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Stéphane Reignier

Stéphane Reignier

samedi, 20 juillet 2024 15:53

Dour festival 2024 : samedi 20 juillet

Et de trois ! Troisième journée consécutive au festival de Dour !

Ce samedi 20 juillet ne fait pas exception à la règle ! Le soleil a définitivement posé ses valises. Il faut chaud ! Très chaud même ! Plus de 30 degrés ! Une fournaise ! Inutile de dire que la bière coule à flots !

Si les festivaliers affichaient un certain état de fraîcheur à leur arrivée sur le site, pas mal d’entre eux accusent aujourd’hui des corps fanés. Mascara et rouge aux lèvres ont perdu de leur éclat !

Au programme, des artistes plus accessibles pour le spectateur lambda. Ce qui explique pourquoi de nombreux quadras et quinquas ont décidé de franchir le pas, tandis que la jeunesse préfère rester cantonnée aux endroits dédiés à la techno, au drum&bass, au hip hop ou au rap, prédominant à Dour.

Sans perdre une minute, votre serviteur frappe à la porte de Jean-Paul Groove. Oui, vous avez bien lu ! Ne perdez pas votre temps en y cherchant une quelconque filiation avec l’acteur français, Jean-Paul Rouve, rendu populaire par le film « Podium ». Il n’y en a tout simplement pas !

Le combo baigne dans la musique électronique. L’intérêt ? Il ne la joue pas, il fait bien plus que ça, il la réinvente !

Nils Hilhorst, Denis Baeten et Jeremy Debuysschere ont suivi un cursus au conservatoire de jazz. De leur instrument organique, ils recréent les rythmes composés à la base par de la musique assistée par ordinateur. 

Inspiré par des artistes comme Prodigy ou Jojo Mayer, le trio est fier de présenter son nouveau-né, « Violent Party Music », un Ep cinq titres.

Le set se déroule dans ‘La petite maison dans la prairie’. Aucune trace de Charles Ingalls, sa femme Caroline, leurs trois filles Mary, Laura et Carrie ainsi que leur chien Jack !

Ces gaillards débordent d’énergie. Si le côté sonore est impressionnant, le show visuel l’est tout autant. Au mieux de sa forme, derrière ses fûts, Denis exécute de grands gestes, à l’image de certains Italiens.

Si le projet allie (forcément) groove, expérimentation et une combinaison millimétrée guitare/basse/batterie, l’esprit du live, entre punk et funk, le rend complètement sauvage. Aucun membre du band ne prend l’’ascendant sur l’autre, chacun trouvant sa place au sein de la formation. Sans doute que les nombreux effets y contribuent.

Cerise sur le gâteau, ces têtes brûlées jouent, semble-t-il, sans métronome. C’est spectaculaire et aussi fin qu’un string dans les fesses !

Jean-Paul Groove est à la musique électronique ce que Picasso est à la peinture. Il nous réserve une œuvre complexe, tout comme le jazz au sein duquel le combo a été bercé.

La main stage est prête à accueillir Puggy, un groupe belge réunissant le chanteur/guitariste Matthew Irons, le bassiste Romain Descampe et le batteur Egil ‘Ziggy’ Franzén.

Fondé en 2005 à Bruxelles, la formation propose une musique, fruit d’un mélange entre pop et rock acoustique, et le tout est teinté de légères mais remarquables influences latines.

Irons est loin d’être un inconnu. Il était membre du jury dans le télécrochet, ‘The Voice’, dans sa version belge.

La chaleur est telle que la seule petite zone d’ombre à front de scène est littéralement prise d’assaut. La plaine n’est pas encore bondée. Etrange pour un groupe qui jouit d’une telle notoriété !

Un calicot surplombe l’estrade, sur lequel est indiqué en grandes lettres ‘Puggy’ ; comme s’il était nécessaire de le rappeler.

Le chanteur est assez classieux, il porte une petite veste bleue et un t-shirt blanc, impeccablement repassés. Un bleu dominant pour célébrer la toute victoire récente du Mouvement Réformateur ?

La basse de Ziggy a bien bourlingué, elle porte sur elle l’usure du temps et des nombreux sets auxquels elle a dû faire face tout au long de ces années.

« Niver Give Up » ouvre les hostilités. Un titre de son nouvel Ep. De quoi mettre l’eau à la bouche. Alors que Matt cisèle les riffs, Romain frappe ses cordes avec acharnement, tandis que le troisième larron, veste en jeans sur le paletot, tambourine aussi fort qu’il le peut sur les nombreux fûts et cymbales dressés devant son corps raide comme un piquet. C’est énergique, c’est rock et c’est fun.

La furie gronde, le public s’exalte et très vite la sueur apparaît sur le front des musiciens.

Un climat grandiloquent envahit « To Wind The World », atmosphère amplifiée par les ivoires largement syncopés.

Irons troque sa gratte électrique pour sa semi-acoustique. C’est alors que « Lonely Town » prend son envol. Une compo aigre-douce, qui permet au chanteur de monter allègrement dans les aigus, tandis que le batteur s’amuse à jouer à contre-temps.

Matthew assène à qui veut bien l’entendre que le nouvel opus est cool. Et pour s’en convaincre, de même que ceux postés devant lui deux mètres plus bas, quoi de mieux que de proposer « Lost Child », une bien belle ballade aux accents nostalgiques. Et puisque Yseult manquait à l’appel, les deux musicos accompagnent le vocaliste dans un slow à l’unisson. Un moment suspendu, hors du temps.

Afin de garder le cap et l’attention des festivaliers (qui se sont soudainement pressés), « Last Day On Earth » permet aux percus de décoller, alors que les cordes de la basse sont mises à rude épreuve. Un morceau percutant, aux riffs singuliers et au solo tonitruant parfaitement maîtrisé par Irons lors du bridge, tandis que le batteur, perdant l’équilibre, manque de se prendre une gamelle. Le tout devant un parterre qui s’est arrêté net de jumper.

Après avoir fait le pitre, les zicos changent de registre. Matt reprend son rôle de préposé à la gratte semi-acoustique et entame, une seconde ballade dans une configuration atmosphérique. On se sent alors bercé par ce « How I Needed You ».

Un moment solennel ! La frontière entre l’estrade et la plaine disparaît au profit d’une communion où Dieu n’a d’égard que pour lui-même.

Plus construit, « Change The Colors » libère des sonorités pop/rock dansantes dignes de l’identité primaire du band. L’essai est convaincant dans son ensemble et si le mélange des couleurs est intéressant, gageons qu’elles ne s’estompent pas pour devenir tristement monochromes.

Le set prend doucement des allures de fin. « When You Know » constitue la pierre angulaire d’un show féérique, pugnace et solide comme un bloc de béton. Un titre qui permet de belles progressions au clavier, un solo de batterie comme jamais vu et une belle réciprocité entre un public réceptif et un groupe fédérateur.

Puggy a, une nouvelle fois, tenu ses promesses. Etendard de la scène belge, la formation qui détient les codes du succès, a proposé un set qui risque de résonner encore longtemps dans la tête des aficionados, la période du festival passée ! Une ode à la perfection ! La quintessence musicale !

Puggy marque Dour se son empreinte et s’inscrit décidément bien dans une puissante mouvance directionnelle

Petit crochet par le ‘Garage’, les déjantés de Gurriers vont y entamer leur show. Une belle surprise !

Une constatation, ils sont jeunes et bruyants. Dès les premières notes, les guitares vrombissent, la basse claque de manière syncopée et la caisse claire foudroie les tympans. Du rock, du vrai, enfin ! Des couilles, quoi !

Filiformes, les gars sont torses-nus, hormis le chanteur qui a conservé sa chemise bariolée à la Thomas Magnum (personnage célèbre de la série télévisée éponyme). Le bassiste porte une petite moustache qui lui confère un look très british.

Gurriers et guerriers, même combat ! Sur les planches, ils sont proches de l’affrontement. Une chose est sûre, ils sont turbulents. Les sonorités s’entrechoquent, fusent, éclatent. Ça gueule, ça fouette et ça fout une putain d’ambiance de feu.

Récemment encensé par ses compatriotes de Fontaines D.C, la formation livre un post punk au cours duquel les riffs déjantés sont légion.

Parfois, de légères oscillations parasites se manifestent par un sifflement. Elles appartiennent au concept hostile et foutraque de l’expression sonore. Si les compos abordent pour thèmes la violence et sa banalisation par les médias, le band les explore dans une légèreté qui sent bon l’été.

Malgré sa musique singulière et ses mélodies brutes, Gurriers se distingue par sa bestialité bon enfant. Dans le public, ça pogote. Les chopes se télescopent, la bière se déverse à chaque mouvement du corps, le tout dans une odeur de pisse insupportable.

La scène dublinoise est à nouveau en pleine effervescence. Et le jeune quintet marche allègrement sur les traces de Sprints, Basht., Melts, A Burial At Sea, Fears, Fontaine DC, Gilla Band, Inhaler, Murder Capital, Silverbacks et bien d’autres encore…

Zaho De Sagazan est de retour après avoir bercé les festivaliers du LaSemo une semaine plus tôt. Et le défi est de taille car si l’artiste avait été accueillie favorablement, le festival de Dour est un autre terrain de jeu, plus brut, plus amer et plus pugnace. 

Nombreux groupes ont, dans le passé, dû supporter les invectives et les jets d’objets les plus insolites, à l’instar de Patrick Juvet, BB Brunes ou encore Jo Lemaire dans les plus jeunes années du festival. Car ici, on aime ou on n’aime pas. Et quand on n’aime pas, c’est ‘straight to the point’. Ingratitude, quand tu nous tiens…

L’estrade est parsemée d’un tas d’instruments électroniques. Au vu de l’odeur nauséabonde qui règne ici, votre serviteur se plante à un endroit stratégique lui permettant de respirer par le nez ; la bouche ouverte, c’est pratique, mais la peur de gober une mouche est grande. L’intelligence au profit du pratique !

Zaho de Sagazan, est une auteure-compositrice-interprète et musicienne française. En mars 2023, elle publie son premier album, « La Symphonie des éclairs », et se forge rapidement une belle en notoriété.

En février 2024, elle est nommée dans cinq catégories de la 39ème cérémonie des Victoires de la musique, et elle remporte quatre prix, dont ceux de la chanson originale et de l'album de l’année.

Elle commence à diffuser des vidéos sur Instagram dès 2015. Elle s’y met en scène pour interpréter de nombreuses reprises et quelques compositions originales. En 2016, pour sa toute première scène, elle interprète « La Bonne Étoile » de -M- au théâtre Simone Veil de Saint-Nazaire lors du Concert Salade des ‘Irréductibles’ du lycée Aristide-Briand, auquel elle participera jusqu'en 2019

Le chapiteau est plein à craquer. Un bon signe !

Son curriculum vitae fait apparaître une participation dans l’émission de téléréalité ‘The Voice’. Décidément, ce show cathodique est une machine à tubes. On y fabrique des artistes comme des petits pains. Et pas toujours de qualité, malheureusement !

« Dis-Moi Que Tu M’aimes » met immédiatement un terme à ces doutes. Elle se confie, dans un français précis, sur ses désirs amoureux, appuyé par des oscillations aériennes et cosmiques, alors que les arrangements soignés, embrassent ci et là une onde électronique. La tristesse qui se dessine sur son visage décrit mieux que les mots, le spleen qui la transperce de part en part.

Alors qu’elle n’affiche que 24 ans, la jeune dame s’épanche lourdement, mais sobrement et efficacement, sur ses 10 ans de dépendance au cannabis dans « Aspiration », une chanson à texte dominée par l’électro, mais consolidée par les interventions de Rémy, Tom, Simon et Greg, plus que ses musiciens, ses amis, comme elle aime à le souligner.

Généreuse à souhait, elle invite les uns et les autres à prêter une oreille attentive à « Le Dernier Des Voyages », une nouvelle compo, sans doute annonciatrice de quelque chose de bien plus concret.

La demoiselle déclame sa poésie frénétique par des mots simples, mais qui ne sonnent jamais creux. Elle transforme sa fragilité en force tranquille et se démarque en imposant une version moderne de la ‘nouvelle’ chanson française. Elle dit n’avoir jamais connu l’amour véritable tout en étant tombée amoureuse d’un gars qu’elle n’a jamais vu. Démêler le vrai du faux serait incongru et sans intérêt. Autant se laisser bercer par le joli conte de fée dressé par « Mon Inconnu », et enchaîner par « Je Rêve », une composition qui chantée une fois, sera serinée inlassablement, dans l’hilarité générale.

Sagazan chante l'amour, parce que les chansons sont faites avant tout pour cela. Il est universel et dépasse les frontières. Depuis toujours, ce sentiment impalpable, incolore et inodore, accompagne les hommes et les femmes. Son piano l’exorcise de ses démons sur « Tristesse ».

Sa poésie est délicate, les mots sont doux. Elle est fragile et timide à la fois, mais, à travers son répertoire, elle démontre qu’elle sait ce qu’elle veut.

Elle entraîne l’auditoire, dans son univers feutré, lentement, progressivement. La foule écoute et savoure, religieusement. Et lorsque « La Symphonie Des Eclairs » retentit (premier album studio de la chanteuse), c’est l’explosion ! Son interprétation grave lui confère quelque chose de théâtral. Le public devient acteur et spectateur. Il vénère l’artiste comme un Dieu.

Et quand la tempête s’apaise, l’orage prend le relais et gronde tout au long de « Ne Te regarde Pas », une compo où l’électronique reprend le contrôle d’un spectacle éclair. Une heure de show, c’est largement insuffisant pour un spectacle de cette ampleur.

Alors que la tentation de tourner les talons et de retrouver les coulisses est grande, Zaho s’émancipe en osant une reprise exceptionnelle et personnelle d’un titre du regretté David Bowie, « Modern Love ».

L’artiste a évidemment mis le feu. Elle est acclamée par les milliers de spectateurs qui se sont rassemblés au sein de cet espace confiné.

Le set prend fin par une danse de sioux, lors d’une improvisation totale. ZdS y invite tous ceux qui l’entourent. Autant dire que rarement une fin de concert aura été si joyeuse !

Elle quitte tristement ses invités, tout en précisant que Dour est le meilleur festival au monde. En tout cas, si ce n’est le meilleur, il figure parmi les plus insolites.

Et de crier une dernière fois le Douuuurrrreeeuuuuuuuhhhhhh repris par le public en cœur.

Une avant-dernière journée placée sous le signe de la bonne humeur et de la découverte. La météo, que l’on avant annoncée capricieuse, est restée clémente ; et la chaleur a réchauffé les corps autant que les cœurs.

Est-ce que le 21 juillet, devenu proverbial pour sa drache nationale, fera exception ? Wait and see. A demain !

(Organisation : Dour festival)

 

 

 

 

 

 

 

vendredi, 19 juillet 2024 19:29

Dour festival 2024 : vendredi 19 juillet

Sur la plaine de festival de Dour, la météo a de nouveau changé de visage. Aujourd’hui, il fait vraiment très (trop) chaud. Une horreur ! Pas un pet d’air à l’horizon, alors que les scènes sont situées dans un couloir de vents, d’où la présence de ces éoliennes démesurées qui attisent la curiosité des uns et des autres.

Et comme Dour rime avec démesure, bon nombre de filles se promènent en sous-tif. Y en avait des nichons ! Et à l’instar du « Zizi » de Pierre Perret, parmi les ‘lolos’, il y avait les vrais, les faux, les laids, les beaux, les durs et les mous…

Comme la fin de semaine est propice au relâchement, la foule s’est évidemment pressée pour fêter dignement le début du week-end.

Autant y aller tout de go, la programmation de ce vendredi est plutôt mollassonne, car la plupart des scènes sont consacrées soit au rap, au hip hop ou encore à la musique électronique.

Il faudra attendre samedi et dimanche pour espérer davantage de rock, un style qui plaira à une large frange de public, encore minoritaire pour l’instant. Il en faut pour tous les goûts, paraît-il !

Donc, à défaut de têtes d’affiches alléchantes, votre serviteur se laisse guider par son intuition. Il se plante donc devant la main stage, baptisée ‘Arena’. Elle est située à une encablure du VIP. Un endroit réservé à une élite, mais le plus consternant, c’est que la plupart de ceux qui s’y cantonnent, ne s’aventurent même pas sur le terrain. On ne mélange pas les genres, hein !

Dour, ce n’est pas la brousse, quand même ! D’accord, il est vrai qu’on risque d’y rencontrer aussi bien la faune, et notamment ces festivaliers aux accoutrements dignes d’un carnaval ou de la Gay pride, que la flore, au gré de ces odeurs qui vous titillent les narines mais ne ressemblent pas aux bâtons de santon.

Très objectivement, caricaturer ce festival à ces seuls descriptifs serait réducteur. Car le DF est bien plus que ça, n’en déplaise à ses détracteurs ! C’est surtout l’endroit rêvé dédié à l’underground, un lieu où il fait bon vivre et où on peut espérer un lâcher-prise réel dans ce monde de brutes et aseptisé. Et par les temps qui courent, c’est un véritable luxe.

Les gens se sont massés en nombre pour Skepta. Manifestement, il attise la curiosité. Et puis, le soleil s’est caché derrière l’immense structure scénique et procure une ombre salvatrice. Et croyez-en l’expérience d’un vieux de la vieille comme votre serviteur, elle devient vite une richesse au même titre que l’eau.

Une rapide consultation sur le line-up du site internet du festival (très bien conçu du reste), renseigne que le gars est un rappeur. Un de plus ! Un de trop ! Que faire ? Prendre ses jambes à son coup ? A quoi, bon, les autres scènes ne proposent pas mieux !

La curiosité est quand même de mise car, si Skepta baigne dans un truc mille fois entendu, singularité, il s’exprime en anglais.

L’artiste connaît bien ce festival pour s’y être déjà produit en 2016. Un habitué des lieux, donc.

A l’époque, il avait assuré sa prestation dans la Boombox. Bénéficier de la grande scène démontre que d’artiste en devenir, il obtient aujourd’hui le statut de chanteur confirmé.

Votre serviteur est entouré de jeunes de moins de 20 ans qui le regardent comme un extraterrestre. Un de ceux-là vient même le questionner sur son âge. Un comble alors qu’il est coiffé d’une casquette identique !

De son vrai nom Joseph Junior Adenuga, c’est un rappeur, certes, mais aussi producteur de musique britannique originaire du Nigeria. Il est le frère du musicien J.M.E (Jamie Adenuga) et de la présentatrice de radio Julie Adenuga.

Il a fondé le collectif Meridian Crew, nommé ainsi pour rendre hommage à la rue où il vivait dans le quartier de Tottenham. Il a bossé en compagnie d’artistes d’horizons divers (Blood Orange, Earl Sweatshirt, Ratking et même Idris Elba). Il sort son premier elpee (un best of !) « Greatest Hits » en 2007 et « Microphone Champion », en 2009, comme indépendant. Son troisième opus studio, « Doin' It Again », paraît en 2011 sur le label AATW qui l’a signé. C’est grâce à son quatrième long playing, « Konnichiwa », gravé en 2016, qu’il décroche son plus gros succès, et remporte le Mercury Prize.

Il propose un show bien rythmé enrichi de projections d’images qui soulignent la gravité des propos.

Contrairement à pas mal d’homologues de sa génération, il n’y pas d’exagération, ni dans les gestes, ni dans le discours, évitant ainsi bien des retours de flammes. Un concert, moins impénétrable et donc plus abordable !

L’homme est, comme souvent dans ce style musical, accompagné d’un collaborateur qui se charge des platines. Affichant une sincérité à toute épreuve, c’est un pionnier du grime, un rap au bpm très rapide. La sono crache des sonorités qui incitent la foule à danser.

Ses productions brutes, sombres et convulsives sont portées par un flow musclé. On le sent tantôt revanchard, tantôt résigné face aux défis et vicissitudes de la vie.

Une chose est sûre, il sait parfaitement compter jusque trois. Une démonstration : ses compositions commencent toujours par un ‘One, two, three’. Skepta adepte des mathématiques ? Il n’y a qu’un pas que l’on n’oserait franchir !

Direction le ‘Garage’, haut lieu emblématique des fans de guitare, basse et batterie. D’un pas pressé, votre serviteur arrive sur le site en quelques minutes seulement, tel un marathonien aux jeux Olympiques. A défaut de trophée, il espère un concert de bonne facture.

L’auditoire est majoritairement constitué de mecs aux gros bras tatoués. Vu son mètre soixante-sept et ses soixante-huit kilos, votre serviteur a donc tout intérêt à ne pas la ramener, sans quoi il risque de prendre une beigne.

Quoique, parmi les spectateurs, un gamin d’à peine trois ou quatre ans titube sur le sable qui recouvre le sol. S’il me cherche, lui au moins, je peux le castagner ! A ses côtés, un homme marche difficilement également. Mais lui, précisément, ce sont les effets de l’alcool. Il a bien raison le gaillard, l’eau ça rouille !

Originaire de Lille, dans le Nord de la France, Oddism sort son premier Ep en 2014. Autoproduit, il s’intitule « The Odd One ».

S’il épouse à ses débuts du post-hardcore, sa musique vire ensuite au mathcore (« Dance In the Maze »).

Dès les premières secondes, les envolées lyriques du gars préposé au chant défoncent les tympans. Il vocifère, hurle. Très franchement, on dirait qu’il est en train de vomir et de proférer : ‘Raoul, le cri qui dessaoule’.

Si la formation donne l’impression de jouer n'importe quoi, n'importe comment, c’est évidemment un leurre. Parce qu’effectivement, ses structures musicales sont complexes et les riffs recherchés. En outre, la rythmique frénétique du préposé aux fûts détonne par rapport à son jeu de double pédale à la grosse caisse. C’est aiguisé comme une lame de rasoir et fin comme une tranche de jambon.

Un genre déjà exploré. Mais à contre-courant de ce que votre serviteur écoute le plus souvent. L’expression sonore oscille du rock à la pop, en passant par le post-rock, la dream-pop ou encore le shoegaze.

Bref, il se sent aussi seul qu’un cheveu sur la langue. Ne s’agit-il pas tout simplement de l’application ‘bête et méchante’ de la vieille méthode d’apprentissage de la vie, l’essai-erreur, caractérisé par des essais divers qui sont continués jusqu'au succès de la recherche ou jusqu'à ce que le testeur arrête sa recherche ?

L’estrade devient une arène où des joutes d’un autre siècle se jouent, chacun exécutant une danse étrange en effectuant des mouvements de tête allant du bas vers le haut. Si les cheveux n’y sont plus, les longues barbes font l’affaire. Le paon ne fait-il pas la roue pour attirer les femelles pendant la période de reproduction ? Qu’il danse en faisant bouger ses plumes de façon qu'elles reflètent la lumière, rendant ainsi ses couleurs d'autant plus visibles ? Ici, pareil, mais à défaut de queues (quoi que !), y a la barbouze.

Bref, Oddism propose ici un genre explosif, tonitruant, imprévisible et d’une puissance sidérale.

Préférant le ‘Garage’ à toute autre scène, votre serviteur reste planqué comme un piquet de béton ancré dans le sol pour y voir et écouter Billy Nomates.

Elle est née et a grandi dans l'agglomération de Leicester, et a milité au sein de nombreux groupes.

Un concert de Sleaford Mods auquel elle assiste en 2019 lui donne l'élan nécessaire pour se lancer dans une carrière solo.

Elle publie son premier elpee –un éponyme– en août 2020. Pour y parvenir, elle a reçu le concours de Geoff Barrow. Un Ep baptisé « Emergency Telephone » est publié en 2021. La même année elle chante sur un titre de l'elpee de Sleaford Mods, « Spare Ribs ». Enfin, en 2023 elle écrit et produit elle-même son deuxième long playing, « Cacti ».

Elle est loin d’attirer la foule. Restons positifs, regardons le verre à moitié plein, plutôt qu’à moitié vide !

Elle est blonde et arbore une crinière de lionne. Elle se présente seule sur les planches. Ses musicos sont-ils morts de soif ? Elle a juste opté pour cette configuration, son seul support reposant sur une bande-son. Quel dommage ! L’intérêt d’un concert est bien sûr musical, mais aussi et surtout visuel. Autant écouter des disques alors !

Même la principale intéressée n’est pas surprise de constater que ses fidèles se ne sont pas donné rendez-vous. C’est dire ! Les complotistes y verront un rapport de force, ‘No mates’ signifiant ‘qui n’a pas d’amis’. Ah, mais bien sûr !

La blondasse nous accorde donc une prestation en playback. Ou comment Billy Nomates devient l’antithèse d’un concert de rock ou de punk.

Pourtant, faisant d’une faiblesse une qualité, la jeune demoiselle prendra le contre-pied en proposant un set étrangement énergique. Au programme de ce soir : danse, sauts et autres numéros dignes d’une saltimbanque. A pieds nus ! Faut se préserver, arrivé à un certain âge, paraît-il !

La voix de Billy est sauvage. Elle invite au voyage à travers les contrées sauvages, alors même que les thématiques abordées relèvent plutôt de la franche dépression. Peut-être que ses cabrioles sans chaussures ni chaussettes permettent d’exorciser de vieux démons, à l’instar de « Saboteur forcefield », un morceau un peu mou du genou ou encore « Blue Bones » et son envie de bien faire.

Se servant de sonorités dance, rock et rap, elle est parvenue à faire la différence à l’aide du peu de moyens dont elle disposait. La recette ? Un charisme évident et une énergie folle !

Dernier retour vers la main stage pour ce soir. Kaaris y est programmé. Surprise… c’est un rappeur !

Décidément, vu le nombre de concerts de rap auquel votre serviteur a assisté, il va devenir champion de la fine lamelle d’Emmental.

Le gars fédère visiblement ; la plaine est blindée de people. Et casquette vissée sur la tête, pardi !

De son véritable nom Armand Gnakouri Okou, ce Français est également parolier et producteur. En 2013, il publie « Or noir », produit par Therapy Music. L'album connaît un tel succès que l'artiste le réédite. Il est considéré comme le rappeur qui a popularisé la trap en France. Sa tournée est directement inspirée de cet elpee. Il vient y fêter ses 10 ans.

Dans le milieu, il est préférable de baptiser un disque « Or noir » plutôt qu’« Or dure », y a moins de risque de se faire censurer.

Le gars est black de chez black ! Comme s’il sortait de la mine (NDLR : en 1935, Dour constituait l'un des centres miniers les plus importants, en Belgique, et le dernier charbonnage a fermé définitivement ses portes en 1961).

Et avant d’entamer son concert, on sent qu’il est chaud-boulette. Mais la comparaison s’arrête là, votre serviteur souhaitant éviter le même procès d’intention que le ‘Sauvage’, personnage emblématique de la ducasse d’Ath.

Le gars n’échappe pas à la règle. Ses textes sont incisifs et dénoncent tout un tas de vieux combats, passant de l’hymne anti-police, à la culture de la guerre (« Kalash Criminel »). Son phrasé, c’est une ligne dialectale usitée par tous les banlieusards.

Kaaris ne s’est probablement pas plongé, au cours de son enfance, dans la littérature raffinée respectueuse des règles orthographiques et grammaticales, usant et abusant dans d’une de ses compos (« Zoo ») de ‘strings et de chattes’. Peut-être, dispose-t-il de prédispositions vétérinaires ?

Sur un autre morceau il rend un bel hommage à Shannen Doherty, rendue populaire dans Beverly 90210, où il s’exclame ‘J'encule Brandon et Dylan’. Si ça, c’est pas sympa !?

Un artiste qui aime aussi de grands noms de la poésie française, comme Verlaine ou Baudelaire lorsqu’il chante « Ciroc » (‘J'crois qu'y'a assez d'place dans ton cul pour y mettre ma bouteille de Ciroc/Tu sors avec le string sur les beuj', on rentre avec un 100 meujs’).

L’artiste prodigue un rap trap, genre musical issu du hip-hop sudiste, qui a émergé au début des années 2000 dans le sud des États-Unis. Un style qui se caractérise par son contenu lyrique et un son particulier, lié notamment à l'utilisation importante du kick de la boîte à rythmes.

Votre serviteur, devenu soudain marginal autour de la bande animale, se met à utiliser les poncifs des milliers de personnes présentes, pouce et auriculaire relevé et balancement du bras droit, avec la palette vissée vers l’arrière svp. Manque plus que la chemise ouverte et la chaîne en or qui brille.

A cause de ses textes irrigués par la violence et les outrances, Kaaris a tout récemment fait l’objet d’une plainte pour homophobie : ‘Si ces pédés crament au napalm, j’veux la palme’. Des paroles qui relèvent de l’injure et d’incitations publiques à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe de personnes à raison de leur orientation sexuelle.

Une compo qui ne provoque ni haine, ni colère à Dour, car l’auditoire est, semble-t-il, habitué, depuis de nombreuses années, à ce type de discours. Le personnage est fantasque, plutôt drôle, et tombe dans une facilité et mièvrerie déconcertante. Comme dirait l’autre, ‘il est gentil !’, une manière détournée de qualifier un idiot de première catégorie.

En acceptant cet artiste en terre Sainte, le DF ne devient-il pas le complice d’un comportement et de paroles borderline ?

La nuit s’est installée, la lune éclaire distinctement la plaine du festival, encore pleine à craquer. Ne dit-on pas que les loups chassent la nuit ? Les Kassos se sont en effet donné rendez-vous pour faire la fête. La bière coule à flots. Votre serviteur file tout droit au VIP, afin de prendre un peu de recul.

Demain est un autre jour !

(Organisation : Dour festival)

 

 

jeudi, 18 juillet 2024 20:09

Dour festival 2024 : jeudi 18 juillet

C’était en 1989. Votre serviteur venait de fêter ses 16 printemps ; et il foulait la plaine du premier festival de Dour. A l’époque, une seule scène, une poignée d’artistes, mais déjà une tête d’affiche de qualité en la personne de Bernard Lavilliers.

De festivalier lambda, votre serviteur est donc chargé de vous imprégner de cette ambiance que l’on ne retrouve nulle part ailleurs. Le Belgique n’est-elle pas perçue comme le terrain du surréalisme par excellence ?

Les événements ont bien changé depuis. S’il y a 35 ans, on bricolait comme on pouvait, le festival de Dour est devenu une véritable machine industrielle se déroulant pendant cinq jours, sur huit scènes, accueillant 230 artistes et attirant 250 000 personnes. Sans oublier ces géantes éoliennes disséminées un peu partout qui, à défaut de procurer de l’ombre, amusent le peuple.

On vient à Dour, plus pour la rigolade et la bonne humeur, que pour ses têtes d’affiches. La découverte est le leitmotiv du DF. Et si depuis quelque temps, on couvrait davantage la musique électronique, le hip hop et le rap, les organisateurs, sous l’impulsion de vieux briscards, ont remis en œuvre une scène dédiée au rock, dans son prisme le plus obtus. Ce lieu, devenu emblématique, est le bien nommé ‘Garage’.

Outre ‘The Last Arena’, la plus grande scène qui peut accueillir 20 000 âmes, ‘De Balzaal’ consacrée à la musique électronique, la ‘Boombox’, qui fait la part belle au hip-hop, à la musique soul, au r’n’b et au swing, il reste ‘La Petite Maison dans la Prairie’ destinée aux fans de musique indie. On a fait le tour du propriétaire…

Hormis la main stage, pratiquement toutes les autres sont couvertes. Et comme la Belgique est un pays de drache nationale, chacun y trouvera son compte.

Alors que votre serviteur couvrait le LaSemo, la semaine dernière, un festival où il était de bon ton de croiser des enfants, un conseil : laissez-les à la maison ou confiez-les à votre baby-sitter, sans quoi ils risquent d’être traumatisés à la vue des festivaliers de Dour, qui sont, à quelques exceptions près (comme votre serviteur), le plus souvent exubérants.

Le festival a réellement commencé la veille, mais dans une version light, les artistes se cantonnant seulement à divers endroits. Avez-vous déjà vu un cycliste se décarcasser au Tour de France dès les premiers coups de pédale ? Non ! Ici, c’est pareil, mollo-mollo !

Pas de quoi laisser de souvenirs inoubliables, ce jeudi. Tel un aventurier, sac à dos, gourde à portée de main et chaussures de marche aux pieds, votre serviteur vogue de scènes en scène tout en s’exclamant Douuuurreuuuhhhhhh, seul comme un con. Un passage obligé, sans quoi il risquerait de passer pour un marginal.

Le festival doit vivre et survivre. Mais les prix affichés sont exagérés. Une pinte, c’est 3,50€. Et pourtant, elle a le goût de la pisse. Même chose pour la bouffe. Autant se mettre à quatre pattes et brouter l’herbe, il y en a à foison. Même si ça ne durera pas !

Première tour de piste avec Dinos. Il se produit sur la main stage. C’est un rappeur. Le black est bâti comme une armoire à glace et possède des paluches impressionnantes. On dirait des péniches.

Né Jules Jomby, il originaire de La Courneuve, en Seine-Saint-Denis.

A seulement 21 berges, il possède déjà toute l’assurance requise des grands noms. Grâce à son premier projet, Thumbs Up, monté en 2011, il commence à se faire un nom dans la famille des rappeurs.

Pas certain que le gars chante très juste, sa voix empruntant les effets de l’autotune, un plugin correcteur de hauteur sonore (son, note) permettant de faire croire que l’on chante juste. Ce branquignole baratine son monde. Pour la petite histoire, en novembre 1998, la chanteuse américaine Cher s’illustre par une utilisation spectaculaire de l'autotune, appliqué à sa voix sur la chanson « Believe ». Mais, Cher avait naturellement de la voix…

A l’aide de titres percutants (on sait maintenant pourquoi Dinos s’est longtemps appelé ‘Punchlinovic’) comme ce « Placebo, une chanson dans laquelle il se convainc de s’être soigné d’un amour déchu, tout en cachant son chagrin, le gamin assure comme un chef.

Bravant sa « Paranoïaque », il balance pléthore d’insultes au public (NDR : dont ‘fils de pute’). Mais, c’est pour la bonne cause. On le pardonne donc. Et puis aussi, quelque part, ça fait partie du jeu !

On retiendra les spectaculaires colonnes de feu dispersées de part et d’autre de l’estrade et des compos, quelquefois hasardeuses, mais sincères à l’image de « No Love » ou encore du touchant « Helsinki ».

Dinos, un artiste en or (DinosOr) ?

Au Garage, au loin, retentit le bruit d’une caisse claire. Fallait quasiment une boussole pour s’y rendre, le site ayant été revu à la hausse par rapport à son antédiluvien qui le précédait. Avant, il y avait des repères, comme ces arbres au niveau de l’étranglement de deux sites, mais ici rien, si ce n’est un horizon sans fin. En chemin, un spectateur portant un t-shirt à l’effigie d’Arctic Monkeys se presse. Plus de doute, c’est la bonne direction.

C’est DITZ, un band issu de Brighton, qui s’y produit. Le lieu est jonché de sable au sol, ce qui lui donne un petit côté (f)estival. Une sacrée bonne idée. De nombreux spectateurs s’y sont allongés, non pas le cigare en main, mais une tigette moins épaisse dégageant cette odeur caractéristique de sapin.

Après quelques minutes, deux certitudes. D’abord sous un angle musical, aucune révolution au programme. La seconde, et c’est sans doute la raison pour laquelle on est tenté de rester, chope à la main, c’est le bordel monstre que le combo fout.  

Son truc, c’est le rock post-punk avant-gardiste influencé par le post-hardcore et le noise rock des années 80 et 90. Et en agissant un max sur les pédales d’effets,

Le leader, visage androgyne, porte un petit top et une jupette. Un genre qui permet de voir de belles guibolles épilées. Le drummer frappe ses fûts frénétiquement. A chaque levée de bras, une odeur nauséabonde se propage dans les narines de ceux pressés au crash.

La combinaison basse/batterie permet aux compositions d’embrasser de belles couleurs. Le vocaliste surjoue parfois, mais l’esprit est tel, que ses singeries sont bien accueillies dans le public.

La filiation avec ses homologues britanniques Psychotic Monks n’est pas fortuite. Après avoir assuré les premières parties de Turnstile et d’IDLES, on se souviendra longtemps de l’énergie dégagée par le chanteur, où, debout, soutenu par les mains du public, il saute au sein de la foule, telle une gazelle, fuyant le lion dans la savane.

Avez-vous déjà eu cette sensation de faim qui vous tenaille et devoir ingurgiter quelque chose que vous n’aimiez pas ? Une métaphore qui colle bien à Caballero & JeanJass.

Le plus grand des deux a enfilé une tenue rouge ressemblant à celle d’un Playmobil. Ou plutôt d’un Playmo(débile).

Le temps de cerner ces porte-drapeaux de la scène hip-hop noir-jaune-rouge, que le public s’est pressé en masse miraculeusement. Il y a des Belges évidemment, mais aussi autant de représentants d’outre-Quiévrain. Les deux gusses ont une sacrée tchatche.

Leur différence de taille fait penser à Laurel et Hardy. Et comme eux, l’humeur communicative est au rendez-vous.

Le DJ aux platines, un compagnon de route, s’amuse visiblement. Il est chargé d’insuffler les bandes-son, à charge pour les autres de les habiller avec un flot de paroles, pas toujours compréhensibles. L’ambiance y est. Même le gars planté en chaise roulante depuis près de 30 minutes, s’est levé d’un coup sec pour danser. Dire qu’il y en a qui perdent leur temps à Lourdes dans l’espoir d’un miracle. Lourdes et Dour, même combat !

On ne peut pas dire que le combo s’essaie dans la prose poétique, à l’instar de Verlaine ou de Rimbaud, dans son « Dégeulasse » (‘Est-c'que tout l'monde a vu c'que j'ai vu aux infos ?/Ouais, c'est dégueulasse. C'est qui le connard qu'a pissé sur la planche ?/Ouais, c'est dégueulasse/Si c'est toi, j'espère que tu t'es lavé les mains/Sinon c'est dégueulasse/Attends mais quand j'y pense, tu m'as serré la pince/Et ça c'est dégueulasse’). Magnifique, non ?

Pour clôturer cette première salve, le tour music de votre serviteur s’arrête à la Main stage. La boucle est ainsi bouclée.

James Blake s’y présente aux côtés de deux autres comparses. Il se plante à droite du podium. Pour la circonstance, il est chargé de bercer les morceaux de sa voix d’outre-tombe. A l’extrême gauche, un autre préposé s’est posté derrière des claviers et machines en tous genres, alors que le centre est réservé au percussionniste, entouré de ses cymbales aussi diverses que variées.

JB produit une musique tentée d’électronique à partir de seuls instruments organiques. D’où la curiosité de bon nombre.

Né en 1988 à Londres, Blake est un auteur-compositeur-interprète, multi-instrumentiste et producteur britannique. Au cours de sa carrière, il a contribué au travail de production d'artistes tels que Kendrick Lamar, Beyoncé, Jay-Z, Rosalía, Frank Ocean ou Travis Scott. Il a également remporté un Mercury Prize après deux nominations, un Grammy Award après sept nominations, et a été cité à trois reprises aux Brit Awards.

Affublé d’une veste au col Mao, sombre, il assène, de ses ivoires, une musique qui pourrait s’apparenter à la bande son d’un film spaghetti. La Fender, quant à elle, et ses effets, lui assène un côté chill, alors que le drummer insuffle cette dose d’énergie salvatrice. Bref, un mélange osé, mais cohérent et surtout qui tient sur la route.

Alors que « Say What You Will » tient ses promesses, le set prend doucement des allures de fin. Une prestation impeccable et digne de ce nom.

Au terme d’une première journée marquée par la chaleur, cette nouvelle édition du festival de Dour, commence sous des auspices audacieux qui attisent la curiosité.

Le soleil, lui aussi, tire doucement sa révérence. La lune s’est invitée sur le plateau. Les étoiles brillent par milliers, tout comme celles présentes dans les yeux des aficionados…

A demain !

(Organisation : Dour festival)

dimanche, 14 juillet 2024 18:47

LaSemo 2024 : dimanche 14 juillet

Clap de fin pour cette 16ème édition du LaSemo !

Le soleil est de la partie. Ses rayons lèchent allègrement la peau des festivaliers qui, pour le coup, se baladent en t-shirts, s’enduisent de crème solaire et portent des lunettes… sur la tête. Comme quoi, la météo est décidément capricieuse…

Ce dimanche, la programmation s’adresse à un auditoire plus averti, puisqu’elle propose, notamment, les déjantés Dionysos et la chanteuse, guitariste, poète, écrivaine, artiste-peintre et photographe. Patti Smith.

D’un pas pressé, votre serviteur parvient à se frayer un chemin au cœur de la foule, dans l’espoir d’assister au set d’un gars bien de chez nous. Saule ! Il a déjà commencé sa prestation, car les horaires doivent impérativement être respectés. Qu’à cela ne tienne !

Le gaillard à l’explosion capillaire ébouriffante est bâti comme un roc(k). Et il connait relativement bien l’endroit puisqu’il n’en est pas à son coup d’essai. Certains se souviendront de sa prestation spontanée, accordée l’année dernière, alors que la pluie avait contraint une partie des festivaliers à s’abriter.

Baptiste Lalieu, de son vrai nom, s’est imposé auprès du grand public grâce à « Dusty Men », un titre qu’il interprétait en compagnie de Charlie Winston, en 2012. Il le reprend d’ailleurs. Mais pour la circonstance, le Britannique est ici remplacé par le guitariste qui endosse impeccablement ce rôle. Résultat différent, mais plaisir intense identique.

La main de Baptiste est bandée. Impossible pour lui de gratter ses cordes. Son organe vocal est cependant opérationnel.

« Marta Danse » met tout le monde d’accord. Sublime, cette chanson narre l’histoire d'une vieille dame, Marta Gonzalez, atteinte de la maladie Alzheimer qui, à l'écoute du ‘Lac des cygnes’, se remémore les gestes qu'elle effectuait autrefois. Une compo poignante et morose, mais tellement positive. L’une des plus jolie de l’elpee « Dare Dare », paru en 2021.

La machine fonctionne parfaitement. Le Montois poursuit son petit bonhomme de chemin en attaquant le frais et sautillant « Et pourtant je marche » ainsi que « L’homme sans », nouvelle compo jouée pour la première fois, la veille, en live.

Saule est un « Type normal » qui voue un réel amour à la chanson française tout en se montrant rigoureux dans la formulation et ce même quand il jongle avec les doubles sens à la Antoine Hénaut, un autre artiste bien de chez nous.

Comme la plaine regorge de vieux briscards, dont votre serviteur, l’artiste se sent obligé de réserver quelques morceaux aux vétérans, comme « Minimum », issu du premier opus ou encore « Le boss ».  Un titre qui rappelle combien le respect est important vis-à-vis de la ligne hiérarchique (‘T'es qu'un con qui s'ignore/J'ai raison et t'as tort/Et je suis ton patron/Sans moi plus de pognon’). Bref, une belle maxime à garder pour soi !

L’artiste livre une prestation durant laquelle, on passe du rire aux larmes (de bonheur) sur fond de chansons festives et épicuriennes, à l’instar de son auteur. Des chansons qui recèlent parfois une ombre, mais sont remplies d’enthousiasme et de joie de vivre.

Saule s’offre un concert rare, audacieux, unique et classieux. Et de rappeler qu’en octobre 2024, il célèbrera deux décennies d’une carrière exceptionnelle aux côtés d'invités tels que Cali, Alice on The Roof et son comparse de toujours, Charlie Winston !

Et comme vingt années d’une créativité débordante méritent une célébration à la hauteur de son talent, le choix du Cirque Royal pour cet événement s’est imposé naturellement. Un lieu de spectacle à Bruxelles, connu pour son atmosphère chaleureuse et son acoustique exceptionnelle, soit un cadre idéal pour une soirée pleine d'émotions et de souvenirs au cours de laquelle l’artiste revisitera ses plus grands succès. Un concert qui marquera également le lancement d'une nouvelle ère pour Saule, préparant le terrain pour un opus acoustique et la sortie de son prochain long playing, prévu début 2025.

Alors que le live s’achève doucement, une invitée de marque grimpe sur les planches. Il s’agit de Lovelace, une artiste bruxelloise qui appartient à la nouvelle scène pop alternative, rencontrée lors d’un atelier d’écriture qu’il animait. Ils chantent en duo, « Petite Gueule », une véritable bombe. Les voix s’accordent à merveille.

De ses débuts prometteurs à aujourd’hui, Saule a franchi bien des caps, su toucher les cœurs et transcender les frontières musicales.

Alors qu’il lui restait encore quelques minutes, son micro s’est soudainement coupé. Une manière abrupte de mettre fin à un concert d’une énergie rare.

Quoi de plus normal d’assister au concert de… Pomme lorsqu’on a une faim de loup ?

Le peuple s’est rassemblé en masse. Le podium est couvert de champignons. Des petits, des grands et de toutes les couleurs. De quoi se remémorer la comptine de Billy Ze Kick, « Mangez-moi, mangez-moi »,

Après avoir joué à guichets fermés à Forest National et tourné aux Etats-Unis, Pomme termine sa tournée ici.

Elle se présente, menue et très fragile à la fois, dans une tenue plutôt classique. Elle annonce d’emblée qu’elle risque d’interpréter des chansons tristes alors que c’est l’heure de la sieste. Et elle ne s’est pas trompée puisque le spleen la traverse de part en part dans chacune de ses compositions. Elle avoue avoir déjà versé 1 000 000 de larmes.

Sa musique est effectivement vulnérable. A cause de ses fréquents accents nostalgiques. Son mal-être est évident, à l’instar de « Paroles » ou lorsqu’elle aborde l’anorexie dont elle semble encore atteinte au vu de sa silhouette.

Elle revêt une casquette militante lorsqu’elle aborde de grands sujets sociétaux comme le féminisme, les minorités sexuelles ou encore la xénophobie. Et ça marche, surtout chez celles et ceux –et ils sont nombreux– qui ont vécu cette expérience.

Claire Pommet, à l’état-civil, nous réserve un show sympa, mais plombant sur la distance. Son registre finit par plonger les plus optimistes dans une profonde dépression.

Elle tient en main un petit bout de plastique. Elle explique à celles et ceux nés au cours de ce millénaire que ce drôle d’objet s’appelle ‘appareil photo jetable’, un truc complètement obsolète de nos jours. Le but de la manœuvre est de faire passer cet engin dans le public pour récolter un maximum (27 exactement) de souvenirs de cette tournée.

Petit détour à la Guingette. L’invité attitré, Cédric Gervy ou plutôt Cédric et ses Gervy, s’y produi(t)sent. Le bonhomme y a convié ses amis de longue date. Sa fidèle mascotte, une espèce de peluche déglinguée, est de la partie également.

Le gars est présent depuis le début de l’aventure. Alors qu’il est enseignant dans la vie professionnelle, sur les planches, il devient l’amuseur public préféré des festivaliers.

Le set est osé, bien percutant. Sincèrement, on vient voir ce gars, non pas pour ses performances vocales (qu’il n’a pas) ou le prisme philosophique de ses textes (c’est effectivement discutable), mais bien parce que Gervy est considéré comme le Lucky Luke de la vanne et du bon mot.

Autant dire que ses concerts sont synonymes de franche rigolade (« George est content », « « Que c'est chiant le reggae », etc.) C’est une thérapie contre la morosité ambiante à lui tout seul. Ça change de l’autre Pomme pourrie !

Bon allez Cédric, ‘Bonne année quand même et à l’année prochaine !’ ?

Retour au Château pour le tant attendu concert de Patti Smith. De passage au LaSemo Festival, l’icône de 77 ans a, sans doute, celle qui a marqué les esprits, tant en ce qui concerne sa posture que sa musique.

Grisonnante, osant deux belles nattes qui lui drapent le visage, elle fixe le public au loin et s’écrie ‘ Are you angry ?’, afin de vérifier s’il est en phase avec elle.

Elle entame son set très calmement par le brillantissime « Summer Cannibals ». Sa détermination est sans limite. « Redondo Beach » et sa rythmique syncopée précipite la foule dans un climat reggae, alors que « Cash » et ses contours rock and roll, font de cette artiste, une femme pleine de surprises. Sa voix est plus rauque qu’à ses débuts ; une caractéristique qui lui va à ravir et accentue la gravité de ses compositions.

Ses musiciens doivent avoir aussi quelques décennies au compteur, à voir leur cheveux, couleur sel, sans le poivre. Ils ont le sens du rythme et de la répartie. Le guitariste, sis à gauche de la native de Chicago, est nettement plus jeune ; la bonne quarantaine quand même. Son regard bienveillant la suivra tout au long du concert, comme s’il voulait la protéger. Pas étonnant, c’est son fils.

Très à l’aise, elle reprend le « Black coat » de Bob Dylan et également le « Summertime Sadness » de Lana Del Rey, une belle ballade aux accents émouvants, puisque relative à la peur de perdre un être cher. Elle s’épanche alors sur son mari décédé, il y a bien longtemps (NDR : en 1994 !), Fred Smith, guitariste de MC5. Notamment ! Il y a des blessures qui ne guérissent décidemment jamais.

Mariant la poésie beat avec le garage rock des 60’s er 70’s, elle est considérée comme la ‘marraine’ du mouvement punk, un genre qui semble l’avoir quitté, embrassant ci et là des chansons plutôt cosy, mais corrosives dans l’intention.

Erudite, elle évoque Rimbaud, Verlaine ou encore Baudelaire lorsqu’il s’agit de poésie et Kurt Cobain ou Johnny Cash pour le volet musical. Des fantômes bien-pensants qui veillent sur elle.

Lorsqu’elle entame « Because the night », les poils de votre serviteur se hérissent sur ses bras. Une chanson née de sa rencontre avec Bruce Springsteen, il y a 40 ans, et qui n’a pas pris une ride.

« Peaceable Kingdom » rappelle que Smith figure parmi les musiciens (plus de 600) qui ont appelé au boycott d’Israël, refusant ainsi de se produire dans les institutions culturelles complices cet Etat.

La légende termine son set par une version downtempo de « Smells Like Teen Spirit », le titre-phare de l'album « Nevermind », du mythe américain Nirvana, sorti en 1991.

La poétesse originaire de Chicago se laisse aller à quelques considérations personnelles, et tout particulièrement lorsque durant son premier voyage en Belgique, en 1976, elle avait croisé des enfants les plus sauvages, les plus fous et les plus beaux du monde.

Les cheveux maintenant détachés, elle ressemble à une lionne. Patti Smith remercie sincèrement le public et les organisateurs pour ce beau moment. Elle semble étonnée d’être entourée d’arbres alors qu’en Colombie, on les détruit sans raison.

Elle supplie toutes les générations d’en prendre soin. Une belle leçon pour les générations à venir.

Durant près d’une heure trente, cette femme aux allures de rockeuse a prouvé qu’elle n’avait rien perdu de sa splendeur et de sa verve. On a retrouvé une artiste toujours aussi impliquée dans les actions sociétales, environnementales et humaines. Mais surtout une personne au grand cœur.

Enfin, le dernier concert de votre serviteur met en scène les indétrônables Dyonisos.

C’est un groupe de rock français, originaire de Valence, qui doit notamment son succès à ses prestations scéniques et à l'univers particulier ou plus exactement surréaliste dans lequel il évolue.

La bande de joyeux drilles s’est embarquée dans une tournée qui célèbre 30 années d’une carrière passionnante. Trois décennies qu’elle nous réserve des chansons bienfaisantes –en français ou en anglais– caractérisées, le plus souvent, par leur double voire triple sens. Le sens des mots, le sens du verbe, mais aussi cette envie de plus en plus urgente de faire chavirer le cœur de toutes et tous dans un élan de joyeuseté sans limite.

Mais toutes ces années, ont-elles permis aux musicos de s’apprivoiser ou de se supporter ? A les voir à l’unisson s’amuser comme des gamins, la réponse est oui.

Mathias Malzieu, le chef de clan, est vêtu d’un costume rouge et coiffé d’une casquette qui lui donne un petit côté Mario Bros.

Il a frôlé la mort. On lui annonce en 2013 qu’il est atteint d’une maladie orpheline baptisée aplasie médullaire. Elle se signale par le dysfonctionnement de la moelle osseuse qui rend cette dernière incapable de produire des cellules sanguines (globules rouges, blancs et plaquettes) et donc remplace progressivement les cellules circulantes destinées à mourir naturellement. Ce qui implique une immobilisation en chambre stérile et un pronostic vital engagé. On oublie souvent la chance qu’on a d’être tout simplement en vie. D’où ce besoin de vivre sa vie fond la caisse…

Sa chaise roulante customisée trône au milieu de l’estrade. Un fauteuil dont il se servait encore tout récemment alors qu’il s’était blessé sur scène. Il a retrouvé ses guiboles de jeune homme, mais ses péripéties passées lui ont servi de leçon. Il préfère désormais faire profil bas.

Babette, sa compagne sur les planches, s’est installée sur sa gauche. Les trémolos dans la voix ressemblent à s’y méprendre à ceux d’Olivia Ruiz, une jeune femme issue de la téléréalité, mais qui a bien percé dans le milieu depuis. Elle partagera d’ailleurs la vie de Mathias, entre 2005 et 2011. Drôle de coïncidence, non ?

Le dernier LP du combo, « L'Extraordinarium », n’est pas à proprement parler un ‘best-of’, mais bien un recueil de chansons nouvelles puisque pléthore d’invités y ont participé. Un disque foufou à l’image de la prestation du jour. Au menu, que des trucs frapadingues !

Si certains utilisent le succès pour s’enfoncer dans de confortables sofas artistiques, Dyonisos continue de grimper aux arbres ! Et de nouveaux arbres. Où et comment vont-ils puiser cette force ?

En tout cas, si au fil du temps le band n’a cessé d’aiguiser sa fantaisie, ce soir, il a livré une prestation remarquée et remarquable. Est-ce là, la définition même de murir ?

On est en tout cas à peu près certain que l’aventure Dyonisos ne s’arrêtera pas ici. Y a-t-il quelque chose de jouissif de se sentir à part, d’être en marge, de faire ce qui n’a pas été fait ? Au fond, l’imagination, c’est le pouvoir plus que l’argent…

Alors que l’extravagance dirige cette cérémonie, les chansons sont pourtant souvent rythmées par l’amour, sorte de colonne vertébrale de la vie. Mais, l’idée de la création ne vient pas seulement de l’amour, l’humour et les belles choses. La rage, la haine vis de gens que l’on déteste et/ou qui nous ont blessés peuvent aussi se révéler un bon carburant.

Sans être caricatural, Dyonisos, c’est à la fois de l’hyperactivité et de l’hypersensibilité.

Alors que le groupe n’a jamais collé à un dessein politique de manière frontale, c’est le comportement qui devient politique, à l’instar de ce « Song for Jedi » qui claque comme un chewing-gum en bouche.

Avant de quitter le podium, un quidam se charge, sous les directives de son leader, de réaliser un slam (aussi appelé body surfing au Québec, et crowd surf en anglais), soit sauter dans la foule et se laisser porter par elle. Et allongé, il y parvient en atteignant le poste de la régie son. Un défi brillamment réussi ! On apprendra que ce jeune homme se nomme Kévin. Mais il aurait pu aussi s’appeler Jedi !

Un concert d’une intensité rare, un show plein de spontanéité et un Mathias Malzieu dans une forme olympique.

Cette édition aura été un grand cru !

(Organisation : LaSemo)

 

 

 

 

 

 

samedi, 13 juillet 2024 16:56

LaSemo 2024 : samedi 13 juillet

La météo est particulièrement capricieuse ce samedi. Alors que la veille pourrie, elle était le principal sujet de conversation des festivaliers, aujourd’hui, elle a laissé place à un large soleil, reléguant au placard les doudounes, au profit des t-shirts et bermudas. Même la crème solaire a fait son apparition, c’est dire !

Malgré cette clémence bien heureuse, les stigmates de la veille n’ont pas entièrement disparu. La boue jonche encore le sol à divers endroits.

Lorsque votre serviteur débarque sur le site, RORI traîne aux portes de l’enfer, référence à son premier album intitulé « Ma Saison En Enfer ». Le rouge domine évidemment. Les projecteurs d’abord, la batterie, les pieds de micro ainsi que le microphone, ensuite…

La Liégeoise n’est pas une novice dans le milieu. Elle a connu un joli succès d’estime et critique au sein de Beffroi, l'un des groupes les plus prometteurs de Belgique, qui avait notamment gravé « Swim », un titre largement diffusé sur les ondes radiophoniques, en 2015. Elle n'a alors que 16 printemps. Malheureusement, son comparse, Valentin Vincent, est emporté par la maladie à l'âge de 20 ans. L'aventure qui n'a plus de sens, prend fin. C'était en 2018.

Une période de reconstruction s'ensuit naturellement. Parmi les options possibles, l'arrêt de sa carrière. Mais elle s'accroche. Sa rencontre avec Hadrien, le guitariste qui l’accompagne aujourd’hui, donnera naissance au projet qu’elle défend depuis.

Vêtue d’une tenue blanche très sexy, lui conférant un côté glamour, la jeune femme laisse apparaître un corps filiforme. C’est la première fois qu’elle se produit sur la plaine du LaSemo.

Ses comparses ne sont autres que l’ex-The Subs, Hadrien Lavogez et Loïc Lavogez qui succède ainsi à Pierrick Destrebecq (NDR : il a notamment milité chez Recorders, Abel Caine ou encore au sein du backing group de de Mat Bastard). Il s’était déjà chargé des fûts, notamment au festival ‘Les Gens d’Ere’, pour remplacer Destrebecq, blessé paraît-il.

Si le jeu de Loïc manquait de conviction et de frappe à ses débuts, il a vachement rectifié le tir depuis. L’ombre de Pierrick s’en est allée….

Cependant, les gestes du batteur adoptent une amplitude excessive. Si sur le plan visuel, le lambda y trouve son compte, techniquement, c’est sans intérêt et ces mouvements fatiguent les bras inutilement. Mais, chacun sa merde après tout !

La demoiselle entame son tour de chant par « Ma Place ». Alors qu'elle s’est exprimée jusqu’ici dans la langue de Shakespeare, elle chante maintenant dans celle de Molière, ce qui lui permet de se raconter. Le français l’accompagne d’ailleurs en intégralité durant sa prestation.

Caractérisé par son phrasé haché, ses sonorités pop et ses appuis rythmiques, la musique de RORI, artiste manifestement charismatique et communicative, rallie rapidement le public à sa cause et s'inscrit dans l'air du temps.

Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, elle propose à celles et ceux qui sont venus la soutenir, un nouveau titre à paraître, signe que la petite ne dort pas sur ses lauriers. Et de demander au public de faire semblant qu’il connaît déjà la chanson. Elle possède décidément le don de la communication, cette petite.

Touchante et la sensibilité à fleur de peau, Camille, à l’état-civil, a accordé un concert d’une intensité rare, livrant un peu plus encore le fruit de ses émotions. Et que d’énergie ! Elle bouge tellement que le perfecto qui lui permettait de garder une température corporelle correcte, devient vite envahissant.

Pour son premier show de l’été, elle embraie tout de go par « Loser », une chanson qui n’est pas anodine ; car plus jeune, nombreux sont ceux qui ne lui prédisaient rien de bon. Et de leur balancer avec une conviction étonnante ‘d’aller se faire foutre’, sous des applaudissements d’encouragement.

Alors que la compo spasmodique au parfum salvateur « C'est la vie », titre éponyme de son Ep, révèle des accents nostalgiques, « Docteur » vient doucement caresser la fin d’un set très enrichissant. Une compo ultra médiatisée dont la foule semble connaître le refrain et qui met exergue, cette différence qu’elle aime à cultiver aujourd’hui.

Si la musique de RORI embrasse différents styles, allant de la pop au rock en passant même par le funk, ses chansons abordent des sujets personnels et très intimes. Alors qu’hier, ces thèmes la rongeait, aujourd’hui elle semble en tirer parti, le tout dans un élan positif qui sent bon la fureur de vivre.

RORI, une femme rageuse et énergique, dont le style lui est propre, s’impose comme l’une des figures montantes du paysage musical belge.

Mentissa, à l’autre bout, prend le relais. Une Belge également. En tout cas de cœur, car pour des raisons professionnelles évidentes, elle a déposé ses valises en France. 

Une artiste black au style chill ouateux. Un virage à 90° par rapport au précédent spectacle auquel votre serviteur vient d’assister. Mais, c’est aussi ça un festival, passer de groupe en groupe, d’artiste en artiste et de découverte en découverte.

Elle est habillée en soubrette. Etrange… Sa robe est trop courte, selon ses déclarations. Les mecs massés aux premiers rangs n’ont a priori pas le même point de vue. Pour eux, ce ne sera jamais assez court. Elle est épaulée par un claviériste à droite, alors qu’à sa gauche une violoncelliste au physique plutôt avantageux attire l’attention.

Son public est relativement jeune. Il faut dire qu’il s’agit de la finaliste remarquée de la saison 10 de la version française de ‘The Voice’, une émission au cours de laquelle elle a démontré son potentiel. Hasard du destin, elle finira par devenir coach de cette télédiffusion, dans sa version belge. Une concrétisation à ses yeux.

Sans filtre sur ses doutes, ses complexes et ses rêves, la chanteuse à la voix d’une pureté extraordinaire, mais qui la porte tel un étendard au creux des sillons, se livre à nu, à l’instar de « Balance », où elle évoque ses kilos superflus et les restrictions auxquelles elle a dû s’astreindre pour atteindre un idéal de canon de beauté.

Très second degré, elle n’hésite pas à égratigner gentiment un type qui lui crie haut et fort qu’il l’aime. Du tac au tac, elle lui répond qu’avec un coffre pareil, il devrait lui aussi participer à l’émission. Il n’en faudra pas plus pour s’attirer encore un peu plus la sympathie du jeune public.

Elle est revenue en terre sainte afin de présenter son premier opus pour lequel elle s'est attaché les services de grands auteurs de renom comme Vincha (qui écrit souvent pour Ben Mazué), Yannick Noah et Claudio Capéo.

Entre pop et chanson française classique enivrante, la demoiselle produit un set juste et satisfaisant tout en se laissant bercer par un spleen profond, renforcé par le pouvoir des cordes du violoncelle.

Lorsque sa voix puissante, qui laisse apparaître les nuances les plus subtiles, se pose sur "Et bam", un morceau écrit et composé par Vianney, l’artiste fait mouche auprès du public… conquis d’avance. Une jeune fille, mais d’une grande maturité.

Retour au podium du Château pour Zaho de Sagazan. Il y a un monde de dingue. Votre serviteur ne peut profiter du spectacle, la distance le séparant la scène se chiffrant à plusieurs dizaines de mètres.

Révélée l’année dernière, la jeune auteure-compositrice-interprète est originaire de Saint-Nazaire. Elle aussi est issue de ‘The Voice’. Décidément, cette émission est une machine à tubes. On y fabrique des artistes comme des petits pains. Et pas toujours de qualité, malheureusement !

Ici, l’angle de vue est assez différent car, si l’artiste s’est prêtée au jeu cathodique, elle explore un univers singulier. « La Symphonie des Éclairs », premier disque bien noté auprès de la critique populaire, en est un bel exemple.

Elle s’épanche dans un français précis sur ses désirs amoureux, appuyé par des morceaux aériens et cosmiques, alors que les arrangements soignés, embrassent ci et là une onde électronique.

Il y a chez Sagazan des relents poétiques. Son interprétation grave lui confère quelque chose de théâtral. Parfois aussi de manière exagérée. Mais le public ne semble pas lui en tenir rigueur.

Sa plume tantôt romantique, tantôt solaire, donne l’impression qu’elle se sent incomprise et victime des vicissitudes de l’existence.

Alors que le concert semble de bonne facture, les qualités d’écoute et de vue ne permettent pas à votre serviteur de partager davantage ce jardin secret. Une autre fois peut-être.

Il est temps maintenant d’assister au show de Loïc Nottet. Un artiste qui tisse sa toile intelligemment.

Connu pour ses participations à la troisième saison de l'émission ‘The Voice Belgique’, le Concours Eurovision de la chanson 2015 et l'émission télévisée française ‘Danse avec les stars’ sur TF1, l’artiste s’est construit une belle renommée au niveau national, mais aussi outre-Quiévrain. A un tel point tel que lorsqu’il se produit en concert, les places s’écoulent en quelques minutes seulement, à l’instar de groupes internationaux notoires.

En coulisses, il se murmure que Nottet et son team se sont empressés de préparer un spectacle qui devrait ravir même les plus sceptiques.

La nuit est tombée et on ressent un taux d’humidité qui remonte par le sol. Il va donc falloir du courage pour rester statique durant une heure et demie.

A l’heure dite, les danseuses et danseurs se pressent au milieu de l’estrade. Ils sont vite rejoints par l’ambassadeur du jour. Cheveux gominés, il porte des fringues ringardes de couleur noire qui lui donnent l’impression d’incarner Spock dans ‘Star Trek’ (exception faite des oreilles pointues).

Cette troupe effectue un travail remarquable. Et étrangement, le chanteur ne prend pas l’ascendant, chacun occupe ainsi une place de choix dans l’ensemble, une qualité rare chez les artistes, il faut le souligner.

Ça court ! Ça virevolte ! Les corps presque dénudés se chaloupent, flirtent pour plus d’étreinte sur fond de souplesse et de don de soi. Les galbes des corps des deux jeunes demoiselles laissent plus d’un spectateur sans voix. On dirait de vrais pantins désarticulés.

Le Carolo n’est pas en reste non plus. Et on entend le souffle court du jeune homme de 28 ans qui parvient à peine à reprendre ses mots entre deux compos.

Outre « Selfocracy, Sillygomania », « Addictocrate » reste son disque le plus personnel, à l’instar de « Trouve-fête » qui permet aux uns et aux autres de s’exprimer librement dans une gestuelle magistrale.

Nottet se dessine comme s’il était atteint du syndrome de Peter Pan à travers « Révérence », alors qu’il répète à l’envi « Je t’haine » à une fan avec laquelle il aime se prendre en photo.

Généreux à souhait, il s’épanche sur sa vie, afin que les fans apprennent à le cerner encore un peu plus. On apprendra ainsi qu’il éprouve des difficultés à trouver le sommeil (« Nuit Blanche ») ou qu’il a commencé la danse par le classique (« Cygne »).

Sur « Million Eyes », son titre incontournable, la voix du jeune homme prend une dimension fantasmagorique, surtout quand les aigus, hautement perchés, retentissent.

Il est doucement temps de prendre congé de ses invités. Ce sera le dernier concert de Nicki, l’une des danseuses. « M./Mme », son premier titre en français, sonne le glas d’un show millimétré et irréprochable.

Les aficionados les plus fervents regretteront sans doute l’absence de « Rhythm inside », caractérisé par son ‘rapapa tonight’ légendaire.

Il est temps de se dire au revoir. Il fait nuit noire. Les badauds s’enfoncent comme bercé par les dernières notes de musique.

Le second jour du LaSemo tire doucement à sa fin, lui aussi. Mais restons positifs, regardons le verre à moitié plein, plutôt qu’à moitié vide…

(Organisation : LaSemo)

 

 

 

vendredi, 12 juillet 2024 16:55

LaSemo 2024 : vendredi 12 juillet

La saison des festivals est officiellement lancée !

Si certains festivals ont été annulés ou revus dans une formule light à cause des conditions climatiques, le LaSemo a été maintenu dans sa version originale, mais a quand même opéré quelques petites adaptations pratico-pratiques.

Le site a été réorganisé afin d’aérer l’espace, passant de 4 à 10 hectares. Si la scène du Château n’a pas bougé d’un pouce, comme figée par le temps, une autre, d’une envergure identique et identifiée comme ‘La scène de la prairie’, a été échafaudée sur une parcelle décentrée. Si au départ l’idée était bonne, on s’est rendu compte, au fil du festival, qu’il fallait pas mal marcher pour se rendre d’un podium à l’autre. Une des critiques majeures à formuler pour cette 16ème édition.

Les food-trucks, plus nombreux, permettent aux festivaliers de se restaurer correctement, mais l’objectif avoué est de disposer d’endroits où l'on puisse manger sans forcément assister à un concert. Il y a même un stand qui permet d’acheter des fruits. Une première dans un festival !

Autres nouveautés, le ‘Pays des Merveilles’ et l'’Amusoir’ ont été étendus en surface également et une zone ‘Zen’ a vu le jour, de quoi bénéficier des bienfaits des massages entre deux sets.

Mais, et c’est l’essentiel, l’esprit est intact, à savoir présenter une affiche proposant des spectacles culturels, riches, conviviaux et bienveillants.

Le LaSemo se caractérise, depuis ses débuts, par sa convivialité et sa proximité. Entourés par ses espaces verts exceptionnels, ses pièces d'eau, ses jardins et des bâtiments qui couvrent près de 400 ans d'histoire, les festivaliers s’y pressent de plus en plus nombreux. D’ailleurs, sa renommée dépasse aujourd’hui les frontières de la Belgique.

Le festival a de nouveau invité petits et grands à faire la fête. Si de nombreux concerts sont programmés, les bambins ont également de quoi faire. Il y a même pléthore de représentations qui leur sont destinés.

Une des caractéristiques majeures de ce rendez-vous annuel est son caractère durable. Entendez par là toilettes sèches, décors en palettes et ballots de foin disséminés un peu partout, afin de se reposer un peu entre deux escapades. Bref, un endroit hors de tout et surtout du temps.

On regrettera quand même Jean-Jean, l’habituel géant givré de service chargé d’introniser avec humour, décadence et légèreté les artistes. Cependant, la préposée au langage des signes persiste et… signe.

La pluie a bien lessivé le site, à tel point que les parkings ont été fermés de manière préventive. Les véhicules se sont donc garés de manière plus ou moins anarchique le long des voiries, au grand dam des riverains. Autant dire que ça râlait sec !

Le temps maussade n’a pas eu d’emprise sur les nombreux festivaliers qui se sont présentés dès l’ouverture. Il faut dire qu’IAM constituait la tête d’affiche du jour.

Aux alentours de 17 heures 30, un trio féminin se prépare à fouler l’estrade de la scène du Château.

Souvent typographié L.E.J, également orthographié Elijay suivant sa prononciation, Lucie, Elisa et Juliette sont aux commandes de la formation. Et prêtes à en découdre !

Alors que Lucie et Elisa, élèves au lycée Jean-de-La-Fontaine à Paris, suivent un cursus musical en lien avec la Maîtrise de Radio France (qu’elles fréquentent pendant dix ans), Juliette étudie au conservatoire de Saint-Denis. Un curriculum vitae qui leur permet d’acquérir les bases de la musique classique.

Dans la pratique, elles sont parfaitement multi-instrumentistes, s’échangeant, au gré des chansons, les instruments, sous le regard médusé du public. Elles jouent avec une précision chirurgicale. Normal, direz-vous pour des musiciennes. Mais, ce n’est pas toujours le cas !

Elles se sont forgé un nom auprès du grand public grâce à un succès inattendu décroché en août 2015 et plus particulièrement à travers le clip « Summer 2015 », un mashup posté sur YouTube.

Deux d’entre elles ont revêtu une jupette, ce qui attire le regard des mâles agglutinés aux premiers rang, et comme des mouches alléchées par un morceau de viande, ils n’y perdent pas une miette.

La troisième, plus timorée (ou plus frileuse), a préféré le pantalon. Faute de goût ! Il est de couleur gris alu. Pas très discrète la frangine !

De toutes, Juliette semble aussi la plus timide, elle s’efface le plus souvent pour laisser place aux deux autres qui prennent ainsi un certain ascendant sur le spectacle.

Les filles prennent un plaisir immense à se produire au pays de Tintin, les Belges étant selon leur propres termes ‘pas des fachos comme en France’, référence aux résultats des élections françaises lors du premier tour. Une connaissance plus précise du système politique belge leur aurait permis une réflexion un peu moins démagogique. Soit…

Mélangeant les genres, elles maîtrisent parfaitement le hip-hop, à l’instar de « La dalle », mais n’échappent pas pour autant aux poncifs collatéraux en abusant d’expressions telles que ‘Eh frères’. C’est un peu… relou à la fin !

« Pas l'time » permet au jeune public de s’essayer au pogo, une danse répandue jadis dans les concerts ‘punk’ au cours desquels les gens se bousculaient frénétiquement ; mais une pratique inconnue chez les plus jeunes. Selon la légende, il aurait été inventé par Sid Vicious lors d'un concert des Sex Pistols alors qu’il était dans le public, juste avant qu'il ne devienne le bassiste du groupe.

Avant de tourner les talons (aiguilles), les filles s’improvisent sur un mash-up (NDR : création d'une chanson à partir d’autres chansons déjà existantes), entre Eurythmics et Madonna. Sans doute, un des moments les plus sympas de cette prestation, qui ravit les plus âgés.

Le combo s’est manifestement investi à fournir un concert plein d’énergie et un show très visuel. Laissons leur l’illusion. Car Lucie, Elisa et Juliette manquent cruellement de conviction, leurs compos embrassant aussi des contours un peu trop faciles.

Direction la Guinguette, l’endroit le plus atypique du site. Sans doute aussi l’espace qui se prête le mieux à l’esprit et à la culture de ce festival unique en son genre.

La scène est constituée de palettes de bois. De vieux vinyles ont été cloués sur le pourtour du site, afin de feindre un espace cosy.

Le podium bénéficie d’un bel espace naturellement ombragé car il se situe au milieu d'arbres. Si l’idée est sympa en plein canicule, inutile de préciser que la sensation de froid se fait davantage sentir ici. D’ailleurs, peu de spectateurs se sont installés au centre de la parcelle. Et les quelques courageux guettent patiemment l’arrivée du prochain artiste. Une chope à la main évidemment ! Ils attendent Stace. Pas certains que la majorité d’entre eux connaisse.

Ici aussi l’éclectisme s’impose, puisque cette chanteuse, compositrice, productrice, auteure, réalisatrice et interprète, prodigue une musique mêlant électronique et rock alternatif aux inspirations diverses.

Elle est accompagnée d’un batteur à la moustache british, une préposée aux claviers et une autre à la basse.

L’artiste est plutôt rondelette, mais semble l’assumer ; elle porte une jupe assez courte qui lui serre assez bien le corps et des dreadlocks qui lui arrondissent encore un peu plus le visage.

Dès son plus jeune âge, Stace est bercée par le jazz. Elle est issue d’une famille de musiciens. Ses parents se sont rencontrés au sein d’un groupe. Son frère est chanteur et sa sœur a également touché à l’univers de la musique. Bref, comme Obélix, elle tombée dans la marmite lorsqu’elle était petite (NDR : sans référence aucune à son tour de taille). La musique constituant un moyen d’expression à ses yeux.

En 2021, elle partage son premier Ep auto-produit « Green Onyx ». Composé de quatre titres, l’univers de la demoiselle est empreint de néo-soul, à l’instar de « Busy », un titre puissant qui permet de percevoir la richesse de sa palette vocale. Ce qui est plutôt rare chez une jeune personne de son âge.

Généreuse à souhait, elle dispense quelques titres de son second Ep, « Overblue », afin de mieux cerner d’avantage l’univers dans lequel elle baigne. Un format où elle explore une kyrielle d’influences, allant même jusqu’à flirter avec la musique électronique, comme sur « Tainted », un domaine qui lui correspond également.

Si on ne peut nier un talent hors du commun, le set de la jeune dame manque d’énergie, malgré toute l’empathie fournie et reçue. L’ennui finit rapidement par envahir les spectateurs. Certains festivaliers ont préféré vaquer à d’autres occupation. C’est vraiment dommage parce que cette artiste à un potentiel énorme, mais les conditions de lieu et de temps ne permettent sans doute pas une écoute des plus objectives. Quant aux téméraires, ce sont sans doute de fervents admirateurs.

Direction la Main Stage, face au Château qui s’est chargé, en cette fin de journée, de belles couleurs, grâce au jeu des spots lumineux qui viennent lécher son cadre.

Des vieux briscards s’y préparent. Il s’agit d’IAM, un groupe de hip-hop français originaire de Marseille.

Formé en 1989, il impliquait à l'origine Akhenaton (Philippe Fragione) et Shurik'n (Geoffroy Mussard) au chant, ainsi que Kheops (Éric Mazel), Imhotep (Pascal Perez) et Kephren (François Mendy) aux platines.

Ce patronyme a été choisi car à une certaine époque de la lutte pour les droits civiques aux États-Unis, lorsque les manifestants défilaient avec des pancartes "I AM A MAN". IAM en est la contraction.

Toutefois, le combo s’est amusé à fournir d’autres explications bien plus farfelues. Florilège : ‘Imperial Asiatic Men, ‘Indépendantistes Autonomes Marseillais’ ou encore ‘Invasion Arrivant de Mars’. Akhenaton, dans son autobiographie (‘Akhenaton 2010’), explique que le sens véritable d’IAM réside dans cette affirmation, cruciale pour nous : ‘Je suis, j’existe’. Amen ! Intéressant, mais on s’en fout royalement !

Le fleuron du rap marseillais vient de lancer le ‘HH History Tour’, une tournée exceptionnelle qui fait suite à « HHHistory », un disque paru fin 2023. Il accorde une étape remarquée pour une prestation live qui en marquera plus d’un.

Au milieu de la scène, trône une estrade en forme de double H (normal !), derrière laquelle se cache le DJ, un maître de cérémonie aux allures babacool qui va passer son temps, lunettes noires vissées sur le nez, à scratcher et scroller pour le bonheur de tous.

Il est très vite rejoint par ses potes, capuches sur la tête, pour faire mine de passer inaperçus. C’est raté évidemment puisque l’exercice de style remarquable tombe très vite en désuétude. Il est impossible de tromper le public constitué majoritairement de quadras et de quinquas. Bizarre…

Connu pour son style musical unique et innovant, IAM propose des textes souvent politiquement engagés qui traitent de l’injustice sociale, du racisme et de la violence urbaine, comme sur ce « Petit Frère », sorti en 1997, et qui figure sur le long playing « L'École du micro d'argent », encore considéré comme l’un des meilleurs elpees de rap français de tous les temps. Ce qui lui a d’ailleurs permis de remporter de nombreux prix, dont une prestigieuse ‘Victoire de la Musique’. Sur l’écran géant en arrière-plan, des images en noir et blanc viennent souligner le caractère sublime de cette compo qui n’a pas pris une ride.

Les compères puisent large, ce soir, dans leur répertoire nous réservant des titres aussi spectaculaires qu’incontournables tels que « Samouraï », « Ça vient de la rue » ou encore « La vie est belle », un titre qui met en exergue les disparités sociales lorsque personne ne joue avec les mêmes cartes.

Un répertoire revisité, mais surtout un show dynamique, rythmé, humain et rempli d’ondes positives. Les gaillards ont accusé le poids des années, mais la rage est restée pareille !

Ils profitent de leur passage en Belgique pour égratigner la situation politique française (eux aussi, décidément), tout en soulignant avec tristesse et légèreté que ‘cela ne risque pas de changer vu l’équipe en place’, à la suite de l’installation du nouveau gouvernement. Intéressant, mais à quoi bon déverser sa haine dans un pays limitrophe si ce n’est pas pour toucher les principaux intéressés ? Qu’ils gardent leurs carabistouilles lorsqu’ils se produisent outre-Quiévrain, non ?

Alors que le concert bat son plein, « Danse le mia », joli succès d'estime de 1993, rappelle que, grâce à ce titre, le rap français atteignait le sommet du Top 50 durant huit semaines et devenait le 2ème single le plus vendu en France, en 1994.

C’est le moment idéal pour que les chemises s’ouvrent et permettent de voir les chaînes en or qui brillent alors que les milliers d’aficionados se mettent à danser le ‘mia’ (NDR : un mot en verlan utilisé à Marseille par les anciens pour désigner un ami) …

Mais, rassurez-vous, dans les faits, personne n’aurait oser ouvrir sa chemise, au risque d’attraper la crève le lendemain.

Il est presque 22 heures lorsque ce set anthologique s’achève. Un très joli moment.

Au loin, lors du concert d'Ibrahim Maalouf, un groupuscule de personnes distribue des tracts contre sa présence (mais dans le respect). Il lui reproche d’être au cœur d’une histoire d’agression sexuelle.

Qu’on le veuille ou non, la justice doit être celle qui décide de la culpabilité ou non. Et ici, le musicien a été acquitté. Si chacun peut avoir son opinion personnelle sur la question, le procès ne peut avoir lieu dans la rue ou sur les réseaux sociaux.

Le soir commence à tomber doucement et la fraîcheur aussi. Le climat automnal n’épargne personne. Nombreux sont ceux qui préfèrent déserter les lieux pour se réchauffer sous la couette… qui a encore de beaux jours (soirs) devant elle.

Le show de Parov Stelar, annulé pour cause de tornade à Vienne, est remplacé par les samples d’Henri PFR. Une aubaine pour certains, une tristesse pour d’autres. Comme dirait l’adage, le bonheur des uns…

(Organisation : LaSemo)

Le Festival au Carré se déroulait cette année du 28 juin au 7 juillet dans la ville qui a été Capitale européenne de la Culture, en 2015, Mons.

Il y en a pour tous les goûts. Ainsi, cette vingt-troisième édition propose du théâtre, du cirque et de la danse en plein air pour (re)découvrir le patrimoine montois, des révélations musicales intimes, fantasques ou inattendues, des moments où l’on danse follement, un temps unique dédié aux familles et puis une grande terrasse pour se retrouver durant les longues soirées d’été en fonction des conditions climatiques bien difficiles, rencontrées ces derniers temps. Bref, même les plus difficiles vont y trouver leur compte.

Une fois n’est pas coutume, au lieu de se focaliser sur la tête d’affiche, votre serviteur a choisi de suivre des artistes méconnus, incongrus ou iconoclastes. Ce 4 juillet, Françoiz Breut est à l’affiche, une Bruxelloise d’adoption.

Elle a l’honneur de se produire à la Maison Folie, une ancienne école devenue lieu culturel et citoyen qui a pour vocation principale de créer des liens. Tout simplement.

Dogbowl assure le supporting act. Un vieillard d’une soixantaine d’années aux cheveux hirsutes ressemblant à s’y méprendre à Christopher Lloyd, alias le docteur Emmett Brown, dans la célèbre trilogie ‘Retour vers le futur’. Et la comparaison ne s’arrête pas là puisque le bonhomme est aussi déjanté que le second.

Pépé est seul sur scène, juste armé d’une vieille gratte. Contrairement aux idées reçues, Stephen Tunney (NDR : c’est son vrai nom) n’est pas un inconnu.

Devenu l’une des figures majeures de la scène alternative outre-Atlantique, il se lance dans la musique à la fin des années 70, en formant des groupes de punk rock. Parallèlement, il s’investit dans l’écriture de chansons mélodiques.

Chanteur, auteur, compositeur, musicien, il se passionne également pour la peinture. Ses expositions font forte impression, paraît-il. Sans oublier ses aptitudes pour l’écriture. Il a d’ailleurs publié, en 1992, un ouvrage assez violent (‘Flan’) qui se distingue par ses éléments surréalistes.

Un set de seulement environ 20 minutes permettra largement de cerner ce personnage à la fois burlesque, grandiloquent et provocateur. Mais avant tout un amuseur public hautement sympathique. Et ça, c’est le plus important !

Grâce à un florilège de chansons à boire, qui parlent de femmes ou de sexe, des ballades aux histoires fantaisistes ou subversives, Dogbowl s’amuse beaucoup sur les planches. Pas le genre de type à se prendre au sérieux. Et ça marche ! Les badauds s’agglutinent face à l’estrade, le sourire aux lèvres et des étoiles plein les yeux. C’est bon enfant, et puis c’est une aubaine en cette veille de congé d’été.

Construisant son live sur la langue de Shakespeare, Stephen affiche fièrement sa propension pour les jeux de mots. Et apparemment, nombreux sont ceux qui maîtrisent la langue anglo-saxonne dans la salle.

Les constructions musicales du gaillard sont extrêmement simples. Elles tournent autour de quelques accords barrés. Mais il y tellement d’humanité, d’amour et de second degré chez cet artiste que l’ensemble devient rapidement cohérent.

Comme souvent dans ce genre de situation, la scène est déjà configurée pour la prestation suivante. Très vite, les musiciens rejoignent leur instrument de prédilection. Roméo Poirier se charge des fûts, Marc Melià des claviers et François Schulz est préposé aux cordes (basse et guitare).

Menue, Françoiz Breut, arrive d’un pas franc et décidé. Elle est vêtue de noir ; ce qui lui confère une apparence austère, telle une ‘bobonne’ du temps passé. Mais, très vite elle apparaît joviale et proche de son public. En toute honnêteté, Breut jouit d’une belle aura.

La donzelle n’est pas une minette dans le milieu. Comptant une petite dizaine d’albums à son compteur, elle écume les scènes depuis maintenant 27 ans, et son premier album de chansons, simplement éponyme, est paru en 1997. Pour les puristes, un disque composé et réalisé en grande partie par un certain Dominique A, dont elle sera la compagne de 1990 à 1999.

La chanson n’est qu’un pan de son histoire, puisqu’en parallèle à sa carrière de chanteuse, elle poursuit ses illustrations de disques et de livres pour enfants.

Dès les premières note de « Hors Sol », une compo downtempo, plage d’ouverture de son dernier opus, « Vif ! », Françoiz s’émancipe et s’affranchit d’un public déjà très ‘friendly’. La basse est très présente, à l’instar de « Fiver », titre phare de « Balthazar ». L’instrument le sera d’ailleurs tout au long de ce set empreint d’une émotion sidérale.

Que le mélomane lambda ne s’évertue pas à chercher quelque chose de rationnel chez ce petit bout de femme ; il n’y en a tout simplement pas ! A travers des compositions qui s’avèrent légères, un brin orgasmique, elle s’interroge quant à son rapport à la nature et au monde tout au long de « Sous Bois la Nuit » ou à l’absence sur « Ectoplasme ».

Les mouvements de son corps sont complètement instinctifs et deviennent comme une nécessité et un support audacieux aux chansons. Et si l’un n’existait pas sans l’autre ?

Elle s’imagine alors un monde gouverné par les animaux. Sans filtre, ni artifice, elle enchaîne par un poétique mais engagé « Cavales Animales ».

Si la prestation permet de découvrir les facettes du nouvel opus, certains titres plus anciens comme « La Certitude » (issu d’« Une Saison Volée » - 2005) sont interprétés, afin de contenter une fan base ravie qu’elle ne les oublie pas.

Marc Melià, qui joue le plus souvent sur ses deux synthétiseurs, apporte une dimension toute particulière au magnifique « Mes péchés s’accumulent », une ballade douce-amère, aux accents nostalgiques.

Accomplissant un show mi-organique mi-électronique, Breut emprunte des chemins intimistes en offrant un spectacle grandiose sur fond de ritournelles espiègles, mais d’une sincérité à toute épreuve.

Cette femme est une artiste hors de tout… hors du temps. De sa voix douce, en se servant de chansons parfois caricaturales, mais hautement surréalistes, elle embrasse un univers de proses et de métaphores. Elle est une ode à l’évasion sans lendemain où l’imagination s’étiole au firmament des étoiles, la nuit tombée…

(Organisation : Festival Au Carré)

 

 

samedi, 04 mai 2024 15:59

Un plus un est égal à trois…

Eosine constitue sans doute l’une des révélations belges musicales de cette décennie.

Drivé par la frêle et énergique Elena Lacroix, le combo a décroché, haut la main, une victoire au Concours Circuit, en décembre 2022, devant un parterre de 120 professionnels ; ce qui démontre son potentiel

Comptant deux Eps à son actif, « Obsidian » (2021) et « Carolline » (2023) (ce dernier a été mixé et masterisé par Mark Gardener – un des deux chanteurs/guitaristes du légendaire Ride), Eosine s’apprête à en sortir un troisième, précurseur d’un premier elpee.

Elena, petit bout de femme, la tête bien sur les épaules, accompagnée de ses fidèles acolytes Dima Fontaine (guitare, chant) et Benjamin Fransen (batterie), se livre sans détour aux lecteurs de Musiczine sur sa nouvelle vie, désormais starisée, ses rêves et ses envies.

Décryptage !

Vous comptez deux Eps à votre actif. Un troisième est une préparation et devrait paraître en septembre de cette année. Elena, tu es aujourd’hui sous les feux des projecteurs, alors qu’au départ, tu composais seule dans ta chambre. Si le succès est soudain, est-il inattendu pour autant ?

E : C’est une bonne question !
D : Ce n’est pas inattendu, Elena réalise un travail de fou depuis le début avec pour objectif de porter le projet le plus loin possible. Elle récolte simplement les fruits de son travail.
E : En réalité, j'ai toujours beaucoup bossé, effectivement. Confidence pour confidence, j’ai arrêté mes études, il y a trois semaines pour me consacrer pleinement à la musique. Le moment de mettre toutes les chances de notre côté s’est présenté. On a un nouveau label et un nouveau booking. Les bases doivent être construites maintenant si jamais, un jour, le projet décolle véritablement.

Vivre de la musique est un rêve et j’ai envie de m’y consacrer pleinement, raison pour laquelle il est impératif de mettre toutes les chances de son côté.

Arrêter ses études si près du but, alors que la musique est aléatoire et donc par définition incertaine, c’est une sacrée prise de risques, non ?

E : J’ignore franchement si cet arrêt est définitif. Tout dépendra de la manière dont les disques seront accueillis par le public ainsi que par les plateformes. J’ai pas mal de temps pour reprendre les études. J’espère qu’un jour, je pourrai les terminer. Mais ma priorité est la musique. Je mets donc tout de côté pour pouvoir m’y investir pleinement et en vivre. C’est un rêve de petite fille.

Et toi Benjamin, tu poursuis les mêmes ambitions ?

B : Je termine mes études cette année. Il me reste deux mois à tirer si tout va bien. Si ce n’est pas le cas, ce sera une seconde session.

Quant à toi Dima ?

D : J’ai déjà le pied dans la vie professionnelle. Je réalise une thèse en physique également. Je suis donc encore étudiant, par définition.

Comment vous organisez-vous, compte tenu du caractère chronophage de vos obligations professionnelles et/ou scolaires ?

B : J'ai une défense de mémoire courant du mois. Le matin, on se tape quadruple concert et l’après-midi, je bosse sur cette étude. Sachant que la distance s’invite aussi dans l’équation. On vient de Liège ; alors, imagine les bornes à se taper entre les concerts et les obligations scolaires. Mais globalement, comme Elena, la musique reste aussi une priorité, l’objectif étant de pouvoir en vivre un jour. J’aime aussi mes études de graphisme. Si je peux concilier job et musique, ce serait parfait.

Hormis Benjamin qui épouse des études artistiques, Elena et Dima trempez plutôt dans le scientifique, soit un domaine très cartésien à l’opposé du champ musical, dont le spectre est plutôt intuitif. On a dû mal à imaginer que les deux puissent coexister. Le paradoxe m’interpelle pour être honnête…

E : Je ne suis pas convaincue que l’un soit artistique et l’autre cartésien. Je ne me pose pas la question, très franchement. J’estime mes études intuitives. Et c’est une chance ! Je n’ai jamais dû beaucoup travailler. Les événements s’enchaînent, naturellement. Il est vrai que, parfois, dans la musique, l’inspiration tombe du ciel. On se dit, tout à coup, tiens c’est ça la bonne idée, c'est cette partie que je devais mettre sur le morceau. Et ce phénomène, je ne peux absolument pas l’expliquer. Tu sais, si on rajoute un temps à moment précis dans la compo ou si on change la dominante de basse, par exemple, ça va provoquer un truc qu'on sait plus ou moins prévoir.
Dans la musique, il y a des formules qui sont quand même relativement quasi-mathématiques. A commencer par le rythme. Dans la science, c'est pareil. Parfois, on a des affinités avec certaines choses, certains concepts qui coulent de source et deviennent par essence intuitifs.
D : Je pense aussi que, lorsqu’on vient d'un background scientifique, il y cet amour de la complexité. Quand j'écris de la musique, je vois cette pratique comme un puzzle. Je dispose d’un tas de pièces différentes et j’imagine comment je peux les assembler pour que le tout devienne cohérent. Il y a un truc très scientifique, très mathématique là-dedans.
E : Oui, ça n'enlève pas du tout le côté émouvant, tout simplement parce qu’apporter des modifications dans la structure du morceau, comme ajouter un temps par exemple, c’est purement du ressort des mathématiques. Mais, qui impacte le prisme du physiologique, au sens large du terme, et donc de l'émotion. Et l’émotion met le corps en mouvement. Je pense donc que les deux sont complètement liés.

Naviguant entre dreampop et shoegaze n’est-il pas frustrant d’être systématiquement comparé à des formations qui ont marqué de leur empreinte tout un pan de la culture musicale comme Slowdive ou Cocteau Twins ?

B : Nous avons un style qui nous est propre. Nous nous éloignons de tous les clichés auxquels on peut rattacher le projet. Pour que ce soit plus authentique.
E : On y ajoute des influences. Auparavant, j’écoutais beaucoup ce genre de groupe. Sois attentif aux chansons que l’on va interpréter ce soir ou celles qui figureront sur le nouvel Ep ; on y rencontre des dimensions plus baroques, plus sombres, même parfois doom metal, classiques ou encore hard rock.

Benjamin amène un élément plus groovy également. La reverb, la delay ou encore le chorus, sont des codes que l’on rattache forcément aux sonorités shoegaze. Mais je pense vraiment qu'on embrasse une perspective plus baroque dans le chant et les mélodies.

Si à l’écoute de vos deux Eps, on sent clairement cette volonté de vous vous éloigner peu à peu de ces références en vous forgeant votre propre identité musicale, pourquoi ne chanteriez-vous pas en français, afin de faire davantage dans l’originalité ?

E : Jamais !

Je dois dire que je suis assez étonné d’entendre des jeunes d’une vingtaine d’années, connaître Cocteau Twins, et sa chanteuse Elizabeth Fraser, groupe qui a été actif de 1979 à 1997. Quel est l’elpee qui t’a le plus touché, Elena ?

E : J’en ai beaucoup écouté dans le passé, mais plus maintenant. L’album intitulé « Blue Bell Knoll » m’a marqué. Ce n’est pas du shoegaze classique à proprement parler car on y perçoit du clavecin. Ce disque recèle des éléments très contrastés et très sombres. A la fin, on y découvre cette touche post-rock absolument fantastique. C’est ce que j’aime chez Cocteau Twins. A vrai dire, le volet dream pop m’affecte moins. J’ai aimé « Victorialand », également pour ces raisons. J’apprécie le groupe, non pas pour le côté planant, mais davantage pour son volet très intime et très sombre.

A son origine, le shoegaze était un terme péjoratif. Il s’agissait quasiment d’une insulte. La presse britannique parlait de shoegaze parce qu’en concert, les musiciens jouaient de la guitare en fixant (gazing at) leur chaussures (shoes). En gros, c’était une façon détournée de dire qu’ils étaient introspectifs et ennuyeux. Désormais, l’étiquette shoegaze est enviable, réunissant même quelques millions d’adeptes sur les plateformes de streaming. Comment expliquez-vous ce réveil du style ?

E : C’est une bonne question !
D : De nos jours, il existe une résurgence du son issu des 90’s. A l’époque, ce genre n’était pas étiqueté ‘rock commercial’. Je pense que le public s’identifie à cette culture, de nos jours. Il ressent le besoin de s’y (re)plonger. Si l’univers est peut-être vintage aujourd’hui, il ne l’était pas à l’époque.
E : Il y a encore beaucoup à creuser. Ce style n’était pas très populaire pour le grand public car peu se démarquaient sur cette scène. Aujourd’hui, les gens perçoivent ces sons, comme quelque chose de nouveau. Il est assez accessible, l’aspect technique n’y primant pas. Pour tout dire, il existe sur le marché une panoplie de logiciels d’enregistrement et d’effets digitaux qui permettent de faire sonner un morceau très rapidement. En réalité, il est très facile de s’exprimer à travers cette musique parce qu’il n’est pas nécessaire de s’y mettre complètement à nu. Des effets bien calibrés et des paroles qu’on ne comprend pas toujours nécessairement peuvent trouver écho chez ceux qui n’ont, à la base, aucun background musical.
D : Une forme de nostalgie ?
E : Oui, l’anniversaire de la mort de Kurt Cobain n’y est peut-être pas étranger.
D : Perso, je ne suis pas du tout bercé par ce style. C’est en intégrant le projet que j’ai compris à quoi il correspondait. J’ai fait fi de cela en partant du postulat suivant : ‘Pour Eosine, qu’est-ce que j’ai envie de faire ?’ C’est ma ligne de conduite. La base est très shoegaze des années 90, mais les influences sont nombreuses, le but n’étant pas de suivre les codes du genre. Le projet évolue bien.
B : En ce qui me concerne, j’ai été bercé par le rock classique. Pour ensuite m’intéresser au funk, au jazz et tout récemment au post-rock. J’aime aussi le post-punk, dans une proportion moindre. J’ai aussi eu une période metal. De manière générale, j’aime tout ce qui est groovy et très dansant.
D : Etonnamment, je n’écoutais pas énormément de musique lorsque j’étais gosse. Mais lorsque j’ai commencé à en jouer, vers l’âge de 14-15 ans, j’étais focus années 60 dont les Beatles. De nombreuses années ont été nécessaires pour en sortir (rire). Je ne renie absolument pas cette époque, car j’y ai engrangé une multitude d’informations. Mes influences sont éclectiques ; elles oscillent du rock en passant par la musique classique. Paradoxalement, je ne connaissais pas le shoegaze et ne le maîtrise pas encore. Venir d’un horizon complètement très différent peut-se révéler intéressant, également.

Elena, je te sens assez nerveuse et touche-à-tout au sens noble du terme. Hormis Eosine, j’imagine que tu explores des tas d’autres projets ?

E : A commencer par Tokyo Witch, en solo. Un album est sorti en décembre. Je me produis la semaine prochaine à Bruxelles. Je joue aussi au sein d’un groupe de doom metal, Lethvm. Et puis chez OOOTOKO, qui réunit 18 musiciens. On y mêle des musiques traditionnelles comme le jazz, la chamber pop et le classique. Il est constitué de musiciens issus du conservatoire, mais également du rock ; le résultat est très éclectique et très festif. Nous nous produirons d’ailleurs, dans quelques jours, au Botanique. Pour terminer, je chante dans une chorale.

Eosine, c’est évidemment la musique, une prose poétique, mais aussi une esthétique et une culture à l’image très imprégnée, notamment à travers les artworks et projections scéniques. Et si Eosine était plutôt un concept avant même d’être un groupe ?

D : C’est une super bonne question, j’adore !
E : Je ne sais pas pourquoi, nous devrions dissocier les deux. Je pense que dans l'art, il existe ce côté mathématique : un plus un est égal à trois. Et cette somme constitue le concept.
Il y a une relation de cause à effet entre l’identité d’un groupe et la manière dont la musique va se propager. La formation l’associe à des images et des émotions. Je crois donc que le tout fait plus que la somme des parties. C’est le principe du concept. Eosine est donc les deux à la fois, un groupe et un concept.

Elena, pourquoi accorder une attention particulière aux thématiques des compos, sachant que l’utilisation de voix éthérées et la puissance des effets que l’on a déjà soulevé précédemment, rend difficile la compréhension des paroles ?

E : Je commence toujours par écrire les textes des chansons et la musique s’articule autour. Elle va soutenir une émotion dictée par les paroles. Elles ne constitueront pas le squelette de la compo, mais elles créeront l'univers qui l’entoure. C'est vraiment la ligne directrice. J'y attache énormément d’importance. J'adore écrire. J’ai toujours adoré ça. Les effets de guitares ne sont pas destinés à cacher une peur d’être comprise. Ni même pour masquer une écriture d’une qualité dont certains y verraient de la médiocrité. Au fond, ma plume n’est peut-être pas aussi qualitative que je ne le pense. Je n’en sais rien. Les effets amplifient davantage la voix en créant une unité dans les sons, en particulier entre nos deux voix. Les paroles sont vraiment la base de tout, même si, à la fin, elles ne deviennent plus qu'une partie du morceau.

Elena, lorsque je t’entends parler musique et de l’amour qui l’entoure, j’ai l’impression, sans aller jusqu’à dire que cet exercice est facile, qu’elle est en tout cas accessible à tous…

E : Personnellement, je ne possède que quelques notions de solfège, Benjamin compte quelques années de cours derrière lui. Dima n’a aucune formation musicale.
Oui, je crois sincèrement que l’on peut créer de la musique sans avoir nécessairement une culture ni bénéficié d’un enseignement musical au préalable. Si effectivement, certains ont l'immense chance de naître avec une bonne oreille, on peut aiguiser un sens naissant à force de travail. C’est pareil pour la rythmique. Donc, oui, sans aucune formation, il est tout à fait possible de faire de la musique. En ce qui me concerne, j’ai perdu pas mal de notions de solfège. Je ne suis pas convaincue que je parviendrai à lire une partition aussi facilement qu’auparavant. Je n’en utilise d’ailleurs pas pour le groupe.
Je préfère me débrouiller vite fait dans plein de domaines plutôt que de maîtriser parfaitement un seul instrument. Ce qui me permet d'exprimer tout ce que je veux sur le vif, même si je n’en ai pas le contrôle total. Et puis, confidence pour confidence, je dénicherai toujours bien quelqu'un qui joue de la batterie (rires). C’est la façon dont j’appréhende les événements. Le plus important est de pouvoir dégoter des musiciens qui possèdent la complémentarité dont le groupe a besoin pour exister.

Ado, tu écrivais dans ta chambre, j’imagine pour son côté libérateur. Avec la maturité, l’expérience, la vie, le succès, as-tu enfin trouvé la paix intérieure aujourd’hui ?

E : Je confirme le côté libérateur de la musique, j’écris encore d’ailleurs seule aujourd’hui.
Ai-je trouvé la paix intérieure ? Non ! Ce serait d’ailleurs un désastre si je devais la trouver un jour. Le mouvement vient toujours d’un déséquilibre. Quand il y a de l’équilibre, il n'y a pas de goût. Quand il n'y a pas de mouvement, il n'y a rien à exprimer, il n'y a pas de son, c'est le vide sidéral. J’aime donc le déséquilibre. Mais, attention, être en déséquilibre ne signifie pas pour autant être instable. Ce sont des notions complètement différentes. Perso, c'est cultiver ce que l’on ressent, les embrasser et les regarder sous toutes les coutures. Il est opportun de trouver quelque chose dont on peut tirer un sens. Toujours.

En décembre 2022, vous avez participé au Concours-Circuit, le plus grand concours de musiques actuelles et alternatives en Belgique francophone pour écraser la concurrence en raflant tous les prix. Certaines formations mettent dix ans pour acquérir un tel niveau. D’autres n’y parviennent jamais. Le côté dilettante de vos débuts a donc convergé vers quelque chose de plus professionnel ?

E : Nous avons toujours travaillé de manière professionnelle.
B : Je confirme les propos d’Elena. Le Concours-Circuit a sans doute accéléré les événements, mais cette dynamique a toujours été en nous.
E : Nous avons dû nous réinventer lors de chaque épreuve. Entre résidences, interviews, etc., nous avons appris à sortir de notre zone de confort. Le concours crée une dynamique intense : monter sur scène, jouer vingt minutes, en sortir pour laisser la place à un autre groupe. Cette expérience nous a permis de mieux gérer la pression ou des situations difficiles comme jouer loin de chez soi en supporting act d’un groupe face à un public qui n’est pas là pour vous. Nous avons déjà eu la chance de nous produire en première partie de DIRK., ce sont des mecs très cool, je suis donc rassurée. Le Court-Circuit nous a permis d’être booké rapidement. Nous avons majoritairement joué devant des fosses réceptives, hormis l’une ou l’autre date où cela s’est avéré un peu plus compliqué. Nous en sommes ressortis plus solides. Je dirais que nous sommes devenus tout terrain en quelque sorte.

Votre dernier Ep a été mixé et masterisé par Mark Gardener, l'un des deux chanteurs/guitaristes de Ride, groupe de shoegaze. Cette collaboration vous a-t-elle ouverte des portes sur le plan international ?

E : Non, pas spécialement. Nous n’avons pas bénéficié de contacts particuliers à l’extérieur. Nous n’avons pas cherché, non plus, à lui piquer ses relations professionnelles, à ce brave monsieur. Mark Gardener est une personne très chouette et d’une grande humilité. C’est un pionnier dans le genre, dont Eosine est apparenté. Mark a toujours été très à l’écoute, bienveillant. Travailler en sa compagnie a été une formidable expérience. Mais nous ne sommes pas allés jouer à Oxford, non (rires). Cette collaboration nous a, en tout cas, permis de présenter une belle carte de visite et de la crédibilité dans le milieu.

Le travail de Mark Gardener a permis de restituer cette atmosphère live aux chansons que l’on ne rencontrait pas sur le premier Ep. Je dois dire que c’est sans doute là votre terrain de jeu et la raison d’exister d’Eosine. Qu’en pensez-vous ?

E : Figure -toi que le prochain Ep a justement été enregistré dans les conditions du live. Je suis une grande fan de production. Simplement, le travail ne sera pas brut de décoffrage car il y il y aura une part belle consacrée aux effets. L'énergie sera au rendez-vous, ce sera un nouveau son, une nouvelle étape. Nous évoluons, y compris dans la maturité. Nous ne sommes qu’au tout début de notre carrière. Eosine est mon premier projet, je poursuis donc mes premières expériences. Et nous apprenons vite.

Tiens Elena, en tant que femme, que penses-tu de leur sous-représentation dans une multitude de domaines, et notamment dans celui de la musique. Y consacres-tu une idéologie particulière ?

Un malaise s’installe tout à coup …

E : Question suivante, s'il vous plaît !
D : C’est le genre de sujet pour lequel nous préférons ne pas prendre position.
E : Je suis désolée, mais mon propos se voulait sans agressivité. Ce n’est pas la première fois que l’on essaie de taxer Eosine de ‘nouvelle sensation rock féminine’. Ce n’est pas cette image que l’on défend. Je suis un être, né avec deux chromosomes x. Franchement, je n’ai pas du tout l'impression que ça change la manière dont je fais de la musique. Je n’ai même jamais revendiqué d’être une femme dans les textes des chansons. Mettre en avant cette idéologie et concevoir des festivals féministes est discriminant à mon sens. N’avons-nous pas la même légitimité que les formations masculines ? Je suis favorable à l'universalisme. Il est nécessaire de considérer le tout comme n'importe qui et de ne pas nous faire nous battre, nous les femmes. Nous avons les armes nécessaires pour se démarquer comme n'importe quel autre groupe. Je suis consciente que tout le monde ne partage pas ces positions et je respecte tout à fait les festivals qui, justement, prônent la non-mixité, en poursuivant dans une direction féminine ou ‘sexisée’. Perso, je n’y adhère pas, que ce soit, pour ce projet ou d’autres d’ailleurs.

Auriez-vous quelques infos croustillantes au sujet du nouvel Ep, au stade de la préparation, en exclusivité pour les lecteurs de Musiczine ?

E : Notre premier single s’intitulera « Progeria ». Nous le dévoilerons d’ailleurs en exclusivité ce soir puisqu’il ne paraîtra officiellement que le 15 mai chez notre nouveau label flamand. Une chance parce que je sais qu’il n’est pas toujours facile de percer dans ce petit coin de la Belgique. Est-ce que je vais te dévoiler le titre du prochain Ep ? Pas encore, je préfère faire durer le suspense.
Cet Ep sera un seuil, une dernière étape avant l'album. J’aime l’idée d’une eau frémissante, avant de passer à un autre état. En tout état de cause, il sera plus ouvert et beaucoup plus mis à nu. Davantage cathartique également.

(Photo : Christophe Dehousse)

samedi, 15 juin 2024 13:07

Manu Chao célèbre l’autre…

Manu Chao, l'icône de la scène musicale mondiale, revient sur le devant de la scène en sortant un nouveau single baptisé "Viva tu". Après plusieurs années d'absence médiatique volontaire, l’artiste nous offre un avant-goût de son prochain opus tant attendu.

"Viva tu", produit par Radio Bemba et co-mixé par Manu Chao et Chalart58, constitue un hommage vibrant à l’humanité et à la diversité, une célébration de l’autre. Ce single, paru ce 29 mai 2024, capture l’essence de l’artiste avec sa simplicité désarmante et ses paroles touchantes. Il reflète les thèmes chers à Manu, tels que la communauté, les relations humaines et la beauté des moments simples de la vie.

"Viva tu" annonce également la sortie d'un nouvel elpee qui promet de transporter les auditeurs dans un voyage musical riche en émotions et en réflexions. Ce long playing, qui recèlera des titres inédits et des compositions en plusieurs langues (espagnol, anglais, français et portugais), explorera des thèmes contemporains tels que l’immigration, la critique sociale et l’amour pour la vie quotidienne.

Sur "Viva tu", Manu Chao nous rappelle que malgré les défis de notre époque, il existe toujours des raisons de célébrer la vie et de rester connectés les uns aux autres. Cette compo invite à redécouvrir sa musique.

Le clip d’animation consacré à "Viva tu" est disponible ici

 

 

 

samedi, 15 juin 2024 13:05

L’esprit infini de LUX the band…

Après la sortie de second elpee, "Gravity" (décembre 2022), et de l'Ep "Before Night Falls - The Black Box Sessions" (digital janvier 2024), le quatuor LUX the Band (Angela Randal et Sylvain Laforge accompagnés de Julien Boisseau et Amaury Blanchard) est de retour. Il vient de sortir un nouveau single intitulé "Infinite Mind".

Il s’agit d’un titre rock simple et direct, avec un gimmick mémorable et un solo reconnaissable de Sylvain Laforge. Les paroles cherchent à capturer un instant, à suspendre le temps suffisamment longtemps pour observer de près un état d'esprit où la beauté et l'amour côtoient la frustration et la déception, pendant que nous comptons les heures de la journée, jour après jour. Un sentiment d’exclusion, regardant ce qui se passe à l’extérieur tel un spectateur de sa propre vie. Le titre se conclut sur cette note d'espoir : ‘retreat, toss out the garbage and redefine’ (‘se retirer, se débarrasser des interférences et se redéfinir’) !

"Infinite Mind" est disponible sous forme de clip

Le plan statique et le huis clos traduisent un espace mental et les différents états qui s'y trouvent.

L'action se déroule uniquement en intérieur –répétition, réflexion et multiplication– autant de façons de montrer le fonctionnement d'un esprit, visuellement soutenu par le montage du talentueux William de Caron et les images lumineuses de Jehsong Baak.

Dans cette vidéo, Sylvain symbolise la musique, toujours présente. Il n'est pas tout à fait le fruit de l'imagination d'Angela mais il existe dans son imaginaire (la petite musique dans notre tête).

Angela est à la fois la narratrice et l'autrice, en train de réfléchir, d'écrire et toujours en mouvement, prise dans l'acte de chercher les mots pour écrire la chanson.

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