprécier.

Autre genre, autre groupe. Originaire de Pennsylvanie, Code Orange grimpe sur les planches. Imaginez donc l’ambiance futuriste : le robot a pris le pas sur l’homme, la race humaine est proche de l’extinction, H-2 avant l’apocalypse. Code orange avant que tout ne soit soufflé. L’air est aussi lourd et oppressant que les lignes de guitares, tel un étau de champs magnétiques qui, petit à petit, se referme et broie tout sur son passage. Un style musical indéfinissable, une forme hybride robotico-nihiliste de Hardcore-Punk. Si les compositions sont atypiques, les rôles respectifs de chaque musicien le sont tout autant. Derrière son kit de batterie, Jami Morgan frappe comme une brute tout en assurant la majeure partie du chant, typé Hardcore. A sa gauche, Eric Balderose assume une des deux grattes, tout en assénant des salves gutturales au micro et en enrichissant les compositions de nappes indus’ anxiogènes. Et que dire de Joe Goldman, espèce de colosse sous excitant qui n’a de cesse de martyriser sa basse tout en frappant les airs, piqué par une hargne survitaminée. Le tout, sous l’œil glacial de la gueule d’une panthère stylisée et métallique, projetée en arrière-plan. ‘On vous remercie d’être venus plus tôt, afin d’écouter notre groupe que vous ne connaissez sûrement pas…’, lâche Jami, en s’adressant à la foule. On ne peut pas lui donner tort, mais une chose est sûre : cette formation, absolument singulière, mérite d’être appréciée.

Le caractère sold out de la soirée révèle à présent son plein potentiel : de la fosse aux balcons, l’Ancienne Belgique est pleine comme un œuf. Un public majoritairement trentenaire et plus, typé Metal ou non, en couple, avec des amis ou de la famille ; bref, c’est un parterre particulièrement hétérogène qui accueille, ce soir, le combo français. Et pour cause : en vingt-et-un an d’existence, Gojira n’a cessé de faire exploser les frontières des genres, d’explorer de nouvelles sonorités, de mêler la composition musicale à la recherche spirituelle. La scène est sobre : seule la batterie de Mario Duplantier est surélevée et surplombe la salle, telle un trône. Il est le premier à opérer son entrée, entraînant un flot d’acclamations. Christian Andreu et Jean-Michel Labadie le suivent, respectivement guitare et basse à la main. Le frontman et chanteur, Joe Duplantier, binôme fraternel, déboule le dernier sur l’estrade. La machine infernale se met en marche. Les fûts résonnent et « Only Pain », issu du dernier LP, « Magma », ouvre le set. Des spots ascendants verts et bleus confèrent au décor une ambiance obscure et énigmatique, renforcée à coups de projections en arrière-plan, typiquement ‘gojiriennnes’, où des traits de personnages deviennent tortueux, des silhouettes apparaissent et disparaissent. Les forces de la nature –que ce soit des figurations de la pluie, de la neige, des éclairs ou encore des éruptions terrestres– contribuent à créer cette atmosphère d’entre-deux, réalité fantasmée, une séance de chamanisme qui conduit à l’envoûtement. Un rêve éveillé.

La part belle sera évidemment faite au dernier opus, dont le lourd et épique « Stranded », le planant « The Cell » ou encore l’arabisant « Silvera ». Eruption de vivats dans l’auditoire quand, après avoir été plongée dans le noir, surgissent des entrailles de l’AB des murmures de baleines, suivies par la projection de l’animal en mouvement, nageant dans des eaux troubles et sombres. Les guitares sont fascinantes à souhait, laissant échapper des nappes mélodiques sur lesquelles le public se laisse docilement bercer, naviguant à vue au rythme des blasts et de la voix des magiciens Duplantier. ‘Après vingt ans, on peut dire que ça commence à bien rouler pour nous…’, reconnaît Joe. ‘Je me souviens la première fois qu’on est venu en Belgique, c’était en 2004, au Magasin 4. Un repère à punk un peu dégueulasse, on avait adoré. On était excité d’enfin quitter la France pour jouer dans les pays voisins, c’était notre première tournée internationale…’, ponctue-t-il avec retenue et un brin de fierté (NDR : en effet, à partir de la mi-mai et ce jusqu’à la mi-août, Gojira sillonnera les routes nord américaines en compagnie de Metallica, Volbeat et Avenged Sevenfold. Ils auraient pu rêver pire).

C’est sur l’inquiétant « Pray », très susceptible de rappeler un voyage initiatique au cœur de la terre, sur fond de volcan vomissant ses entrailles en effervescence, que la formation prend congé de son auditoire. De la fosse aux balcons, toutes et tous hurlent le nom du band. Telle une incantation frénétique, une sortie trop abrupte d’une séance d’hypnose. Le frontman reprend possession des lieux et entraîne son public dans un solo ensorcelant, chaud et taciturne. Une introduction parfaite à « Oroborus », issu du quatrième album studio « The Way of All Flesh ». ‘Je vous préviens la Belgique, ici c’est vraiment le dernier morceau’, décrète-t-il, en sueur. Il n’en fallait pas moins pour que les esprits s’embrasent de plus belle, les mouvements de foule propageant leurs ondes au sein d’une bonne partie de la salle. C’est par « Vacuity » que Gojira finira par prendre son dernier envol, sous une belle ovation. Les artistes saluent leur public, ce dernier continue à scander le nom du groupe, l’esprit envoûté. Une évasion spirituelle de près de deux heures, qui ne peut que laisser des traces dans les tréfonds de l’âme. De quoi déclencher une véritable addiction…

Setlist : “Only Pain”, “The Heaviest Matter of the Universe”, “Silvera”, “Stranded”, “Flying Whales”, “The Cell”, “Backbone (Remembrance outro)”, “Terra Inc.”, “L'Enfant Sauvage”, “The Shooting Star”, “Toxic Garbage Island”, “Pray”.

Encore : “Oroborus”, “Vacuity”

(Organisation : AB et Live Nation)

Voir aussi notre section photos ici

Actif depuis maintenant sept ans, Silence is the Enemy est parvenu progressivement à se forger une place au sein du paysage belge des musiques dites extrêmes. Mais également à imposer son Fusion Groove Metalcore en mélangeant autant les parcours de ses musiciens que les influences sonores. Après avoir gravi la seconde marche du podium du Loud Program, le quintet bruxellois continue son ascension, poursuivant la marche en soutenant toujours le même dessein : se faire entendre.

« Silence is The Enemy », c’est le titre d’une composition de Papa Roach, mais aussi de Green Day. Vous l’avez choisie comme patronyme. Pourquoi ?

En fait, il date de la naissance du groupe, lors du premier line up, soit vers 2010. A l’époque, l’idée était assez directe : on écrivait des textes qui véhiculaient des messages socialement engagés. Ce côté un peu militant –Voice of the Voiceless– était destiné à inciter les gens à ouvrir les yeux sur des phénomènes de société discutables. Silence Is The Enemy était, pour nous, à la fois accrocheur et évocateur. Ce qui nous a tout de suite bien plu ! Maintenant, au fil du temps, nos thématiques sont devenues plus matures et originales. Notre état d’esprit est moins révolté contre le système. Mais bon, la notoriété du groupe a fait son chemin et le nom est resté. Et donc, non, aucun lien ni avec Papa Roach, ni Green Day !

En octobre 2016, vous avez publié votre premier Ep cinq titres, « The Call ». Apparemment, il y a un concept derrière ce disque…

Après avoir sorti notre maxi single « Ghost », en 2015, on a cherché à développer une identité créative plus forte en créant un univers musical et visuel bien personnel. « The Call », c’est un peu notre ‘call’ : regardez et écoutez maintenant ce vers quoi Silence is the Enemy s’oriente pour la suite. Un peu comme un manifeste, un épisode pilote.

Avez-vous écrit de nouvelles compos ? Et si oui, avez-vous l’intention d’entrer en studio pour les enregistrer ?

On est en plein dedans, en effet! De nouveaux morceaux sont en cours d’écriture. Nous sommes très enthousiastes car on a l’impression d’avoir atteint notre rythme de croisière.

En digérant vos influences ?

L’écriture de « The Call » avait été, quelque peu, un exercice de funambule, où il avait fallu trouver un équilibre entre toutes nos influences. Elles sont nombreuses et, par la force des choses, très hétérogènes. Chaque membre du groupe pourrait donner une réponse différente! Là où l’un citerait Gojira ou Lamb of God, un autre mentionnerait Mastodon et un dernier évoquerait Dark Tranquillity et Soilwork! Maintenant, comme nous avons trouvé la formule qui nous plaît, tout avance beaucoup plus vite.

La base Metalcore de Silence is the Enemy est indéniable. Vous y greffez des touches de Death mélodique, le tout dans une ambiance condensée, voire oppressante. Mais comment décririez-vous votre musique ?

Ce qu’on veut faire ressentir à l’écoute de « The Call », c’est le contraste entre des moments lourds, oppressants, sombres, et des épisodes plus aériens, mystiques et lyriques. La base musicale est effectivement le Metalcore/Death mélodique, dont on apprécie la puissance et la musicalité ; mais on va ensuite puiser dans différents genres pour véhiculer les émotions que nous souhaitons. On a donc intégré, ça et là, des touches de Sludge, de Groove, de Black Metal, de Stoner, de Prog et de Psyché. Afin d’obtenir une musique dynamique et contrastée, des compositions où il se passe quelque chose, où l’auditeur voyage en notre compagnie. En tout cas, de notre côté, on n’a pas envie de se contenter de répondre aux codes du Metalcore. C’est pourquoi on a décidé, dès le départ, de ne se fixer aucune limite en matière d’inspiration lors de l’écriture. Après… c’est très difficile de résumer le tout en quelques mots sans participer à l’inflation des sous-genres dans le Metal ! Si on veut vraiment être précis, on peut affirmer qu’on joue du ‘Fusion Groove Metalcore’.

Silence is the Enemy, c’est aussi la rencontre entre musiciens issus d’horizons différents. Mais qui apporte quoi ?

C’est précisément grâce à cette diversité d’horizons qu’on arrive à puiser nos sources de tous les côtés afin de créer notre propre son. Nous partageons tous une culture Metal. Elle nous réunit. Mais on a également écouté des sous-genres différents dans nos jeunesses respectives. Silence is the Enemy est au carrefour de tous ces parcours. Concrètement, François (chant) amène une touche Punk/Metalcore, André (guitare) un côté Prog/Groove, Thomas (basse) les aspects Stoner et Clément (guitare), la nuance Death mélodique/Black Metal. 

En 2015, vous figuriez parmi les quatre finalistes du Loud Program (NDR : un dispositif d’accompagnement de groupes de la scène rock dur et métal issus de la Fédération Wallonie-Bruxelles mis en place avec la collaboration du Magasin 4, de l’Entrepôt, de l’Atelier Rock et de l’Alhambra), vous permettant alors de vous produire sur les planches du Botanique et du Festival de Dour. Ce concours vous a-t-il servi de tremplin ?

Oui, c’est en effet vraiment grâce au Loud Program que le groupe a atteint les premiers paliers. Ce qui a débouché sur des contacts avec Court-Circuit, les salles du Botanique et de l’Alhambra. On a aussi rencontré Chris Michez (NDR : chanteur du groupe montois de Hardcore, Do or Die) qui a été notre coach pendant cette période. En très peu de temps, on a accumulé une grosse expérience. La formation a donc réalisé un énorme bond en avant à la fin de l’année 2015. S’en sont suivies des prestations au Durbuy Rock et au Dour Festival en 2016, et on voit maintenant que les événements ne sont pas prêts de s’arrêter!

Au début de cette année, Wolves Scream et Reach The Shore lançaient un concours dont le vainqueur assurera leur première partie à l’Ancienne Belgique. Sur six candidats finaux, vous êtes malheureusement arrivés seconds. Pas trop déçus ?

Un peu déçus, évidemment, vu que ce sera une superbe date ! Et la perspective de partager cette scène avec Wolves Scream et Reach The Shore –des amis, il faut le souligner– était vraiment belle. Mais ce sont les règles du jeu et on arrive juste sur la deuxième marche du podium ; ce qui nous donne juste envie de bosser encore plus! En prenant du recul, cette compétition a été une chouette expérience pour nous : on était ravi de voir tout ce support, toutes ces personnes qui nous ont soutenus tout au long des épreuves. On s’en est certainement sorti grandi. Et puis, le 18 mars prochain, nous serons présents afin d’assister aux prestations de ces deux excellents groupes qui se produiront pour leur double release party. On invite d’ailleurs tout le monde à faire de même. La soirée s’annonce énorme! Quant à nous, ce sera pour la prochaine fois : au rythme où les choses avancent, on finira bien par faire l’Ancienne Belgique, tôt ou tard!

Des concerts sont prévus dans un futur proche ? Et lors des festivals d’été ?

On a repris la route du local de répétition pour rôder notre set live et on démarre les hostilités le 5 mai au Klinker, à Aarschot, en ouverture de Darkest Hour. C’est également une grosse date pour nous. Et là, pour l’instant, on démarche afin de dénicher des contrats à partir de début mai. On se tient en même temps disponible auprès des salles et programmateurs qui voudraient nous booker. On vient d’intégrer le catalogue du Programme Rock de la Fédération Wallonie-Bruxelles ; ce qui devrait nous filer un sérieux coup de boost !

En cette période d’anxiété, de peurs et voire même de paranoïas, tout en se référant au nom du groupe, est-ce que le silence est vraiment un ennemi ? Pour reprendre l’expression connue : le silence des pantoufles est-il plus dangereux que le bruit des bottes ?

Forcément, c’est dans l’air depuis un an. On a d’abord eu les attentats, le radicalisme, l’exclusion, et puis récemment les dérives politiques, la corruption, les scandales à répétition… Ce sont des événements dont il faut parler. Laisser le silence s’installer, c’est abandonner la parole à celles et ceux qui l’ouvrent le plus fort. Et ceux-là ont rarement les avis les plus nuancés... Maintenant, il faut lancer un véritable débat et permettre de vraies discussions avec les gens. Ces phénomènes font peut-être beaucoup de bruit virtuel et excitent tous les Keyboard Warriors de Twitter et Facebook qui s’évertuent à balancer de grands coups de post chocs du style ‘ouvrez les yeux’ ; mais ces déclarations se perdent entre des petites annonces pour guitare et des photos de vacances. C’est le vrai silence, celui de la vraie vie, qui est assourdissant… Après, rompre le silence, ne se limite pas seulement à un idéalisme politique et social. Cette attitude implique un engagement concret dans la vie quotidienne, à titre individuel. Certains vivent dans l’angoisse ou la censure permanente, sont harcelés au travail, malmenés par leur conjoint, victimes d’injustices… et eux aussi auraient besoin de cette prise de parole, besoin d’être entendus. Là aussi le silence est clairement l’ennemi…

Le 18 juin prochain, les vétérans et légendes du Hardcore new-yorkais seront de passage par Liège, au Reflektor. Trente-cinq années d'existence, onze albums studio et des centaines de scènes écumées, autant dire que l'occasion de voir ou de revoir ce groupe mythique n'est pas à manquer !
 
Que les plus indécis-e-s n'attendent pas trop : seules 550 places sont disponibles. Pas une de plus.
 
lundi, 20 février 2017 18:08

V.I.T.R.I.O.L.

V.I.T.R.I.O.L, tel est le doux et suave titre du premier album des Français de Pénitence Onirique, duo originaire d’Autricum, nom donné à la ville de Chartres par les Carnutes, un peuple de la Gaule celtique. Pendant un peu moins de cinquante minutes, Bellovesos aux instruments et Diviciacos au chant, s’immiscent subtilement dans la partie la plus torturée de votre âme. Cinq morceaux, au rythme soutenu mais lancinant, inoculés comme des injections d’acide sulfurique où la musique ne se fait pas tant garante de la violence d’une rencontre entre le corps et le liquide, mais bien de la pénétration intradermique lente et douloureuse du poison. Bien que très peu d’informations ne soient communiquées au sujet des deux musiciens, nul doute qu’ils ont déjà derrière eux une expérience certaine dans le Black Metal. Ce n’est certes pas l’album qui va révolutionner le genre ou lui faire prendre une nouvelle voie encore inconnue, mais le voyage ésotérique est bel et bien au rendez-vous. La plage titulaire de l’opus, la plus intéressante en termes de progression et d’ambiance, offre un déferlement de rage froide et apocalyptique, soutenu par un rythme lourd et oppressant à la batterie. ‘L’essence s’enflamme, la chair figée, frigide coquille d’un séraphin prisonnier, immobiles les larmes, devant l’assistance moqueuse et figée’, tel est le dernier couplet de la composition qui clôt à l’encre de sang cette traversée épique. En publiant ce premier effort, Pénitence Onirique démontre toute sa capacité à créer un univers malsain qui vous tient par la gorge et dont les riffs répétitifs viennent sinuer tacitement les zones d’ombre de votre imaginaire. Un potentiel qui ne demande qu’à être exploité.

 

mercredi, 15 février 2017 11:27

Au-Dessus signe chez les Acteurs de l'Ombre

Le label "Les Acteurs de l'Ombre" ont annoncé avoir signé "Au-Dessus", groupe de Post-Black Metal originaire de Vilnius, en Lithuanie. Depuis son lancement, le label a cette réputation de révéler au grand jour certaines pépites issues du Black et du Death Metal. Après un premier EP sorti en 2015 chez Witching Hour Production, les artistes d'Au-Dessus seront de retour cette année avec un nouvel album, dont la date de sortie est fixée au 19 mai prochain.
 
Comme l'indique le label, " sur les rives de la mer Baltique à la croisée des mondes, plus sombre que la nuit elle-même, plus hostile que l'hiver le plus rude, la musique de ces Lituaniens repousse les frontières musicales du Post-Black Metal. Au-Dessus souffle un vent glacial avec des atmosphères qui se chargent d'ondes négatives pour emmener l'auditeur sur des terres inconnues où les éléments, pris tantôt dans la musique sludge, tantôt dans la torture mentale,ré-ouvrent une à une les blessures de l'âme". Votre curiosité est piquée ? Jetez une oreille ici en guise d'apéritif... 
 
De plus, pour celles et ceux qui seraient dans les alentours de Paris le samedi 11 mars, Les Acteurs de l'Ombre organisent à Saint-Germain-en-Laye un concert avec quatre de ses "poulains", à savoir The Great Old Ones, Déluge, Maïeutiste et Moonreich. Un évènement à ne pas manquer ! Plus d'infos en cliquant ici.
 
 
 
 
 
dimanche, 22 janvier 2017 02:00

Persistence Tour 2017 : dimanche 22 janvier

L’année 2017 démarre sur les chapeaux de roue. Et pour cause : s’il y a bien un évènement qu’il ne faut pas rater –à condition bien sûr d’accepter d’abandonner bouillotte et autres charentaises– c’est la nouvelle cuvée du Persistence Tour, le rendez-vous annuel du gratin du Hardcore (et de ses dérivés). Il faut dire aussi que, cette année, la charge dans le barillet était particulièrement impressionnante en matière de têtes d’affiche. Jugez plutôt : Suicidal Tendencies, Agnostic Front, Municipal Waste et Walls of Jericho.

Ce dimanche après-midi, la température est négative. Pas de neige, ni de verglas. Autrement dit, les conditions sont idéales pour accomplir le trajet sans encombre. En arrivant devant l’enceinte de la salle De Mast, on est surpris par l’affluence. Alors que les hostilités viennent à peine de commencer, il ne reste plus beaucoup de places de parking libres. Quelques demi-tours et marches arrière plus loin, j’en déniche une, derrière le bâtiment. Le froid piquant incite à presser le pas. Une bonne partie du mur latéral droit de la salle –qui peut accueillir un peu moins de 2 000 personnes– est occupée par des stands, proposant le merchandising des sept bands au programme. Il y en a pour tous les goûts : du t-shirt au pull, du bonnet à la casquette, en passant les patchs et les stickers, tout le monde aura le loisir de repartir en emportant un souvenir de cette soirée marathon.

Vu les difficultés de stationnement, Stab, le seul groupe belge à l’affiche, passe malheureusement à la trappe. Un quart d’heure plus tard, c’est Mizery qui est invité à mordre les planches. Originaire de Californie du Sud, il propose un Hardcore old-school à la carapace métallique. Ne révolutionnant certes pas le genre, cette nouvelle formation parviendra néanmoins à sortir son épingle du jeu grâce à une prestation qui est montée en crescendo et en puissance, atteignant son apogée au bout du set.  

Cap ensuite sur New York, en compagnie de Burn, un quatuor drivé par son charismatique vocaliste Chaka Malik. Hormis ses chaussures, soit une paire de Nike aux tonalités rose et vert fluo, il est tout de noir vêtu. Et en jeans. Effets garantis ! Yeux mi-clos, regard perdu dans le vide, mouvements parfois hésitants et s’amusant à faire voltiger son pied de micro dans les airs, Chaka semble être sous influence, sans pour autant perdre la hargne et la forme revendicative de son chant. Se référant au Hardcore plus lent des années 80, Burn jouit d’une certaine aura ; et ce pour avoir semé, ça et là, des graines musicales au sein de bon nombre de formations. En témoigne peut-être la présence en backstage, tout au long du set, de Candace Kucsulain, vocaliste de Walls of Jericho. Cette dernière ne va perdre aucune miette du show, marquant le rythme des morceaux de ses mains et ne quittant jamais le chanteur du regard. Elle sera ensuite rejointe par Daniel Spector et Pokey Mo, respectivement batteurs de Down to Nothing et Agnostic Front. Une belle découverte.

Les roadies s’affairent, emportent les instruments pour laisser la place à Down to Nothing. Quintet ‘Straight Edge’ (mouvance du punk hardcore dont les membres bannissent toute consommation d’alcool, de tabac et autres drogues récréatives), le combo est le premier à bénéficier d’un backflag. Il est frappé du logo du band en lettres capitales blanches et vertes. Tout comme leurs prédécesseurs, les coreux ont pour mission de retourner la fosse en une demi-heure, top chrono. Un pari pour le moins réussi, insufflant une première vague de fièvre dans la salle : premières bousculades, va-et-vient musclés entre les spectateurs et quelques poings qui s’envolent. Les sacro-saints ‘mosh-pits’ commencent à émerger. David Wood, vocaliste du band, n’est également autre que le bassiste du légendaire Terror (voire même temporairement vocaliste, en remplacement d’un Scott Vogel souffrant) ; pas étonnant dès lors, qu’il n’a fallu que très peu de temps à la formation pour mettre le feu aux planches.

La salle De Mast est maintenant bien électrisée pour accueillir l’une des premières grosses pointures de la soirée, Walls of Jericho. Un nouvel opus sous le bras (« No One Can Save You From Yourself »), qu’il a quand même fallu attendre huit longues années avant de le voir sortir, le band de Detroit est attendu de pied ferme. Candace Kucsulain déboule sur le podium, jean noir ultra moulant et t-shirt de musculation à l’effigie du groupe. La chanteuse est en effet une grande adepte du deadlift, c’est-à-dire un exercice de musculation consistant à soulever de terre des charges (très) importantes. Une pratique qui non seulement développe le physique, mais nécessite, en outre, une force mentale phénoménale, afin de pouvoir accomplir l’effort nécessaire au bon moment. Un exercice qui ne peut que se répercuter sur les planches. Candace est survoltée. Elle arpente la scène de long en large et martèle le sol de ses membres surdéveloppés. Sa voix, est devenue de plus en plus grave au fil du temps. Elle lui permet de hurler telle une exorciste s’attaquant au pire des Malins. Certains classiques du band sont évidemment interprétés. A l’instar de « A Trigger Full of Promises » ou encore « The Americain Dream » ; mais la part belle du trop court set (quel dommage !) sera néanmoins constituée de pistes issues de son dernier LP ; et notamment « Relentless » ainsi que « No One Can Save You From Yourself ». C’est finalement sur « Revival Never Goes Out of Style » que le groupe prend congé de l’auditoire. La vocaliste descend de son perchoir pour rejoindre la foule, debout sur les barrières de sécurité, entraînant par la même occasion une ruée des premiers rangs afin de donner du cœur avec la chanteuse. Ça se bouscule, ça joue des coudes, ça s’agrippe les uns aux autres : le dernier morceau arrive à sa fin et il faut donner ce qu’il reste dans les poumons. Le groupe repart aussi vite qu’il est apparu, laissant la fosse entonner le refrain du dernier morceau, telle une promesse de se retrouver bientôt.

Place à présent au mouton noir de la soirée, Municipal Waste, sortant pour l’occasion des ornières Hardcore de la soirée. Le look des musiciens qui assiègent la scène ne laisse pas planer le doute : la fosse va recevoir une bonne dose de Thrash Metal (ou pour les puristes, de Crossover Thrash Metal, un Thrash Metal influencé par du Punk Hardcore). Vieilles vestes en jeans trouées, t-shirt old-school, cheveux longs –dont on épinglera la coupe typique mulet du guitariste Nick Poulos–, bandanas dans les cheveux, bref, toute la panoplie est au rendez-vous. Egalement issus de Virginie, les musicos ne font pas dans la dentelle : ça balance à gros coups de riffs, ça martèle sec et le chant de Tony Foresta est tout aussi violent que rapide. ‘On est content d’être là en Belgique, vous avez vraiment la meilleure bière au monde’, balance-t-il avant de poursuivre : ‘C’est d’ailleurs une chanson pour vous !’. Il ouvre une cannette de Jupiler, boit deux gorgées puis la secoue en arrosant les premiers rangs, avant d’attaquer le morceau évocateur, « Beer Pressure ». N’allez pas chercher de la grande philosophie chez Municipal Waste, les musicos sont venus pour boire des coups et jouer de la bonne musique. Puissante et efficace. ‘Direct to the point’, quoi. Et ça marche ! En marge de cette prestation, on notera quand même la présence, sur le stand le merchandising du band, d’un t-shirt particulier, arborant en façade un Donald Trump se tirant une balle dans le crâne (avec son lot d’hémoglobine, cela va de soi) et dans le dos, le message ‘The only walls we build are walls of death’. Comme quoi, on peut jouer au con et chercher quand même, et subtilement, à passer certains messages politiques…

Il est 21h45 et l’avant-dernier round de ce Persistence Tour est prêt à en découdre. Et pour la circonstance, le combo hardcore légendaire Agnostic Front bénéficie d’un quart d’heure supplémentaire de set, par rapport à ses comparses. Les lettres rouges du logo côtoient, en arrière-plan, une effigie de la Statue de la Liberté ; mais le doux visage a été remplacé par un crâne. En fait il s’agit de l’illustration de la pochette du dernier elpee du combo, « The American Dream Died ». Après une intro constituée d’un pot-pourri du répertoire de la formation, sur fond de sirène des forces de l’ordre, les musicos débarquent un par un. Roger Miret, en digne leader représentant du Punk Hardcore, en affiche ostensiblement le look : bandana sur le crâne surmonté d’une casquette coiffée à l’envers, chemise noire sans manches, short et chaussettes/bas noirs recouvrant entièrement ses jambes. Idem pour son guitariste, Vinnie Stigma, tempes complètement rasées, vêtu d’un t-shirt d’Iron Reagan, un groupe de Crossover américain qui implique notamment des membres de Municipal Waste. L’artiste est armé d’une gratte noire, ornée d’une couronne de lauriers, au dos de laquelle est mentionné ‘Stigma’ en lettres capitales. Chemise noire impeccablement repassée et pantalon de la même couleur, Pokey Mo, derrière ses fûts, ne laissera jamais transparaître la moindre émotion, mû par cette retenue typique de la tradition asiatique. Malgré un son pas vraiment génial, les New-yorkais ne vont pas perdre de temps et asséner, au cours des trois-quarts d’heure alloués, pas moins de quinze morceaux. En trente-sept ans de parcours et onze albums studio, ce n’est évidemment pas le choix qui manque : de « Victim in Pain », sorti en 1984, à « Police Violence », paru l’an dernier et figurant sur son dernier LP, en passant par les incontournables « For My Family » ou encore « The Eliminator » (en titre d’ouverture). Une prestation carrée, marquée en outre par un duo improvisé avec Chris Michez, chanteur de Do or Die, sur « Peace » (un duo assez symbolique en somme, vu que le leader du groupe de Hardcore belge, un des plus notoires du plat pays, a annoncé il y a peu son désir d’en revenir à un style originel, entraînant par la même occasion un remaniement du line up). Roger Miret s’adresse aussi à la foule : ‘Une des meilleures façons de soutenir un groupe, c’est de passer par notre stand merchandising’, avant de poursuivre ‘… car plus que jamais nous avons besoin de vous… ! From the East coast to the west coast… Gotta gotta gotta go !’, et d’enchaîner directement par « Gotta Go », le pit hurlant à gorge déployée le début du morceau, tel un hymne. Les slams s’enchaînent les uns après les autres, n’épargnant pas le boulot de la sécurité. Cerise sur le gâteau –ou plutôt dernier coup de botte dans la fourmilière– les icônes du mouvement signent leur prestation par une reprise pêchue du « Blitzkrieg Bop » des Ramones, achevant dignement les derniers survivants dans l’auditoire.

Le Persistence Tour porte bien son nom : au-delà de la qualité des groupes sélectionnés, suivre ce mini festival du début jusqu’à la fin résulte d’une certaine forme d’obstination voire de ténacité. Et de l’énergie, mieux valait en avoir conservé un peu afin d’accueillir, comme il se doit, l’un des fers de lance du Crossover, Suicidal Tendencies. Un squelette vêtu d’une chemise à carreaux et coiffé d’une casquette à l’effigie du groupe fait à présent face au public, remonté à bloc pour ce final act. Les artistes opèrent également leur entrée un par un. Que ce soit le t-shirt, la vareuse, le bandana, le short ou les chaussettes, tous le vêtements sont les mêmes que ceux vendus sur le stand merchandising. L’introduction de « You Can’t Bring Me Down » bat son plein dans les enceintes tandis que Dean Pleasants, un des guitaristes de la formation, l’accompagne en enchaînant les notes suaves. Mike Muir, vocaliste, crâne quasi-rasé, hormis sa longue tresse qui lui tombe dans le dos et bandana au ras des yeux, se plante sur la droite du podium. Il ne tient plus en place jusqu’à finalement hurler ‘What the hell's going on around here?’. Le coup de feu est parti ! Les musiciens tournent en rond en adoptant ce pas typique du mosh, à longues enjambées. Pas question ici d’une éventuelle mise en bouche ; les Californiens taillent dans le gras directement grâce à l’un de leurs plus grands succès. La fosse se déchaîne, pieds et bras se perdent tout en aidant les coreux les plus remontés à slammer sur le public en transe. Malgré une setlist plutôt atypique –seulement dix morceaux– amputée de son plus grand tube « Institutionalized » (pourtant prévu sur la setlist papier !) et de son dernier single en date, « Clap like Ozzy », le combo reste fidèle à sa réputation et électrise totalement l’auditoire. Trente-sept ans de scène et, pourtant, le groupe témoigne encore tout autant sa joie de se produire en ‘live’. Les musiciens ne tiennent pas une minute en place, et tout particulièrement Mike Muir qui, quand il ne court pas dans tous les sens, se déchaîne sur le rythme des morceaux, en exécutant une gestuelle pour le moins étonnante ; et pour cause, il tourne les bras, mains acérées, tel un rongeur qui creuserait un terrier. Même si le patronyme du combo a résisté pendant plus de quatre décennies, il n’en reste pas moins que le line up a subi de très nombreuses modifications, au fil du temps. Trois des cinq membres ont en effet débarqué l’année dernière, dont Dave Lombardo, le ni plus ni moins ancien batteur de Slayer, parti de la formation après de profonds désaccords. Une arrivée de marque dans Suicidal Tendencies, qui ne peut ajouter qu’une couche de vernis brillant supplémentaire au band. À tel point que lorsque Mike Muir demande au public d’applaudir le batteur, ce dernier apparaît quelque peu gêné du succès récolté et demande d’acclamer également les autres membres du quintet. De « Subliminal » et « I Saw Your Mummy », tirés de leur album éponyme de 83, à « Freedumb » (99) ou encore « Living for Life » (16), les hommes forts du Crossover brasseront des titres dans l’ensemble de leur carrière. Et puis, et c’est peut-être là le plus important, ils ont permis à leur public de faire la fête. De la bonne humeur en barre, à laquelle la fosse a manifestement répondu présente, que ce soit par les dizaines de slams (dont un slammeur en kilt, qui retombera malheureusement assez mal, perdant connaissance après que sa tête se soit fracassée sur les barres de sécurité) ou cet acharnement à monter sur le podium à deux reprises, à l’invitation du groupe. Un beau bordel dont le leitmotiv principal consiste à faire passer du bon temps.

« Pledge Your Allegiance » clôt le set, moment au cours duquel le bassiste Ra Diaz invite la foule à reprendre en chœur les initiales du groupe en mimant les lettres à l’aide de ses mains. Les artistes reposent leur instrument et regagnent le backstage, à l’exception du chanteur qui préfère descendre de l’estrade et venir saluer ses fans, se prêtant au jeu de quelques photos souvenirs. Une attitude humble et modeste –un détail en somme !– mais qui démontre bien la mentalité du band, respectueux et en osmose avec ses aficionados. Une attitude qui caractérise généralement bien les participants à ces Persistence Tour : de la qualité, du respect et un profond amour de la musique et de la culture qui l’entoure. Allez, plus qu’un an à patienter ; on y sera vite !

(Organisation : Heartbreaktunes + ASBL Strike)

samedi, 24 décembre 2016 11:35

Exodus, c’est avant tout Gary Holt !

Metallica, Testament et Exodus sont considérés comme des pionniers du Trash Metal. Il serait né aux States, et tout particulièrement en Californie, dès le début des eighties. Aujourd’hui impliqué chez Metallica, Kirk Hammett est un des membres fondateurs d’Exodus. Il avait d’ailleurs rejoint ‘The Four Horsemen’, dès 1983. Mais ce soir, dans la ville portuaire d’Anvers, c’est un autre homme fort du band que Musiczine rencontre : Steve Souza, mieux connu dans le milieu sous le pseudo de Zetro (NDR : il en dévoilera la raison en fin d’entretien…) Vocaliste de 86 à 93, de 2002 à 2004 ; et, enfin, de retour depuis 2014, Zetro n’a jamais mâché ses mots. Une réputation qu’il n’a pas usurpée…           

L’infrastructure du Trix est encore vide à cette heure-ci. Les hostilités ne commencent que dans une bonne heure. Les têtes d’affiche sont partagées entre Exodus et les icônes du Death Metal old school, Obituary. Les sonorités guident mes pas. J’ouvre les portes de la salle de concert et assiste quelques minutes au soundcheck de King Parrot, un des deux ‘opening acts’ (NDR : l’autre, c’est Prong) de la soirée. Pas de doute, elle risque d’être mouvementée. Julia, la tour manager d’Exodus, m’invite à la suivre. Je passe à l’arrière de la scène, la précède dans un labyrinthe de couloirs, avant d’arriver à destination ; c’est-à-dire face à une petite loge où m’attend Zetro, assis dans un canapé en similicuir blanc. Les cheveux en bataille, vêtu d’un jeans noir et d’un maillot à l’effigie des Calgary Flames (NDR : c’est le nom d’une équipe de hockey canadienne), le vocaliste pianote sur son smartphone. Je m’installe à côté de lui et déclenche l’enregistreur.

En octobre 14, soit quatre mois après le retour annoncé de Zetro derrière le micro, ‘Blood in, Blood out’, le dixième opus studio du band, est paru. Un an plus tard, y a-t-il du neuf à l’horizon ? « Je n’en ai pas encore causé avec Gary (NDR : Holt, le guitariste et leader du combo) de vive voix ; on en a juste touché un mot par correspondance. Un nouvel album est en effet en préparation, mais la date de sortie n’a pas encore été déterminée. Si tout se déroule normalement, ce sera peut-être pour l’année prochaine. Tu sais, on est déjà en novembre. On rentre à la maison à la fin du mois. On passe les fêtes en famille et on entamerait donc l’écriture en janvier. On réaliserait les sessions en février. On assemblerait le tout d’ici avril/mai et terminerions l’enregistrement final pendant l’été ; bien que le temps file toujours plus vite à ce moment-là. Donc oui, peut-être qu’en octobre ou en novembre de l’année prochaine, on devrait avoir quelque chose à se mettre sous la dent (NDR : dans l’oreille ?), si on ne se réserve pas trop de temps libre », argumente le chanteur, avant de poursuivre : « J’ai bien quelques idées de lyrics derrière la tête, mais, comme je l’ai expliqué, il faut que j’en discute avec Gary… Je suis sûr qu’un nombre incroyable de sujets violents lui a déjà traversé l’esprit ; des sujets bien spécifiques au Thrash ».

Bon, on le comprend très vite : Gary Holt joue un rôle prépondérant dans le groupe. À peu de choses près membre fondateur (Gary était au départ roadie de Kirk Hammett et n’intègrera le line up du combo, qu’un an après sa formation), le guitariste est clairement au gouvernail. Et pourtant, ce musicien est rarement présent lors des prestations du band. En effet, depuis 2011, Gary milite comme second gratteur chez Slayer. Au départ, il était le suppléant intérimaire de Jeff Hanneman. Mais en 2013, suite au décès de ce dernier, il le remplace définitivement. Or Slayer est un groupe qui tourne inlassablement depuis plusieurs décennies, monopolisant une grande partie du temps du guitariste. Une situation difficile à gérer ? « Exodus, c’est avant tout Gary Holt ! », réagit Zetro. « C’est un peu comme son enfant : c’est lui qui coordonne l’ensemble, autant la musique que les paroles. Il est toujours le seul à être référencé sur chaque morceau. Mais ce n’est pas un problème pour nous. Il a toujours fait un très bon boulot et on est tous conscients d’avoir la chance de composer et jouer avec lui ». Il prend une pause, avant d’admettre : « Mais évidemment, on ne pourrait plus continuer à tourner si on devait attendre sa présence. Il est donc fréquemment remplacé par d’autres musiciens. Au final, cette situation se reproduit chez d’autres formations de Thrash. Ainsi au sein d’Anthrax, quand Charlie Benante était empêché, c’est Jon Dette qui le remplaçait. Pareil pour Scott Ian, devenu parfois le substitut d’Andreas Kisser. Ce qui n’a jamais empêché le groupe de continuer son parcours… C’est sûr que depuis qu’il a rejoint Slayer, sa présence en ‘live’ a été plus que limitée. Mais il n’empêche qu’Exodus, c’est avant tout Gary, et personne d’autre dans le groupe ne pourrait ou ne voudrait même prendre sa place. Ce serait un sacrilège : la mentalité, l’attitude, la façon d’écrire les morceaux… tout ça, c’est lui… »

Mais qu’importe l’importance du capitaine, il ne fera jamais avancer le navire à lui tout seul. Comme vocaliste, Zetro reste co-auteur des paroles des morceaux et pour lui, le Thrash est une musique sociétale « Il suffit d’ouvrir le journal et de lire tout ce qui touche à l’actualité, pour y puiser des thèmes d’inspiration. Du social au religieux, du militaire au politique, toutes ces nouvelles formes de guerres qui éclatent un peu partout… Il se produit tellement d’événements négatifs à travers le monde. Ce ne sont pas les sujets qui manquent ! Pas étonnant que le Metal soit souvent la musique préférée de fans de films d’horreur ! », déduit-il en rigolant…

Il est vrai que le Thrash Metal, cette incroyable rencontre entre la New Wave of British Heavy Metal et le Hardcore de l’époque, n’a jamais eu la vocation de devenir source de bande-son pour les films de Walt Disney. Zetro appartient à cette catégorie d’artistes qui ont lancé ce style musical. Il se souvient : « C’est vrai que tout a commencé il y a déjà presque quarante ans… Nous sortions en 85 notre premier album, ‘Bonded by Blood’ ; et il est exact que ce style de musique était né quatre ou cinq ans auparavant », concède-t-il avant d’embrayer, pensif : « Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis lors… suffit de penser à l’arrivée du cd, puis de l’avènement d’Internet… C’est fini la période où on s’échangeait des cassettes ! Mais malgré le temps, c’est incroyable de voir le nombre de fans qui nous suivent toujours aujourd’hui… C’est un peu ça la magie du Metal. Jamais tu n’entendras de la bouche d’un véritable amateur du genre : ‘Ouais, non, finalement le Metal ça ne me dit plus rien…’ C’est impossible ! »

Même si la figure charismatique de Zetro est intimement liée à Exodus, son parcours au sein du combo n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. En effet, dès 93, le band décide de splitter et ne reprendra ses activités que quatre ans plus tard, en compagnie de Paul Baloff, le vocaliste originel. Ce dernier décède en 2002 d’un AVC et Zetro est rappelé à la barre. Mais deux ans plus tard, il tire sa révérence, suite à des divergences de vues. S’en suivront dix années au cours desquelles il accomplit un demi pas de côté par rapport à la scène musicale. « J’ai notamment écrit quelques chansons pour Testament et fondé, en compagnie de Chuck (NDR : Billy, le chanteur de Testament), un groupe baptisé Dublin Death Patrol. J’ai aussi apporté ma collaboration à Tenet. Et puis lancé un autre projet auquel participe mes fils, Hatriot. On peut donc attester que j’ai tenté quelques expériences pendant cette période ; mais plus au sein d’un ‘mothership’ comme Exodus. En 2004, mes enfants étaient encore des ados. Ils sont devenus des adultes. C’est donc plus facile aujourd’hui. Je dois moins me soucier de la situation familiale, que chacun de mes enfants ait de bonnes notes à l’école. En outre, je ne suis plus marié à leur mère et j’ai à présent une magnifique petite amie. Il y a maintenant huit ans que nous sommes ensemble. Elle aime m’accompagner en tournée et je ne dois plus me préoccuper de toutes ces merdes quotidiennes à la maison. Dix années peuvent vous changer énormément dans une vie », confie l’artiste.

Mais revenons un peu à Dublin Death Patrol et Hatriot. Quel est donc le sort de ces projets parallèles depuis qu’il a rejoint à nouveau le paquebot Exodus ? « Tu sais, avec Chuck Billy, on a décidé de lancer sur les rails Dublin Death Patrol parce que les autres musiciens de ce band n’avaient jamais eu l’opportunité de jouer en division supérieure. Ils étaient vraiment derrière nous, car, c’est vrai, tous les side projects dans lesquels nous nous lançons ont cette chance d’attirer l’attention du public. Et donc on l’a fait ! On s’est embarqué dans l’aventure et on a enregistré un album. Ensuite, ils ont voulu partir en tournée, et ça aussi, on l’a fait ! Comme ils ont vu que ça marchait, qu’ils commençaient à devenir des rock stars, ils ont souhaité réaliser un second LP… Et puis là –wow !–  j’ai dû calmer les ardeurs. A ce moment-là, je venais juste de lancer Hatriot. Je ne voulais pas m’investir dans un autre projet de la taille d’Exodus. Et puis l’histoire a voulu que je rejoigne à nouveau ce band… » Un brin nostalgique, le musicien se justifie : « J’aurais bien voulu rester chez Hatriot, comme le fait Gary pour Slayer, mais c’était trop lourd pour moi. Et il me prenait trop de temps. C’est pourquoi mon fils aîné a repris le chant à ma place. Et je dois dire qu’il se débouille très bien ! », se défend-t-il en affichant un sourire, non sans une certaine fierté...

D’un point de vue musical, l’histoire de Zetro et celle du chanteur de Testament sont intimement liées. En effet, alors que Testament n’en était qu’à ses premiers balbutiements et répondait alors au patronyme de The Legacy, son vocaliste n’était autre –à ce moment-là– que… Zetro en personne. Annonçant qu’il allait quitter la formation peu de temps après avoir enregistré une première démo, afin de rejoindre Exodus, Zetro propose pour remplaçant, Chuck Billy. Ce même Chuck en compagnie duquel il lancera Dublin Death Patrol et qui, pendant un certain temps, deviendra le manager d’Exodus. Et c’est toujours ce même Chuck qui, selon certaines rumeurs, aurait poussé vers la sortie Rob Dukes (chanteur d’Exodus de 2004 à 2014), afin de ramener Zetro au micro. Un retour d’ascenseur ? « Je ne suis pas trop au courant du déroulement des événements à cette époque », soutient-il. « Je sais juste que les autres membres voulaient savoir si ça pouvait à nouveau marcher entre nous ; mais je n’ai jamais vraiment su trop pourquoi. Enfin, je n’ai jamais cherché à le savoir, on n’a jamais abordé ce sujet. C’est entre le groupe et Rob. Mais peu importe ce que Rob a pu faire, les quatre autres musiciens n’étaient plus spécialement satisfaits de lui. Apparemment il s’est passé beaucoup de choses en cours de route… Mais c’est vrai qu’on entend beaucoup d’histoires et qu’on ne sait jamais trop dissocier le vrai du faux… Je peux juste dire qu’un jour, Chuck est venu me voir et m’a dit : écoute, Gary est occupé de chercher quelqu’un pour faire le boulot et tu dois le faire! »

Après avoir vécu une première dissolution du groupe et rendu son tablier quelque temps plus tard, peut-on croire à un retour de Zetro sur le long terme ? « Tu sais ce qu’on dit : jamais deux sans trois ! », réplique-t-il, un long rire à l’appui. « Non, mais sérieusement, je pense que cette fois-ci, autant physiquement et mentalement, tout va beaucoup mieux. Ma voix est bien meilleure. Plus aucun élément extérieur ne peut entraver mes capacités. Regarde derrière toi… », me dit-il, en montrant du doigt les packs entassés dans mon dos. « Ouais mec, c’est de l’eau ! Fini ce temps où je buvais une ou deux bouteilles de vin par jour… Mentalement, c’est juste totalement différent ».

L’interview touche à sa fin, mais je ne pouvais pas m’en aller sans savoir pourquoi tout le monde l’appelle Zetro « C’est tout con. L’explication vient de l’époque où j’étais encore un gamin. J’avais 16-17 ans. Je m’étais pris un trip au LSD et je voulais que tout le monde me surnomme ‘Z’. Les gens m’interpellaient en disant : ‘Hey Zed ! Hey Zed !’ Et au fil du temps, le sobriquet s’est transformé en Zetro… il y a donc 33 ans qu’on m’appelle sous ce pseudo, maintenant ! »

Avant de laisser l’artiste se préparer pour le show de ce soir, je lui demande, avec un brin d’ironie, s’il n’est pas trop triste de ne pas être aux États-Unis pour l’instant afin d’élire le futur président des States. Celui qui succèdera à Barack Obama à la Maison-Blanche (NDR : nous sommes en effet à quelques jours des élections américaines du 8 novembre). Contre toute attente, la réplique de Zetro est cinglante : « Mais pas du tout, vu que j’ai déjà voté par anticipation ! Et j’ai choisi la personne la moins pire des deux… et j’en resterai là ! À toi de voir comment tu le prends… », conclut-il, en se marrant.

Et seuls les murs des coulisses du Trix sauront pour qui Zetro a finalement donné sa voix...

(Interview réalisée le mardi 1er novembre, au Trix à Anvers)

mercredi, 14 décembre 2016 02:00

Une perfusion de bonne humeur

Alors que les festivités de fin d’année ne sont plus qu’à un jet de Manneken Pis, les rues et les vitrines de Bruxelles se sont parées de lumières et de guirlandes ; et ce décor rappelle que l’année 2016 est prête à tourner la page. Mais pour les amateurs de rock/stoner/metal/blues, c’est tout simplement Noël avant l’heure. Et pour cause, les Américains de Clutch débarquent dans la capitale !

La soirée s’ouvre pourtant dans une ambiance un peu insolite. Et se terminera également dans le même climat ; mais nous y reviendrons. En fait, il est un peu plus de 19 heures, mais le hall d’entrée de l’Ancienne Belgique est désertique. Résultat des courses, il n’y a pas lieu de faire la file pour commander une bière ou déposer ses affaires au vestiaire (NDR : ça rime !) Cependant, on est en droit de se poser des questions sur l’assistance censée assister au spectacle, ce soir. Bah, la foule est sans doute déjà à l’intérieur. Ce qui pourrait s’expliquer, vu que le supporting act a déjà entamé sa prestation depuis quelques minutes. Après avoir passé la double porte qui mène à la salle, on est quand même surpris de constater que le parterre est tout aussi clairsemé. De longs draps noirs recouvrent les balcons. Bref, la soirée ne sera pas sold out. Mais qu’importe…

C’est donc devant un maigre public que Lionize entame les hostilités. Un combo yankee, issu du Maryland. T-shirt et short ornés de motifs psychédéliques azurés, Nate Bergman donne de la voix. Armé de sa guitare, il cherche à fustiger le maigre auditoire en dispensant un rock aux tendances heavy. En une demi-heure, la formation va pondre six morceaux. Et ils suffisent pour faire le tour de ce qu’elle propose. Bref, le set est sympa, mais dans le genre, c’est du déjà vu et entendu…

Si Lionize souffre d’une carence en originalité, Valient Thorr n’en manque certainement pas. De véritables combattants issus de la Caroline du Nord. En arrière-plan, son backflag, illustré par le logo du groupe et son nom en lettres capitales italiques dont les extrémités se profilent en éclairs, évoquent les premiers combos de Thrash. Quoique plus contemporain, on imagine que Valient Thorr aura à cœur de proposer une expression sonore plutôt old school. Dès qu’il entame son set, la réaction est instantanée : mais qu’est-ce que ce beau bordel ? Un boxon causé par un mélange de Stoner, Heavy et Hardcore, sur lequel vient planer la voix de Valient Himself (NDR : pas de jeu de mots, c’est le pseudo qu’il a choisi). La voix de ce grand blond à l’allure archétypale du redneck oscille constamment du Punk au Heavy. Mais au fil du show, les morceaux deviennent de plus en lisibles, libérant toute leur puissance et leur énergie… paranormale. En effet, il ne faut pas oublier que les musicos prétendent venir de la planète Vénus, s’être crashés sur Terre en 2000 et avoir accordé plus de 1 500 concerts. Vous comprenez mieux à présent ? Et c’est finalement sur les notes joyeuses d’un ‘Happy Birthday’ adressé au guitariste Voiden Thorr, que le quintet prend congé de l’auditoire.

Les opportunités bibitives du marché de Noël ont peut-être retardé les plus assoiffés des mélomanes ; mais quoi qu’il en soit, la fosse est à présent bien remplie. Difficile quand même d’imaginer qu’une formation comme Clutch (NDR : également originaire du Maryland) se produise devant un parterre vide, à l’AB. Ce ne sera donc pas le cas. Cependant, le public est multigénérationnel. On y croise autant d’ados que de tempes grises. De mecs que de filles. Il y a des métalleux et des rockers, of course. Mais aussi des monsieur et madame Tout le Monde, visiblement touchés par l’incroyable alchimie imaginée par Clutch qui est parvenu à agréger Rock, Metal, Hardcore, Blues et Folk.

Les derniers réglages des instruments terminés, les lumières s’éteignent et du blues s’échappe des haut-parleurs. Les spectateurs dansent, se trémoussent ; certains scandent le nom du groupe. Il plane une ambiance de fête. Les artistes montent enfin sur l’estrade ; le chanteur Neil Fallon en tête. Râblé et pas très grand, il arbore une barbe noire, particulièrement dense. Il est vêtu d’un t-shirt noir à l’effigie de ‘Weathermaker Music’, le label de Clutch. Il est suivi du batteur Jean-Paul Gaster, du bassiste Dan Maines et du guitariste Tim Sult. Ces trois derniers sont sobrement vêtus. Leur look est même plutôt classique. D’ailleurs, si vous les croisiez en rue, vous ne détourneriez même pas le regard. Le décor est épuré. L’arrière-plan est tapissé par la pochette du dernier LP, « Psychic Warfare » : épée à la main sur laquelle est forgée « Wonder », une énigmatique soldate ailée est entourée de deux énormes canons. Le message est clair : pas besoin de fioritures superflues, on se concentre sur la musique. Seuls les amplis à lampes, de la célèbre marque « Orange », servent de cadre.

Tous les fans de Clutch sont au courant : rien ne sert de glaner au préalable sur Internet des informations relatives aux concerts précédents ; la setlist est différente, à chaque représentation. Le principe est simple : chacun leur tour, les membres la confectionnent le soir même. Et pour le coup, c’est aujourd’hui Neil qui est aux manettes. « Cyborg Bette », issu de « Earth Rocker », elpee qui a décuplé la réputation du band, entame les offensives rock’n’rollesques. Le concert va d’ailleurs privilégier les titres de cet elpee, mais également de « Psychic Warfare », au sein duquel seront extraits le titre éponyme, ainsi que le groovy « Crucial Velocity ». Bien que le répertoire soit préétabli, il ne néglige pas pour autant les incontournable. A l’instar du très entraînant « The Mob Goes Wild » (« Blast Tyrant ») ainsi que du tube incontesté, « Electric Worry », joué en rappel. Plus surprenant, « 10001110101 » est également interprété. Il l’est pourtant rarement, car il nécessite le concours d’un synthé. Mais c’est Chris Brooks de Lionize, qui s’y colle.

Dès les premiers morceaux, on comprend que les musiciens ne sont pas venus pour épater la galerie. Peu communicatifs, le guitariste, le bassiste et le batteur sont particulièrement concentrés sur leurs instruments. Une attitude particulièrement marquée chez le gratteur Tim Sult. Visage fermé, il ne relèvera guère la tête, au cours du show. Mais ne vous y méprenez pas, les musicos ne font part d’aucune condescendance ; ils donnent même plutôt l’impression de s’immerger profondément au cœur de leurs compos. Ils sont d’ailleurs enchaînés les uns après les autres. Jugez plutôt : 17 titres en une heure et demie. Pas trop le temps de se perdre en bavardages inutiles. Neil Fallon, quant à lui, arpente la scène de long en large ou se plante face au public, cambre les jambes et harangue le public en amplifiant les mouvements de ses bras. Et puis très souvent, de ses yeux bleus profonds, il fixe des individus dans la foule, comme s’il était habité par les titres qu’il interprète. Enfin, à plus d’une reprise, il accompagnera également Tim Sult à la guitare, pour notre plus grand plaisir.

Assister à un concert de Clutch, c’est bénéficier le temps d’une heure et demie d’un creux dans l’espace-temps où il fait bon vivre, où les soucis et tracas du quotidien s’estompent et se noient dans des effluves enivrantes de rock’n’roll aux relents Blues ; des fragrances sentant bon la chaleur du Sud. Une perfusion de bonne humeur en toute simplicité, offrant parfois l’impression de se retrouver immergé dans l’agréable ambiance d’un groupe d’amis lors d’une répétition, profitant de l’espace alloué pour prendre du bon temps et le partageant avec celles et ceux qui les entourent.

Le concert touche à sa fin, Neil s’approche du bord de la scène et offre son onglet à un adolescent, planté aux premiers rangs. Les artistes regagnent calmement les coulisses, les lumières se rallument et… les baffles commencent à cracher « Ace of Spades » de Motörhead. La magie du Rock se réincarne au moment même. Alors que plus personne n’est sur le podium, les pogos reprennent de plus belle dans la fosse et tous s’époumonent sur le refrain de ce morceau devenu mythique. Une communion improvisée à la mémoire de ce groupe qui aura marqué et marquera encore certainement de nombreuses générations. La mort sépare, mais la mémoire se perpétue. Clutch ou Motörhead, même combat : un style de musique qui restera encore vivant de nombreuses années.

Set-list : “Cyborg Bette”, “Decapitation Blues”, “Crucial Velocity”, “Firebirds!”, “Gravel Road”, “The Mob Goes Wild”, “Struck Down”, “Earth Rocker”, “Sucker for the Witch”, “A Quick Death in Texas”, “10001110101”, “50,000 Unstoppable Watts”, “The Face”, “The Yeti”, “X-Ray Visions” 

Rappel : “The Wolf Man Kindly Requests...”, “Electric Worry / One Eye Dollar”

(Organisation : Ancienne Belgique & Weathermaker Records)

jeudi, 17 novembre 2016 02:00

Les magiciens d’O’

Alors que la sphère œnologique est actuellement en ébullition, suite à la sortie du Beaujolais nouveau, celle du métal est agitée par la sortie du dernier opus d’Opeth. Rien ne sert de tourner autour du chaudron : « Sorceress », douzième LP de la formation suédoise, est tout simplement magique. L’occasion pour la bande à Mikael Åkerfeldt, leader incontesté du band, de venir présenter ses dernières compositions sur le Vieux Continent. Arrêt à l’Ancienne Belgique, considérée par le groupe (et par tant d’autres artistes), comme une des meilleures salles d’Europe.

S’il doit bien y avoir un défi difficile à relever, c’est de se produire en première partie d’Opeth, tant il est de notoriété publique que les artistes ont l’habitude de placer la barre très haute. Ce défi herculéen, ce sont les Norvégiens de Sahg qui s’y sont collés, en proposant un subtil mélange de Doom et de Stoner. Lente et lourde, l’expression sonore est dominée par une voix claire, telle une fenêtre qui s’ouvre à travers un épais nuage de suie. Un set d’une demi-heure ; huit morceaux qui cherchent à convaincre un auditoire, qui s’est épaissi au fil du concert. Malgré une entrée en matière un peu abrupte, force est de constater que le quatuor est parvenu à insuffler une ambiance suave et envoûtante, tout en emportant le public avec eux. Les applaudissements deviennent de plus en plus nourris. Les traditionnelles cornes ‘métaliennes’ surplombent les têtes. Le public semble charmé. Des morceaux, certes parfois inégaux (mais un « Sanctinomy » particulièrement redoutable et ravageur !), qui ont eu le mérite de préparer dignement le terrain pour les tant attendus Suédois. Pari relevé !

Les roadies s’activent maintenant pour préparer l’espace scénique réservé à Opeth, bien que le band soit volontairement loin de s’encombrer d’artifices en guise de décor, préférant tout au plus jouer avec des effets de lumière. C’est dans cet esprit que sont disposées, de part et d’autre du podium, deux petites colonnes de différents projecteurs. Le fond de la scène n’est pas orné du classique backflag, mais bien de rangées de carrés mobiles, sur lesquels y sont projetés fréquemment des images de la pochette (ou une illustration qu’y s’y rapporte) de l’album interprété par les artistes. La batterie est totalement décentrée vers la droite, la grosse caisse est agrémentée d’un magnifique ‘O’ tout en volutes, symbole de la formation. L’autre partie arrière de la scène est occupée par les synthétiseurs et autres objets de percussion. En avant-plan, deux sobres pieds de micro, armés d’une dizaine de plectres sont prêts à donner de leur plastique pour envoûter les lieux. Bière ou verre de vin à la main, la foule –constituée majoritairement de trentenaires et quadras– qui s’est agglutinée dans la fosse et aux balcons,   sont maintenant prêts à savourer les douces mélodies élaborées par les Scandinaves.

Les lieux baignés d’une lumière rouge pourpre, le silence s’installe. Joakim Svalberg entame au piano les premières notes jazzy de « Sorceress », titre maître du dernier long playing, soutenu par la batterie de Martin Axenrot et la basse fragile de Martin Mendez. Une mise en haleine de plus ou moins une minute, avant que n’apparaissent finalement le patron et son bras droit, Mikael Åkerfeldt et Fredrik Åkesson. Il n’est plus un secret pour personne qu’Opeth est tout simplement l’enfant prodige de Mikael. L’homme aux allures de D’Artagnan (ou de ‘Milou’, selon un fan dans la fosse, qui n’a cessé –et c’est une énigme– de le nommer comme tel) est derrière toutes les manettes : de la composition à la production en passant par le mixage. Une tyrannie soft dont tout un chacun accepte de prendre part et d’y trouver la place qu’il mérite. Cette hiérarchie en découle naturellement sur la présence scénique, où Mikael est projeté en avant-plan, monopolisant la parole pendant les morceaux (à l’exception de certains chœurs entonnés par Åkesson et Svalberg) mais également lors de ces temps morts entre les compositions, au cours desquels le vocaliste s’est taillé la réputation d’un dandy pince-sans-rire. ‘On est tout simplement là pour que vous preniez du bon temps et pour que, quand vous sortiez d’ici, vous vous sentiez bien…’, lance-t-il, avant de poursuivre, sourire aux lèvres et sûr de lui : ‘Mais bon, qui peut douter que ça ne se passe pas comme ça ?’ N’essayez pas de décrocher un mot ou de déceler une quelconque émotion sur le visage de la part des autres musiciens, ces derniers resteront obstinément confinés dans leurs bulles musicales hermétiques. 

Deux heures de show, réparties en onze morceaux, où les Suédois vont faire passer les spectateurs par une foule de sentiments les plus variés : de la hargne à la tristesse, de l’exultation à la mélancolie, du rire à la naissance de larmes. Ces mecs sont des magiciens dont jaillissent de leurs instruments des nappes qui traversent le corps, le cœur, l’âme et l’esprit. Il suffit par exemple de se concentrer sur les réactions du public après l’interprétation de l’envoûtant et tendre « In My Time of Need » pour se rendre compte qu’ils ne suscitent pas qu’une réaction physiologique et pavlovienne de leurs spectateurs, mais bien la catharsis du panel d’émotions provoquées pendant les longues minutes de ce morceau. Certains s’embrassent, d’autres se surprennent à s’enlacer, le tout dans un silence et un respect quasiment religieux. À certains moments, on n’est sûrement pas très loin de l’expérience spirituelle. ‘Ce titre-ci est le morceau Heavy de la set list’, mime Åkerfeldt en roulant des épaules. Il est vrai qu’Opeth a, depuis ses vingt-six ans d’existence, pris quelques tournants abrupts, déstabilisant plus d’une fois ses fans. C’est ainsi que le vocaliste a notamment décidé, depuis 2011, d’abandonner ses growls et de laisser champ libre au vaste panel que peut emprunter sa voix claire. Une décision qui a valu des reproches au band, délaissant son étiquette ‘Death Metal’ pour embrasser une voie dite ‘prog’, aux origines aussi diverses que variées. Il n’empêche que le quintet continue toujours de puiser dans son ancien répertoire, des compos au cours desquelles la voix gutturale de Mikael fait trembler les murs, à l’instar du très sombre et violent « Heir Apparent », de « Demons of the Fall » ou encore de « The Drapery Falls ». Alors que classiquement, le réflexe aurait été de proposer une majorité de compositions issues du dernier elpee, Opeth s’est limité à deux plages, complétant le reste de la set list de pistes issues de ses différentes périodes, ravissant le fan d’hier comme celui d’aujourd’hui. ‘C’est quand même impressionnant que, malgré tous les changements apportés à notre musique, de voir que vous êtes toujours aussi nombreux à nous supporter. Merci à vous !’, s’exclame Åkerfeldt.

Cerise sur le gâteau émotionnel : c’est à l’issue de « Deliverance » (NDR : près de 15’, quand même) qu’Opeth prend congé de son auditoire. Une dernière pirouette de choix, s’il en fallait encore une, afin de convaincre les derniers réticents dans la salle. En prenant un peu de recul, il en résulte –mais avec le sourire !– quelque chose de frustrant : on sait pertinemment bien qu’on va se prendre une claque quand on se rend à un concert du groupe, mais, à chaque fois, on en oublie l’intensité.

Set list : Sorceress, Ghost of Perdition, Demon of the Fall, The Wilde Flowers, Face of Melinda, In My Time of Need, Cusp of Eternity, The Drapery Falls, Heir Apparent, The Grand Conjuration

Rappel : Deliverance

(Organisation : Live Nation + AB)

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