Aujourd’hui le soleil est bien de la partie. Une évolution positive par rapport aux premiers jours (pluvieux) du festival. L’ambiance, déjà bon enfant en temps normal, l’est encore davantage ce 8 août. Et la fête bat son plein, puisque ce vendredi est finalement décrété sold-out, en début de journée. Idem en ville, lors du festival parallèle (et gratuit celui-là) Fonnefeesten, pour lequel la file s’étend en permanence jusqu’à plusieurs centaines de mètres pour y entrer. Mais pas le temps de s’y attarder, car un long programme et zapping entre les groupes nous attend.
En début de soirée sur la grande scène, DIIV profite des derniers rayons de soleil. Il est encore possible, à cette heure, de s’avancer aux premiers rangs et de circuler aisément vers le bar (NDR : ce ne sera plus le cas ensuite, car lorsqu’une journée du Lokerse Feesten est complète, on est vite serrés comme des sardines).
Après avoir accordé un concert aux réactions mitigées, dans le cade des Nuits Botanique, en 2022, les natifs de Brooklyn vont mettre tout le monde d’accord. Avant leur entrée sur scène, une vidéo, diffusée en fond d’écran, présente chaque membre du band (NDR : et ainsi éviter de le faire en fin de set ; et puis, les musicos sont plutôt des shoegazers et pas très loquaces).
En fait, entre chaque titre, la vidéo d’une tierce personne est projetée sur cet écran. Traitant brièvement du groupe, balançant une pub originale pour le merchandising ou encore pour défendre une bonne cause. S’autorisant ainsi des slogans de soutien à la Palestine ou du style ‘America is the great satan’.
Sur les planches, le look ne trompe pas : un t-shirt 3XL et une coupe à la Jay Mascis des débuts pour le bassiste. Des lunettes vintages à la Derrick pour le leader Zachary Cole Smith. Le guitariste central Andrew opte, quant à lui, pour une tenue sportive, casquette vissée sur sa tête. Bien que le combo ait souvent été catalogué comme noisy et indie, le fait d’avoir assuré la première partie de certains concerts de Depeche Mode, mais surtout grâce à son remarquable quatrième opus, lui ont permis de s’élever au niveau supérieur. Et ce soir, ce sont d’ailleurs les titres « Amber » et « Brown paper bag » qui servent d’ouverture, comme c’était le cas sur ce dernier elpee. En fait, une bonne moitié du set est issue de cet album. A l’instar de « Fog in boiling water », dont le titre éponyme est aussi interprété, tout comme l’éthéré « Soul net », qui n’est pas sans rappeler Slowdive, dans un même registre. Les compos s’enchaînent dans une ambiance de dreampop atmosphérique, sous les derniers rayons de soleil qui se couchent sur la plaine. En clôture « Doused », plage extraite de son deuxième long playing du même nom (NDR : et sans doute le moins bon des quatre), à la fois hypnotique et mélancolique, est découpé par ses riffs tranchants. Exécutant une sortie de scène tout aussi sobre que son entrée. Pour info, la formation reviendra à Maastricht, en concert gratuit, au Muziek gieterij, le 5 septembre. Mais également, au Splendid de Lille, 3 jours plus tard.
Direction le club réservé aux (re-)découvertes et à la scène indie. Hinds s’y produit. Un groupe féminin espagnol qui n'est pas sans rappeler Wet Leg, Wolf Alice voire Warpaint, en version tempérée (NDR : ces ‘W’ sont tout à fait accidentels). Très enthousiaste et volubile entre les titres, Carlota nous parle de sa première expérience agréable en Belgique, et de sa connaissance du français et de l'anglais. En fait, bien que ce band existe depuis une bonne dizaine d’années (essuyant quelques déboires durant les années Covid), sa passion et sa fraîcheur lui confèrent des allures de bande d’ados. Une spontanéité qui semble plaire à un auditoire bien rempli. Son rock garage flirte avec ce côté plus pop (teen), de quoi vouloir continuer à les suivre. Même si ce soir le temps presse, et un retour vers la grande scène s’impose, au milieu de sa prestation.
Quelle bonne surprise de voir la plaine, devant la main stage remplie à craquer ! Pas de doute, Haunted Youth jouit d’une fameuse popularité au Nord de la Belgique. Et ce malgré une maigre discographie. Un seul long playing à son actif, « Dawn of the freak », paru en 2022, et quelques singles gravés en 2024 et 2025. A l’instar de DIIV, la musique baigne dans le shoegaze. Une voix atmosphérique, de longs riffs, toujours soutenus par cette basse lancinante et omniprésente (NDR : un peu comme chez les groupes post punk et new-wave). Cependant, les musicos sont un peu trop statiques au goût de votre serviteur, ce qui le pousse à retourner vers la deuxième scène du club, pour une prestation plus pêchue.
McLusky avait déjà mis le feu aux nuits du Bota en mai dernier, tout comme The Ex et Jesus Lizard. Ce soir le bassiste et le batteur se démènent encore sans compter, sur la gauche du podium. Andrew Falkous semble plus concentré sur son sujet. D’ailleurs, il a un casque audio vissé sur la tête (NDR : il s’en sert comme protection auditive, pour diminuer le volume sonore). Le public est plus clairsemé, et surtout moins agité que lors de ce récent passage au Botanique et lors de leurs débuts, au Dour festival de 2002. Malheureusement, il n’est possible que d’écouter une partie du set, car le temps presse pour rejoindre la grande scène, devant laquelle le monde commence à se presser. Et vu l’affluence, pas facile de se faufiler. D’ailleurs Falkous, guère avare de boutades, nous rappelle, avant la fin du set, qu’un grand groupe s’apprête à jouer et qu’il est préférable quitter la salle. Pas grave, car McLusky sera de retour, au Cactus Muziekcentrum de Bruges, ce 4 octobre.
Une foule de dingue s’est massée devant la Main stage, longtemps déjà avant le début du concert. Pas de doute, The Smashing Pumpkins est l’un des concerts les plus attendus de cette 25ème édition, voire de toute l’histoire du festival (NDR : à entendre les commentaires à priori et à posteriori). Pourtant, à l’instar des Sex Pistols lundi, les craintes relatives à la prestation des Smashing sont pourtant assez élevées. Il n’est d’ailleurs pas difficile de comparer le band chicagoan à Placebo, programmé aux Lokerse Feesten, deux ans plus tôt. Et pour cause, intéressants sur disque, ils le sont beaucoup moins en live.
On se souvient de son excellent premier elpee, « Gish » (NDR : malheureusement oublié de la setlist de ce soir). Et même du tout dernier « Aghori Mhori Mei », paru l’an dernier. En fait les attitudes de Brian Molko pour Placebo, et du leader de Smashing Pumpkins, Billy Corgan, ternissent régulièrement les prestations des combos en public. Bref, ils sont, par nature, antipathiques. Et Corgan suscite même la crainte. Le genre de gars à qui on ne confierait pas ses enfants, même 5 minutes. Sur scène son humeur peut influencer le déroulement du set. Il a déjà révélé publiquement souffrir de troubles mentaux. On est aussi en droit de déplorer les changements de line-up. A la basse notamment, à la suite des défections successives des charmantes D'arcy Wretzky (devenue actrice a posteriori), Melissa Auf der Maur (partie rejoindre Hole, entre autres) puis encore Nicole Fiorentino. Cependant la multi-instrumentiste Katie Cole, et la guitariste Kiki Wong (installée côté gauche de l’estrade), ne manquent pas de charme, mais surtout apportent leur touche personnelle. De la formation originelle, il reste le sixcordiste James Iha (dont l’interview accordée en 1993 est toujours disponible ici) et le drummer Jimmy Chamberlin (malgré plusieurs allers-retours).
C’est d’ailleurs James qui prend d’abord la parole en début de set, pour introduire « Today », en ces termes : ‘Goeie avond (NDR : bravo pour l’effort de la langue et avec le bon accent), We are Smashing Pumpkins, now let’s rock !’. Le ciel se dégage et la pleine lune brille sur le côté gauche du podium. Dont le décor a de quoi impressionner. A cause des structures gonflantes et du light show, en début de parcours très tamisé (NDR : un calvaire pour les photographes - voir les photos de Wim Herbaut, là). Le concert se mue rapidement en ‘best of’, épinglant notamment « Bullet With Butterfly Wings » et « 1979 ». Certains estiment la reprise de « Berlin », amusante (NDR : y compris Billy qui lâche sa guitare et vient sourire (fait rare !) en s’approchant de l’avant-scène…
Cependant, dommage que le combo n’ait pas interprété davantage de morceaux singuliers, à l’instar de « Bodies », joué lors de shows précédents. D’autant plus que la durée du set est calculée à la minute près. Soit 1 h 30, ne laissant guère de place aux surprises. Mais ne boudons pas le plaisir d’assister à un concert de Smashing Pumpkins en forme, au cours duquel Billy est de bonne humeur. Des compos comme « Disarm », « Tonight, Tonight » et le décapant « Cherub Rock » (caractérisé par son riff d’intro lancé par Corgan en personne) se succèdent. Soit autant de titres qui nous replongent dans l’époque d’une jeunesse insouciante des 90’s. Un temps que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître. Une époque au cours de laquelle les vidéos de ces singles étaient diffusés sur la chaîne MTV.
Dans la setlist figurent les excellents « Ava Adore » et « Zero », insérés parmi certains morceaux un peu trop tirés en longueur. Et cette courte reprise/intro de Black Sabbath, balancée en fin de parcours, n’est pas vraiment nécessaire ni judicieuse (NDR : c’est bon, on lui a assez rendu hommage à l’autre écorché vif). Et à l’issue du final électrique « The Everlasting gaze », Corgan prend le temps de longer l’avant du podium, seul, pour saluer la foule (NDR : parce que ce soir, il était de bonne humeur, on vous le rappelle).
Même s’il évolue dans un autre registre, Goose n’a pas de mal à (re-)conquérir le public en fin de soirée (enfin en début de nuit, car il entame sa prestation après 1h du matin). Il faut préciser que le band flandrien se produit, en moyenne, tous les deux ans, depuis 2008, aux Lokerse Feesten.
Mais que de changements depuis ses débuts. Ou comme il y a 10 ans, lors d’un concert intimiste accordé à l’Eden de Charleroi ! Désormais, le band courtraisien envoie du lourd dans le cadre des plus grands festivals, tant visuellement qu’au niveau sonore. En intro, « British mode » résonne, en effet, comme le titre d’un grand groupe de britpop électro. Ensuite le leader Michael Karkousse, fort de sa grande taille, se sent pousser des ailes et part au contact du public, sur le tout aussi bien nommé « Can’t stop me now ». « Control » ou « Bring it now » continuent de faire danser la foule. Tout comme « Words » ou l’inévitable instrumental « Synrise », en clôture.
On signalera encore que les noctambules ont eu le loisir de s’éterniser jusque 5h du matin au Club Studio Brussel grâce aux DJ sets d’Helena Lauwaert et Aya.
PS : n’hésitez pas à vous replonger dans l’ambiance des Lokerse Feesten, en consultant le reportage photo de Wim Herbaut ici
(Organisation Lokerse Feesten)