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Une question de relations humaines… Spécial

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C'est à la suite de « Pilot Village Midnight », un premier Ep teinté de folk électrifié et minimaliste, sorti en 2013, que Renaud Ledru (guitare, voix) et Alexandre De Bueger (batterie) –aujourd'hui remplacé par Nicky Collaer– suscitent la curiosité de la presse belge.

Ce premier essai les amène à participer, l'année suivante, aux concours organisés par le Verdur Rock et le Concours-Circuit. Epreuves qu'ils remportent.

En 2015, « Dirty Road » permet au duo de fouler les planches du Botanique, de l'Ancienne Belgique, du Festival de Dour ainsi que des Ardentes.

Tout au long de « Wild Jalopy Of The Mist », son premier elpee, la paire développe son répertoire en proposant certains morceaux rock/garage et d'autres plus acoustiques.

Le combo revient ensuite aux racines de la musique américaine qui l’ont influencé, privilégiant les sonorités de guitare sèche à travers un nouvel Ep intitulé « And The Sky Dives Again ».

« Camouflage », second opus gravé en 2020, permet à la formation d'obtenir, non seulement d'excellentes critiques nationales, mais également outre-Quiévrain en récoltant notamment des articles favorables dans le Rolling Stone et Indie Music.

« Human Flare », polarisé sur le thème de l’humain et de ses relations aux autres, constitue le fuit d'exercices de style et d’expérimentations diverses.

Renaud expose et s'expose par caméras interposées. Décryptage.

Alaska Gold Rush fonctionne en binôme depuis sa création. Vous avez tous deux étés actifs au sein de divers projets en amenant une culture musicale différente. L'un apporte le côté garage et l'autre l’aspect ouaté du folk. Comment deux êtres que tout oppose parviennent-ils à s’accorder pour proposer un résultat parfaitement cohérent ?

Le groupe existe depuis plusieurs années maintenant. Je suis accompagné de Nicky (Collaer). Il se charge des drums depuis 2019. Avant de le rencontrer, je fonctionnais déjà en duo, mais en compagnie d’un autre batteur. Notre musique est le fruit de plusieurs années d'expérimentations. A l’origine, le projet était plutôt folk car je suis influencé par le folk américain. Est alors venue l'idée de mélanger cette influence folk aux rythmiques plus rock de manière à obtenir un produit plus alternatif. Nicki a rendu la chose plus dynamique et petit à petit le côté folk s'est effacé. Les deux styles ne s'opposent pas et le résultat reste cohérent. Nous ne sommes que deux et nous devons l'assumer pleinement. Je n'ai pas de réponse très précise à cette question, la musique d'AGR est tout bonnement le fruit d'expérimentations et de mélange de styles.

Perso, j’ai l’impression que vous fonctionnez davantage à l'instinct en laissant peu de place à la réflexion intellectuelle. Est-ce exact ?

Au contraire, la réflexion est omniprésente. Le fait d'être deux nous oblige à remplir l'espace sonore. Il n'y a pas, par exemple, de basse comme dans la plupart des formations. L'ennui peut alors vite se manifester parce que nous ne pouvons pas ajouter des éléments comme des samples ou des boucles. On est obligé d'aller à l'essentiel en construisant le morceau d'une certaine manière. Je pense clairement que nous avons trouvé notre style, du free folk garage, c'est-à-dire une musique sans limite et insouciante.

On imagine que si vous deviez vous entourer d'autres musiciens, vous perdriez le côté naturel et spontané qui forge votre marque de fabrique...

Lorsque le précédent batteur a quitté la formation, je me suis demandé s’il fallait conserver la formule. Finalement, le duo l'a emporté. Même si composer un groupe à deux reste une contrainte, il permet de se challenger et se renouveler. Dans le chef du batteur, l'exercice de style est très intéressant. Au sein de ses projets précédents, Nicky se limitait à un rôle d'accompagnateur en se servant de rythmiques basiques. Ici, il a carte blanche. Il a le devoir de remplir le morceau à lui seul. C'est une formule qui permet d'explorer un tas de perspectives. Lorsque nous nous produisons en live, le public est surpris que tant de consistance soit créée par si peu de musiciens. Je crois que si nous devions être davantage sur scène, notre musique aurait moins d’impact. Mais qui sait, peut-être qu'un jour nous n'aurons d'autres choix que de glisser vers une formation impliquant davantage de musiciens.

Un duo s'apparente à une vie de couple. Mais est-elle autant semée d'embûches ?

Être deux peut se révéler à la fois un avantage comme un inconvénient. Difficile par exemple de se reposer sur l'épaule d'une tierce personne au sein du combo.

J'ai de la chance, parce qu'avec Nicky, nous avons très vite matché tant humainement que musicalement. Sinon, le projet n'aurait pas fonctionné.

S’il fallait étiqueter ton projet, on dirait qu'il ressemble à celui de BRNS pour la rythmique syncopée et à Mountain Bike pour le côté garage et nonchalant. Qu'en penses-tu ?

Personne n'avait osé la comparaison jusqu'alors. Ce sont des groupes géniaux. Ils sont à la fois créatifs et cool.

Comparativement à BRNS, nous n’abordons pas tellement le rock progressif. Ce groupe baigne dans un registre un peu plus barré. Le folk reste présent dans notre musique. Nous sommes aussi très attachés tant au format des chansons qu'aux textes à proprement parler. Les moments purement instrumentaux ne sont pas nombreux non plus. Nous nous sommes inspirés de musiques alternatives. Alors, peut-être, y-a-t-il des relents de BRNS... En ce qui concerne la filiation à Mountain Bike, il y a en effet, cette nonchalance qui plane, ainsi que le volet garage et le rock lâché. Ce sont des groupes que nous apprécions beaucoup. La comparaison nous enchante. 

Le nouvel album, « Human Flare », s'est construit autour du thème de l'humain et de ses relations aux autres. Peut-on y voir comme fil rouge, une discussion avec tes amis, des membres de la famille ou ton entourage ?

J'ai effectivement essayé de construire chaque morceau en mettant en exergue, non pas les humains en général, mais un humain en particulier. Ce n'était pas le postulat de départ, mais les choses se sont dessinées naturellement autour de cette thématique. Chacun des morceaux s'articule autour d'un dialogue avec un proche, un membre de ma famille ou encore un ami. L'idée était d'obtenir un instantané dans la vie de l'individu en imaginant le dialogue comme un retour dans le souvenir, une après-midi ou un événement particulier, par exemple.

C'est un LP positif, mais quelques compos lorgnent sur des sujets plus lourds comme la dépression. Je pense ici tout particulièrement à « Love Chameleon ». Une thématique aussi personnelle est-elle liée à un vécu ?

Oui, tout à fait ! Dans l'album, rien n'est inventé. J'aime l'idée de narrer des choses très personnelles. Ou encore de les transposer dans une autre situation. Je crois que ce sont les textes les plus personnels que j'ai écrits. Le disque est en substance très positif avec parfois une pointe de mélancolie qui est souvent perçue par l’auditeur lambda comme négative parce qu'elle renvoie à une forme de remémoration du passé. Si j’analyse la métaphore du coucher de soleil en fin d'été, certains y verront de la nostalgie, alors que perso je n'y distingue que du positif. L'album est à cette image. Si « Love Chameleon » aborde de la difficulté de s'en sortir, le refrain quant à lui reste optimiste. Ce dernier l'emporte sur le reste…

Chez Alaska Gold Rush, la corrélation entre musiques et images s’avère essentielle. Comment s'opère la mise en image d'une chanson ?

Nous avions le souhait de ‘clipper’ nous-mêmes. Chaque single est accompagné de sa vidéo. Je m'intéressais depuis un moment au cinéma et la prise de vue. Comme le texte, le clip raconte une histoire tantôt sociale, tantôt mélancolique et nostalgique. La vidéo suscite la réflexion soit en mettant en scène deux enfants ou encore, lorsqu’elle est décalée, communique un message.

AGR, c'est aussi une histoire de famille. Tes neveux, après avoir tourné dans « Dirty Road », jouent ici à la guerre dans la rivière tout au long d’« Arsonist ».

C'est exact ! Tu sais, lorsque nous n'aimons pas que les compos soient trop figées. Elles fluctuent. Tantôt, nous les ralentissons, tantôt, nous les accélérons. Nous pourrions jouer avec le clic, mais nous préférons ne pas utiliser cette formule. Il faut laisser la place à quelque chose de plus vivant. C'est pareil pour les images. On préfère du fait maison. On pourrait utiliser des drones et engager toute une équipe de post-production afin que les choses soient cadrées, mais cela ne nous intéresse pas. « Arsonist » aborde le thème de l'enfance avec mon meilleur ami. Il était donc nécessaire de pouvoir y faire participer des jeunes. Ce sont mes neveux qui s'y sont collés. Ils avaient déjà contribué à un de mes clips et étaient enchantés de réitérer l'opération. La vidéo a été tournée sur les lieux de mon enfance. Il s'agit de la maison de mes parents et du parking où j'allais jouer lorsque j'étais gamin. C'est à la fois personnel, humain, fragile et imparfait. Les clips étudiés ou léchés à outrance ne m’intéressent pas. Certains le font très bien et tant mieux pour eux.

Alexandre De Bueger est un des membres fondateurs de la formation. Il est remplacé aujourd'hui par Nicky Collaer. Il se dit que lorsqu'un musicien quitte un groupe, celui-ci perd une part de son âme...

Alex m'a annoncé qu'il souhaitait partir vivre à l'étranger. Le voyage devait se limiter à un aller simple. Après quelque temps, il est finalement revenu en Belgique. A l'époque, des concerts étaient programmés. J'ai donc dû lui trouver un remplaçant au pied levé en la personne de Nicky. Nous nous sommes découverts des atomes crochus très rapidement, tant au niveau musical que des relations humaines Nos influences sont différentes. Nos styles, aussi. Celui de Nicky a apporté un souffle nouveau et a contribué à explorer d’autres univers. J'ai d'ailleurs l'impression que la formation est récente alors qu'elle existe depuis quelques années déjà.

« OD on Sugar » aborde le thème de l'addiction. Mais contrairement à ce que l'on pourrait penser, cette addiction ne concerne ni le sucre ni les drogues, mais plutôt les discours édulcorés et bien-pensants. Pourquoi, selon toi, la censure et l’auto-censure, prennent-elles autant de place dans la société moderne ?

Je n'aborde pas la censure en tant que telle, mais plutôt d’un point de vue politique. La situation est identique en entreprise. Je m'explique. Pour faire passer une idée, quoi de mieux que de l'enrober. Cacher la vérité est bien plus aisé que de la montrer et ainsi pointer le côté négatif. Je ne suis pas convaincu qu'il y ait une forme de censure là-dessous. Ni même que la démarche soit nécessairement toujours consciente. Dans la société contemporaine, les faibles n'ont pas leur place, il faut donc rester fort quoiqu'il advienne. Lorsque j'ai écrit ce morceau, je suis parti de cette idée sous l'angle de la politique.

« Trampoline » traite du non-sens des bullshit jobs. Est-ce ce même genre de travail dont tu parles dans « The Window », un titre issu de ton projet solo Elvin Byrds ?

Oui, tout à fait. A ceci près que Trampoline survole plutôt le volet de la destruction et du non-sens du travail. Aujourd'hui, tout est devenu course à la réussite. Chacun œuvre pour soi, sans se soucier des autres. « The Window » reflète plutôt la conviction profonde qui fallait que je change d’air. Au travail, je ressentais le besoin de libérer mon esprit et d’envisager vivre autrement. Le jazz m'a permis de comprendre comment casser certains codes de la rythmique, ce qui a été libérateur dans ma manière de concevoir la musique. « The Window » traite de cette transition.

De fil en aiguille, j'ai découvert le free jazz. L'idée est que l'on puisse, à partir de codes établis, changer les choses, les bouger, parfois même les effacer. En conclusion, les deux morceaux sont complémentaires. Une même thématique, mais abordée sous un angle différent.

Tu bossais dans l'administratif, à la tête d'une petite équipe. Tu étais apprécié par les collègues et la Direction et pourtant tu as tout quitté. C'est une décision courageuse par les temps qui courent...

Quand j'ai décidé d’abandonner ce boulot et de ne me consacrer qu'à la musique, j'ai eu ce déclic par rapport au non-sens du travail que je réalisais. D'où cette décision ...

Tiens, à propos de ce projet solo, où en es-tu aujourd'hui ?

Comme je viens de te l'expliquer, j'ai plaqué ce travail parce que j'étais happé par la musique. Le projet solo est né dans la foulée. Un Ep est sorti fin 2021. J'ai préféré ensuite donner la priorité à Alaska. Effectivement, c'est un projet qui me tient à cœur parce que j'adore le folk et ses guitares acoustiques. Je me produis aussi devant un public différent. Les endroits où je joue en solo me permettent de discuter avec les gens. J'y interprète des compos personnelles, mais aussi des reprises de chants traditionnels folk américains, sans oublier, de musiciens que j'affectionne particulièrement. Si pour l'instant, cette aventure est mise entre parenthèses, je crois que je m'y consacrerai de nouveau dans quelques mois. La difficulté, c’est qu'il existe peu de scènes ‘folk’ en Belgique, surtout en Flandre d'ailleurs. C'est dommage parce que dans des pays comme le Canada, les Etats-Unis et dans une moindre mesure l’Allemagne et les Pays-Bas, il existe tout un réseau de salles qui sont parfaitement adaptées à ce format. Peut-être aussi que les artistes qui osent franchir le pas ne sont pas suffisamment nombreux. Sauf, peut-être les Canadiens et les Américains.

« Camouflage », paru en 2020, a permis de vous faire connaître en France. Est-il plus facile, pour un groupe wallon, de percer à l'étranger plutôt qu'en région flamande ?

Honnêtement, oui. Cette situation est navrante. En réalité, il s'agit d'un circuit tout à fait différent, un peu comme si tu te produisais dans un autre pays. Je crois qu’inversement, les difficultés sont les mêmes. Le Flamand aura du mal à réussir en Wallonie. Si on veut jouer en Flandre, on n’a pas d'autre choix que de dénicher un booker flamand, sinon cela risque de s'avérer compliqué. La presse, elle aussi, fonctionne avec des canaux distincts. Nous avons eu la chance de décrocher quelques dates dans le nord du pays. Les gens étaient relativement réceptifs à notre musique. D'une manière générale, le potentiel y est parce que les Flamands sont friands de musiques anglo-saxonnes. Beaucoup comprennent parfaitement l'anglais et apprécient les textes bien torchés. C'est ce qui fait sans doute notre succès là-bas. Le facteur rencontre y joue aussi pour beaucoup. Il faut avoir la chance de tomber sur la personne pour pouvoir tourner. Il s'agit d'un réseau à entretenir. Nous avons, par exemple, trouvé quelqu'un pour nous exporter en France. L’univers de la musique est difficile et il n'existe finalement que peu réponses face à toutes ces difficultés. J'en discutais encore avec notre attachée de presse flamande, il y a peu de temps. Elle rencontre des difficultés à trouver des partenaires dans la presse néerlandophone lorsqu'elle défend un groupe francophone. Les priorités sont différentes dans la promotion des artistes. Il ne s'agit pas de deux cultures distinctes, mais clairement les organisations culturelles ne sont pas identiques. Je reste convaincu que peu de Flamands regardent la RTBF. De même que les francophones bruxellois ou wallons n'iront pas s'aventurer sur la VRT.

Pour prendre le contre-pied de tes propos, j'ai été amené à interviewer Jasper Steverlinck, un artiste flamand alors que je suis francophone et que je m'y intéresse depuis toujours...

Tu sais, aujourd'hui, il y a une telle surcharge dans le domaine de la musique. Les artistes et les sorties d'albums se comptent à la pelle. Chaque presse se focalise sur sa priorité. S'il s'agit d'une presse flamande, elle va tout naturellement s'intéresser aux artistes flamands. Les artistes wallons ou bruxellois ne viendront qu'en seconde position. La presse francophone suivra exactement le même raisonnement. Ces manières de procéder rendent alors plus difficile le passage de la frontière linguistique pour un artiste…

Choisir à nouveau Gaethan Dehoux comme collaborateur te permet-il de fidéliser le son d'AGR ?

D'une certaine manière, oui. Je ne sais pas si nous coopérerons encore à l'avenir, parce qu'expérimenter un autre univers peut s'avérer intéressant. Pour l'album, l'accent a été placé aussi bien sur les mélodies que les prises de son. En concert, cependant, c'est plutôt l'énergie qui prime. Gaethan nous connaît parfaitement musicalement. Il est capable de prendre les bonnes décisions tant au niveau des arrangements que des prises de voix ou encore des intentions. En optant pour sa collaboration, nous étions certains de baigner dans une zone de confort avec en prime cette notion d'humain et de famille. Notions qui sont essentielles à nos yeux…

Photo : Alex Thomas

 

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