Le Festival de Ronquières se singularise, depuis ses débuts, par une affiche aussi populaire qu’éclectique. Il y en a vraiment pour tous les goûts : du hip-hop au folk, en passant par le rap et le rock ! Sans oublier, pour être au goût du jour, des pointures de l’électro, comme PFR ou encore Kid Noize…
Après un passage remarqué en 2013, le collectif britannique Archive est venu lui aussi fouler les planches installées près du Plan Incliné, dans le cadre de cette sixième édition, pour défendre un long playing, sans doute moins accessible que les précédents, « The False Foundation ».
Plutôt expérimental, il divise un public pourtant habitué à ses évolutions musicales. Il emprunte aussi bien au rock qu'à la musique électronique et au trip hop ; mais au fil des opus, son style est devenu de plus en plus déroutant.
Initialement prévue vers 17 heures, l’interview est sans cesse reportée, le car véhiculant le combo ayant pris énormément de retard. C’est finalement vers minuit trente qu’elle va se dérouler en backstage, en compagnie d’une des chevilles ouvrières, Danny Griffiths (NDR : l’autre, c’est Darius Keeler), passablement exténué d’une journée riche en émotions.
Les cernes sous les yeux en disent long… Votre serviteur, pourtant persévérant, comprendra plus tard pourquoi son hôte est peu prolixe ! La vie d’artiste est parfois mise à rude épreuve !
Le musicien se livre bon gré mal gré au jeu des questions/réponses dans la langue de Shakespeare.
Ronquières est un festival très diversifié. Comment appréhendez-vous votre set face à un public qui n’est pas forcément venu pour Archive ?
Ce festival propose une affiche variée, c’est vrai ! Je suis tout à fait conscient qu’une frange de la foule ne s’est pas forcément déplacée pour Archive. Ce qui ne me pose aucun problème ! C’est justement cette démarche qui est intéressante. Des gens vont découvrir un univers musical qu’ils ne connaissent pas et se charger ainsi de nous procurer une certaine notoriété, par la même occasion. C’est l’effet domino !
L’électronique est très présente dans vos compositions. Une volonté de s’éloigner du rock ?
A vrai dire, je milite au sein du groupe depuis sa création. J’en connais donc toute l’histoire et son évolution. Comparer Archive à de la simple musique électronique serait un peu réducteur ! Au travers nos différents albums, nous avons tenté, avec plus ou moins de succès, de mêler l’électronique au rock en y ajoutant une touche d’orchestration. Aujourd’hui, notre souhait est de revenir à une base un peu plus électronique. Pour nous en donner les moyens, nous avons construit un studio analogique en Angleterre et utilisé du matériel ‘old school’, lors des sessions.
« The False Foundation », votre nouvel elpee, exige davantage de maturité en terme d’écoute que les précédents. Qu’en pensez-vous ?
On peut dire qu’à l’exception d’« Axiom » (2014), de « With Us Until You’re Dead » (2012) et « Restriction » (2015), nous avions l’habitude de proposer des disques un peu plus commerciaux. « The False Foundation » est sans doute un peu moins accessible, c’est vrai ! Il s’adresse à un public qui affiche une plus grande maturité musicale. Mais cette tendance s’est développée naturellement, à vrai dire. Nous sommes issus de l’underground et la créativité est un paramètre naturel chez nous.
Vos elpees sont tous différents. La prise de risques est-elle dans vos gènes ?
C’est véritablement dans la culture d’Archive. Ne jamais se reposer sur ses lauriers ! Créer, toujours et encore. Expérimenter d’autres sons et les tester lorsque nous entrons en studio. Si tu veux continuer à exister, il est nécessaire se dépasser constamment. C’est la recette de notre pérennité. Je pense sincèrement que nous n’aurions pas pu arriver à ce stade, sans une telle dynamique de travail.
Le groupe devient-il de plus en plus expérimental au fil du temps ?
On nous catalogue, effectivement, comme un band expérimental. Pourtant, dans notre répertoire figurent des chansons plus abordables. Au final, je dirais que nous sommes un groupe de pop/rock… expérimental.
Au fond, « Fuck U », résume un peu ton analyse ?
Oui, quelque part, ce titre incarne bien Archive ! Le message véhiculé est très fort.
Archive et les voix féminines, est-ce une grande histoire d’amour ?
Absolument ! En live, comme en studio, on privilégie ce type de collaboration. C’est un peu l’ADN de la formation. D’ailleurs, nous disposons de quelques titres en préparation dans lesquels nous pourrions y intégrer des voix féminines. Nous devons encore étudier cette opportunité.
Certaines de vos compositions sont plutôt longues. Deux morceaux de plus de 7’ figurent encore sur « The False Foundation ». On est loin du format radio. Pourquoi persister dans ce type de structure ?
Encore une fois, la démarche d’Archive est tout à fait naturelle. Nous ne cherchons pas à rentrer dans un cadre radiophonique à tout prix ! Notre travail recevra toujours un écho auprès de celles et ceux qui affectionnent notre macrocosme. Si tu aimes, tant mieux. Dans le cas contraire, passe ton chemin.
Vous avez joué en première partie de Muse, au Parc des Princes. Une forme de consécration ?
A l’époque de la tournée qui a suivi la sortie de « Lights », notre agent nous a proposé d’assurer le supporting act de Muse. Nous ne pouvions évidemment pas refuser une telle opportunité ! Le trio a découvert notre univers et l’a manifestement apprécié. Nous étions très contents. Cette date a enrichi notre carte de visite !
Vous vous êtes produits à Londres en avril et en juin. Pourquoi ne parvenez-vous pas à vous faire une place au soleil au Royaume-Uni, alors que c’est votre pays d’origine ?
Il assez difficile pour un groupe comme le nôtre de percer dans de grosses villes comme Manchester, Liverpool ou encore Southampton. Et ce, pour des raisons plurielles ! D’abord, nos chansons bénéficient rarement d’une place de choix sur les ondes radiophoniques. La culture musicale est diamétralement différente en Belgique et en France. Ces pays sont nettement plus enclins à diffuser nos compos. Je les en remercie vivement d’ailleurs ! Je me rappelle tout de même avoir entendu certaines plages de notre dernier album sur ‘Radio 6 music’, qui appartient à la BBC. Ce qui est plutôt prometteur. Mais, je ne m’inquiète pas de cette situation ! Il faut aussi relativiser ! Le contexte économique actuel est difficile. Aujourd’hui, rares sont les organisateurs qui peuvent se permettre de payer des groupes renommés. On s’est déjà produits à Londres où nous avons vécu une très belle expérience. Prochain objectif : l’Amérique !
De nombreux changements sont intervenus au sein du line up depuis vos débuts. Est-il enfin devenu plus stable, aujourd’hui ? Quelles sont les forces de la nouvelle mouture ?
La colonne vertébrale du band est constituée de Darius, Danny, Pollard et Dave, depuis maintenant quatorze années. Si pour certains, ces changements peuvent se révéler source de problèmes, en ce qui nous concerne, ils ont été bénéfiques. Aujourd’hui, comme tu peux le constater, nous existons toujours. Je crois qu’il faut considérer ces tribulations de manière positive. Les personnes qui se sont succédées au sein du band ont apporté un plus, permis d’évoluer, de se surpasser, de se remettre en question et d’explorer des styles différents. La base s’est consolidée au fil du temps. Il est maintenant stable ! J’espère ne plus connaître les avatars rencontrés à l’époque. En live, la base est immuable. Par contre, en studio, la présence d’autres musicos nous permet d’expérimenter et de disposer d’une palette de couleurs sonores plus large.
Vous avez composé la bande originale du long métrage Michel Vaillant ? Ce film s’est soldé par un échec ! L’expérience a quand même été intéressante ?
Le film était vraiment de la merde ! En bref, la bande originale était bien meilleure. Je n’avais alors pas encore rejoint la formation. Mais c’était tout de même une bonne expérience !
En début d’entretien, tu as déclaré que quelques nouveaux morceaux avaient déjà été ébauchés. Vous envisagez de graver un nouvel opus, dans un futur proche ?
Je peux juste te dire que nous sommes de retour en studio. Nous bossons en compagnie de collaborateurs que nous souhaitions impérativement inviter. Pour l’instant, il ne s’agit que d’un travail d’écriture et d’enregistrement. Il est toutefois encore trop tôt pour en parler. Nous avons aussi un autre projet destiné à une boîte célèbre de jeux vidéo. C’est tout ce que je peux te dire aujourd’hui.