Todd Rundgren vient de fêter ses 60 balais en juin dernier. Pas n’importe qui, puisque non seulement il est multi-instrumentiste, compositeur, interprète, chanteur, ingénieur du son et producteur, mais il est surtout un expérimentateur invétéré. En 1992, il avait ainsi été le premier à proposer des œuvres interactives. Et aujourd’hui encore, il est toujours à la pointe de l’aventure et de l’innovation. Le succès, il ne l’a récolté qu’au cours des seventies. Et s’il a pu continuer à expérimenter, c’est à cause de son talent de producteur. Ce qui lui a permis d’arrondir ses fins de mois. Il a ainsi bossé pour The Band, Patti Smith, les Sparks, les New York Dolls, XTC, Psychedelic Furs, Iggy Pop, et la liste est loin d’être exhaustive. Et constitue une influence majeure pour Prince…
Il vient donc d’enregistrer un nouvel album. Chez lui à Hawaii, là où il vit aujourd’hui. Et difficile de faire plus solo, puisqu’il y joue à l’homme-orchestre. Todd y a quand même privilégié la guitare, même si les accents prog, les pastiches et les clins d’œil jalonnent l’intégralité de l’opus. Pastiche d’AC/DC sur l’hymnique « Strike », un morceau au cours duquel il hurle même comme feu Bon Scott, de Deep Purple circa « In rock » sur le pseudo boogie « Gun ». Clin d’œil à Led Zeppelin sur l’enlevé « Panic » (NDR : ce riff de guitare !), mais aussi sur le blues rock rampant « Weakness », un slow abordé dans l’esprit du tubesque « Since I’ve been loving you », malgré des variations ‘rundgreniennes’, au Floyd sur le cosmique « Afraid » et à Metallica tout au long de « Mercenary », malgré l’un ou l’autre intermède plus atmosphérique. Sans oublier l’interlude planant chanté à la manière de Sting, infiltré au beau milieu du single potentiel « Today ». Un morceau irrésistiblement dansant, dynamisé par des percus excitantes, presque latino (des boîtes à rythmes ?) et balisé par une ligne de basse grondante. Sans quoi, hormis l’autre boogie « Mountaintop » et le décapant « Mad », le reste de l’elpee nous replonge dans un style plutôt éthéré, développé en compagnie de Utopia, au cours des seventies. A l’instar de l’approche bluesy, ‘hendrixienne’ exercée sur « Bardo » ou sur le très mélodique et emphatique « Courage ». Caractéristique de l’album, ses 13 titres se résument à un seul mot. Enfin, on épinglera à nouveau la qualité de ses textes à caractère sociologique. Mais ici, il faut quand même une bonne connaissance de la langue de Shakespeare, pour pouvoir en disserter…